samedi, février 22

RADIO ANTWERPEN

Dans notre série « découverte des radios broadcasts » voici l'aventure du Uilenspiegel.

En 1922 un ingĂ©nieur anversois nommĂ© