Activation au Bunker d'Hitler

Le 17 septembre à Bruly-de-Pesche au Bunker d'Hitler, une équipe de RadioAmateur a activé le lieu avec l'indicatif ON6NR/P, c'est l'occasion de faire un peu d'histoire

Le bunker d'Hitler à Bruly-de-Pesche

Peu de personnes le savent, mais Adolf Hitler avait installé son quartier général à Bruly-de-Pesche près de la ville de Couvin pendant 22 jours. Cet endroit se situe près d’un petit aérodrome. L’endroit était idéalement situé pour diriger la campagne de France. Aujourd’hui, c’est un but de visite touristique.

Wolfsschlucht ou "le Ravin du Loup", c’est le nom donné par Hitler à cet endroit blotti au fond des bois, en bordure du minuscule village de Brûly-de-Pesche. Hitler n’y a vécu que 3 semaines en juin 1940, mais son séjour fut assez long pour marquer durablement la population locale.

En un mois du 25 mai au 6 juin 1940, 200 hommes de l'organisation Todt ont construit 3 baraquements. Un chalet de style bavarois était réservé à Hitler, un autre surnommé le « Kasino » servit de mess et le troisième d'état-major. Il fût construit aussi 2 bunkers de 7 × 7 m contenant une salle de 2 × 3 m et un troisième commencé mais jamais achevé fut également construit dans les sous-bois.

Le «bunker d'Hitler» fesait 5 mètres de haut et avait nécessité 600 tonnes de béton pour son érection. Les murs avaient 2 mètres d'épaisseur et étaient fabriqués avec de la fibre de bois mélangée au ciment. Des filets de camouflage le rendaient totalement invisible. De plus, ses énormes portes métalliques ne se commandaient que de l'intérieur. Le tout était totalement étanche. Aujourd'hui encore, on peut apercevoir à l'intérieur de ces constructions deux bouches d'aération : une pour recevoir l'air frais et l'autre pour rejeter l'air vicié. On y distingue aussi l'emplacement des canalisations d'eau et de fils téléphoniques. Le numéro d'appel était le 4053. L'abri était directement relié à Berlin et aux différents fronts. C'est là que le Furher réunissait les différents dignitaires du Troisième Reich pour une séance de travail. Lors de ces travaux, les dirigeants nazis, rédigèrent les conditions d'armistice de la France. En même temps ils mirent au point la stratégie pour lancer la deuxième vague, la « dernière », espéraient-ils, contre les troupes de l'Hexagone.


Photo : Capelle

Les bâtiments du village furent investis et transformés aussi. L'école servit de salle des cartes et de logement pour les généraux Keitel et Jodl. Une petite piste d'atterrissage fut aménagée à Regniowez. L'estaminet sur la place publique fut le siège du service de presse d'Otto Dietrich et fut rebaptisé Wolfspalast. Le presbytère accueillit les aides de camp. Une ferme à proximité de la place servit de Kommandantur. À proximité des chalets, une piscine et un oratoire en forme d'Oméga furent également construit.

L'église par exemple devint une salle de cinéma où Hitler regardait et censurait les films de propagande. La partie haute de son clocher fut démontée pour être remplacée par une citerne d'eau. C’est également dans cette église que fut préparé l’acte de capitulation de la France qui sera signé à Compiègne le 22 juin 1940 (Clairière de Rethondes).

La zone fut interdite aux civils et gardée par 26 officiers, 185 sous-officiers et 750 soldats.

Hitler aimait beaucoup se promener dans cet endroit paradisiaque de la forêt Couvinoise. Il discutait avec Himmler et Hermann Göring dans la petite clairière où coulait l'eau miraculeuse à la fontaine. Il lui arrivait de se rendre régulièrement à la piscine de 9 m² construite en retrait de son chalet bavarois et du bunker.

Que s'est-il passé du 6 au 28 juin 1940 pendant la présence d'Hitler à Brûly-de-Pesche ?

