Expérimentations sur un voltmètre de la brocante de Louvexpo et mes premiers pas dans l’électromagnétisme
Par Noëlla ON4HNO avec l’aide de ON4IJ
Introduction
Lors de la visite à la brocante radioamateur de Louvexpo 2025 à La Louvière, mon regard a été attiré vers un voltmètre analogique aux apparences très « vintage », un joli objet. Il s’agit d’un voltmètre prévu pour le courant alternatif et pour le courant continu. L’étendue de mesure, selon les calibres est de 150 V, 300 V ou 600 V. Il n’y a pas de marque apparente sur l’appareil, si ce n’est que quelques inscriptions en Allemand au dos du voltmètre. Les inscriptions semblent avoir été écrites à la main, une véritable calligraphie à l’encre de chine. Rien que par curiosité, j’ai acheté cet objet pour la modique somme de 5 Euros.
On peut se demander à quoi bon utiliser un voltmètre analogique à aiguille alors qu’il existe aujourd’hui des multimètres numériques à des prix défiant toutes concurrences. C’est vrai, mais je vais profiter de ce voltmètre à aiguille pour des expérimentations didactiques.
Voici une belle opportunité d’apprendre par la pratique des nouvelles choses en électrotechnique et en électromagnétisme, un peu plus loin que ce qui est exigé pour l’examen Harec, tout en effectuant une analyse de la construction interne de ce voltmètre. Certains OM’s appellent cela du reverse engineering.
Je vais donc voir si l’appareil fonctionne toujours, et s’il ne fonctionne pas, je vais découvrir quel est ou quels sont le ou les composant(s) défectueux et tenter d’expliquer l’origine de la panne. C’est un beau défi de comprendre le fonctionnement d’un vieil appareil de mesure de presqu’un siècle.
Dans cet article de vulgarisation technique, je vous raconte mon aventure lors de mes expérimentations et je vous explique tout ce que j’ai appris en me posant certaines questions sur le fonctionnement de ce voltmètre vintage. Cela m’a demandé d’établir certains raisonnements pour y arriver. C’est le cheminement du raisonnement qui a été pour moi le plus difficile à trouver. Heureusement, j’ai reçu de l’aide de mon OM ON4IJ pour tout apprendre. Vous constaterez que l’approche de l’analyse du voltmètre est assez originale.
Enfin, j’ai été surprise de constater que chaque étape du raisonnement, lors de l’analyse, se résume à un problème facile à résoudre avec quelques calculs d’une simplicité déconcertante. Il suffit de connaître les quatre opérations, le carré, la racine carrée, le sinus et le cosinus, et puis c’est tout.
Bonne lecture et bon amusement.
Un voltmètre vintage trouvé à la brocante de Louvexpo de 2025
Pour se fixer les idées, voici une photo du voltmètre que j’ai trouvé à la brocante.

Fig. 1 : Vue de face du voltmètre « Wevometer » (fabrication par la société Paul Gossen Co. K.-G. PGCD Erlangen, Nürenberg) datant probablement de 1928 et acquis lors de la brocante de Louvexpo en 2025. Photo : ON4HNO.
Voici les inscriptions au dos de l’appareil.

Fig. 2 : Vue arrière de la plaque de fond du voltmètre « Wevometer » (fabrication par la société Paul Gossen Co. K.-G. PGCD Erlangen, Nürenberg) datant probablement de 1928 et acquis lors de la brocante de Louvexpo en 2025. Photo : ON4HNO.
Origines du voltmètre
Après quelques recherches, j’ai trouvé sur le site Internet Radiomuseum.org, Stiftung Radiomuseum Luzern, Haltenriedstrasse 20, CH-6045 Meggen, Suisse, dirigé par Ernst Erb et Katrin Seiler Erb, qu’il s’agit d’un « Wevometer » fabriqué par la société de construction et de distribution d’instruments de mesures électriques Gossen, Paul Gossen Co. K.-G. (PGCD) Erlangen, Nürnberg, société fondée le 1er septembre 1919 par Paul Friedrich Karl Gossen avec son associé Otto Cohn. La société Gossen GmbH a été fusionnée avec ABB Metrawatt GmbH en 1993 et est connue actuellement sous le nom de Gossen-Metrawatt GmbH. En novembre 1997, la division des technologies des mesures photo- et de lumière s’est détachée de la maison mère et a donné lieu à la société indépendante Gossen Foto- und Lichtmesstechnik GmbH.
La date de construction du voltmètre serait probablement de l’année 1928. C’est vraiment très ancien et je dois remonter à la génération de mes grands-parents pour trouver une date de naissance qui se situe dans l’entre-deux guerres.