Les dates marquantes :

  • Le 7 juin : Les villages de Montdidier, Noyon, Forges les Eaux sont occupés par les troupes allemandes. Rommel force la ligne de défense de l'Andelle et se dirige vers la Seine
  • Le 8 juin : Les Allemands franchissent la Somme et gagne la bataille de la Somme. Bombardements de Berlin
  • Le 9 juin : Les Allemands atteignent la Seine, occupent Dieppe, Rouen et Compiègne. Offensive Von Rundstedt en Champagne
  • Le 10 juin : L'italie déclare la guerre. Les divisions de Panzer franchissent l'Aisne. Le gouvernement français quitte Paris pour s'installer à Tours
  • Le 11 juin : Les Allemands occupent Reims. Paris est déclarée « Ville ouverte »
  • Le 12 juin : Les Allemands franchissent la Marne et occupent Château Thierry et Châlons Sur Marne
  • Le 14 juin : Les Allemands entrent à Paris. La ligne Maginot est enfoncée en Lorraine. Le gouvernement français quitte Tours pour Bordeaux
  • Le 15 juin : Prise de Verdun sur ordre d'Hitler toujours depuis Brûly de Pesche
  • Le 16 juin : Les Allemands prennent Orléans et franchissent la Loire. Démission de Reynaud et Pétain est nommé Président du Conseil
  • Le 17 juin : La France demande l'Armistice
  • Le 18 juin : Appel du 18 juin du Général de gaulle sur les ondes de la BBC vers 20h00 depuis Londres
  • Le 19 juin : Le Général Rommel s'empare de Cherbourg
  • Le 20 juin : Les Allemands prennent Lyon. Depuis Bordeaux où il s'est réfugié, le gouvernement français demande l'armistice à l'Italie
  • Le 22 juin : Hitler quitte Brûly pour faire un aller-retour à la clairière de Rethondes pour la signature de l'armistice. Il rentre à Brûly-de-Pesche vers 20h00

  • Le 23 juin : Hitler visite Paris. Depuis Londres, de Gaulle annonce à la radio la formation d'un comité national français

  • Le 24 juin : Armistice entre la France et l'Italie
  • Le 25 juin : Entrée en vigueur de l'armistice entre la France et l'italie
  • Le 27 juin : Les troupes allemandes atteignent la frontière espagnole

  • Le 28 juin : Hitler quitte définitivement Brûly-de-Pesche vers 7h30  pour Strassbourg. C'est là qu'il fit une entrée solennelle avant de se rendre dans son nouveau GQG à Tannenberg en Forêt Noire

Source photos : « La Mémoire d’Acoz et Lausprelle » Jacques François – 1996

La guerre des ondes durant la Deuxième Guerre Mondiale


photo Church of All Souls and BBC Broadcasting House, Langham Place  © : Ben Brooksbank

Au confluent de deux histoires, celle de la radio et celle de la seconde guerre mondiale, la célèbre aventure des émissions en français de la BBC pendant l’occupation, qui joua un rôle si important dans l’évolution politique ultérieure de la France a fait l’objet d’une recherche historique détaillée dont a  résulté l’ouvrage d’Aurélie Luneau, « Radio Londres 1940-1944 ». Il s’agit d’un travail d’historien, non romancé, destiné à établir avec le plus de précision possible ce qui fut émis par cette radio française, dans quelles conditions, ainsi que l’influence qu’elle eut sur les habitants de la France occupée. A la veille de la seconde guerre mondiale, les Français, qui disposent de 5 millions de postes de TSF déclarés, ont accès à leur Radio Nationale et à une série de postes privés que le déclenchement des hostilités privera de leurs ressources (animateurs mobilisés, recettes publicitaires taries). Ils peuvent également capter en langue française la radio suisse Radio Sottens, ainsi que de nombreux postes allemands se faisant passer pour des stations françaises comme Radio Stuttgart, éléments importants de la propagande du régime nazi. La radio nationale française est peu en phase avec les attentes des auditeurs horaires inadaptés, programmation élitiste, éditoriaux politiques alambiqués. En Angleterre, il y a 9 millions de postes de radio déclarés la BBC est une "radio nationale forte, tournée vers l’information, l’éducation et le divertissement". Pour contrer la propagande des régimes allemands et italiens, elle propose diverses émissions en langue étrangère. En 1939, elle diffuse des programmes en neuf langues. Dès 1938, un service français composé de trois personnes est créé et diffuse un bulletin d’information quotidien de 19h à 19h10.

Le général De Gaulle («appel du 18 juin» colorisée Müller A ©) prônait l’utilisation de la radio comme outil de guerre dès les années ’30 (notamment dans son livre « vers l’armée de métier »). A la veille de l’armistice, il se trouve à Londres en vue de poursuivre la lutte contre les Allemands. Le 17 juin, le maréchal Pétain annonce l’armistice au peuple français à la Radio Nationale française ; le lendemain, de Gaulle obtient du gouvernement anglais l’autorisation de pouvoir lancer, sur les ondes de la BBC son fameux appel. Il dénonce la trahison de la France par ses chefs et appelle à la poursuite des combats depuis d’autres territoires. Cette intervention ainsi que les suivantes le feront connaître des Français dont la plupart n’avaient jamais entendu parler de ce général auparavant; ils ne connaissent donc pas son visage, ce qui incitera les radios sous contrôle allemand à le surnommer le "général Micro" par dérision.

Après le drame de la destruction de la flotte française par les Anglais à Mers el-Kébir le 3 juillet 1940 (pour éviter qu’elle ne tombe aux mains des Allemands), Churchill offre à De Gaulle de pouvoir s’exprimer tous les jours cinq minutes à la radio. Plusieurs émissions quotidiennes sont émises à destination de la France: «Les Français parlent aux Français», «Honneur et Patrie» animée notamment par Maurice Schumann. Toutes ces émissions sont soumises à la censure anglaise pour des raisons de sécurité militaire, ainsi qu’au contrôle politique des services de la BBC pour éviter que des programmes en différentes langues ne donnent des informations divergentes, ce qui nuirait évidemment à la crédibilité de la chaine.

Contrairement à ce que leurs auditeurs imaginent, elles ne sont pas sous le contrôle du général De Gaulle. Le succès des émissions françaises de Londres va crescendo et le temps d’émission est adapté en conséquence:  de 30 minutes par jour en 1939, il passer à 2h30 en 1940, 4h en 1941, 6h à la fin de l’année 1944.

La célèbre campagne des ‘V’ fut une idée lancée en janvier 1941 par la section belge de la BBC, dont le speaker avait demandé aux Belges de tracer des « V » un peu partout en Belgique. Un très bel article à ce sujet se trouve ici : Freebelgians.be

Pour lutter contre l’influence de la radio londonienne, le régime pétainiste et l’occupant développèrent différents moyens : brouillage des fréquences utilisées par la BBC, promulgation de lois interdisant l’écoute de cette radio, confiscation des postes de TSF. Sur les conseils de Radio Londres, les Français se débarrassèrent de beaucoup de vieux postes hors d’usage à cette occasion. Après plusieurs années de guerre, il devient difficile de se procurer un poste de TSF.

Au marché noir, en 1943, des postes d’occasions se négocient à 5.300 F ou 7.000 F pièce, et les lampes de rechange valent de 7 à 800 F  (de 1,13 à  129 euros), alors que le salaire horaire moyen d’un ouvrier spécialisé est de 10 F  (environ 1,61 €)

Dans la deuxième partie de la guerre, la radio est utilisée pour donner des conseils de sauvegarde aux Français pendant les bombardements alliés : s’éloigner des zones à risque (côtes, usines, nœuds ferroviaires, villes). Son rôle est également de préparer les actions de soutien aux Alliés. Les Français les plus actifs doivent constituer des groupes, s’armer et rejoindre le maquis. Les autres devront aider les Alliés et les groupes organisés, mais éviter  «tout soulèvement civil qui pourrait s’avérer dangereux» . Les célèbres phrases codées adressées aux réseaux de Résistants, déguisées notamment en messages personnels, se multiplient à l’approche du débarquement du 6 juin 1944. Le célèbre « les sanglots longs des violons... » tiré d’un poème de Verlaine est destiné au réseau ‘Ventriloquist’ qui doit déclencher le sabotage des voies ferrées situées en arrière des côtes de Bretagne et de Normandie

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