Fig. 3 : Logo de la société Paul Gossen Co. K.-G. PGCD Erlangen, Nürenberg. Ce logo est visible sur le cadran du voltmètre « Wevometer ». Source : historique de la société Gossen, site Internet de Gossen-photo.de, Foto- und Lichtmesstechnik GmbH, Lina-Ammon Str. 22, 90471 Nürnberg.
On reconnait le pictogramme, logo de la société Paul Gossen sur le cadran du voltmètre. On observe sur ce cadran qu’il s’agit bien d’un voltmètre avec une lettre « V » majuscule et que celui-ci est prévu pour mesurer indistinctement du courant alternatif (symbole ~) ou du courant continu (symbole -). Cette information se confirme avec les inscriptions au dos de l’appareil :
« Das Instrument ist bei 20° for Wechselstrom geeicht. Die Angaben sind unabhängig von der Frequenz zwischen ca. 15 und 75 Perioden. Für genauere Gleichstrom
messungen gilt folgende Korrektionstabelle, u der + Pol ist an die mit + bezeichnete Klemme zu legen. » (…)
« L’instrument est étalonné pour le courant alternatif . Les mesures sont indépendantes de la fréquence entre 15 et 75 périodes environ. Pour des mesures plus précises en courant continu, le tableau de corrections suivant s’applique, le pôle positif + doit être connecté à la borne marquée d’un +. » (…)

Fig. 4 : Cadran du voltmètre où apparait le logo PGCD de la société Paul Gossen. Photo : ON4HNO.

Fig. 5 : Détail du logo PGCD de la société Paul Gossen et du numéro de série sur le cadran du voltmètre. Photo : ON4HNO.
Premier test
J’ai commencé par mesurer la résistance ohmique du voltmètre au moyen d’un multimètre numérique moderne. La mesure me donne une résistance infinie non seulement entre la borne commune et le calibre de 150 V, mais aussi entre la borne commune et les autres calibres. Il en est de même pour les mesures entre les bornes des calibres 150 V et 300 V, idem pour les mesures entre les bornes 300 V et 600 V, et idem entre les bornes 150 V et 600 V.
J’ouvre le dos du voltmètre et j’observe la présence de quelques plaques rectangulaires en bakélite avec du fil bobiné dessus. Il doit s’agir de résistances bobinées de précision. En effectuant les mesures à l’ohmmètre aux bornes de chaque résistance, je constate qu’elles sont toutes claquées en circuit ouvert. Pas de panique, des résistances, cela se rebobine avec du fil résistant (au point de vue ohmique) ou bien cela se remplace par des résistances modernes et appropriées.

Fig. 6 : Vue interne du voltmètre où l’on observe des résistances bobinées sur des plaquettes en bakélite. Photo : ON4HNO.
Second test
Ensuite, j’ai effectué une mesure de la résistance de la partie galvanomètre, et oh, surprise, j’obtiens une mesure de 5 kΩ. Voici une très bonne nouvelle : le galvanomètre n’est pas claqué. Tiens, tiens, tiens, comment se fait-il que le galvanomètre n’ait rien et que se sont uniquement (et toutes) les résistances additionnelles du voltmètre qui sont devenues défectueuses ???
Principes des galvanomètres ferromagnétiques
En observant les pictogrammes (symboles) et les quelques notes au dos de l’appareil, et aussi après avoir constaté qu’il n’y a pas le moindre redresseur double alternance parmi les composants internes du voltmètre, j’en arrive à la conclusion que le galvanomètre n’est pas du type magnétoélectrique à cadre mobile, en d’autres mots, qu’il ne s’agit pas d’un mécanisme d’Arsonval, mais bien d’un autre type de galvanomètre basé sur un autre principe.
Il devrait s’agir ici d’un galvanomètre du type ferromagnétique soit à avalement, soit à répulsion. Ces types de galvanomètres ont la propriété de mesurer aussi bien du courant alternatif que du courant continu sans avoir recours à un redresseur.
À la place d’un fin fil fragile bobiné sur un cadre mobile présent dans les galvanomètres magnétoélectriques, un galvanomètre ferromagnétique est constitué en premier lieu d’une bobine, un véritable électroaimant en forme de solénoïde qui est bobiné avec du fil d’une section plus importante et plus robuste que celui d’un cadre mobile, ici avec de nombreuses spires dans le cas d’un voltmètre, ou alors de quelques spires d’un fil de forte section dans le cas d’un ampèremètre.
Ce fil d’une section appréciable dans un voltmètre ferromagnétique est donc bien moins fusible que celui d’un cadre mobile d’un galvanomètre magnétoélectrique. Cela explique que le galvanomètre de mon voltmètre vintage n’a pas pu claquer. Ce sont donc les résistances additionnelles du voltmètre qui ont dû servir de fusibles.
Après une observation en détail du mécanisme du galvanomètre, j’ai pu identifier qu’il s’agit ici, dans ce voltmètre, d’un galvanomètre ferromagnétique à répulsion. C’est l’opportunité d’apprendre le fonctionnement de ce type de galvanomètre.
| Cet article étant particulièrement exhaustif, nous n’en publions ici qu’une introduction. L’intégralité du contenu est disponible dans ce document PDF téléchargeable |
Mon aventure radio a commencé en 1976 dans le monde de la CB, guidé par un radioamateur local qui m’a initié au code Q et à l’alphabet OTAN.
En 2021, la rencontre avec celui qui est devenu mon OM a ravivé ma passion. J’ai rejoint le club ON5VL de Liège, suivi les cours ON3 et obtenu ma première licence en mai 2023, ainsi que l’accréditation B-EARS.
En 2024, grâce aux cours HAREC, j’ai décroché ma licence avec l’indicatif ON4HNO. Depuis, avec mon IC-7300 et une antenne End-Fed que j’ai construite moi-même, j’ai réalisé mes premiers DX.
Je participe aux activités et Field Days de la section et j’accompagne les jeunes lors d’ateliers de montage de kits avec l’UBA. Soutenu par mon OM, je continue à progresser dans l’électronique et les radiofréquences.
88 et 73.

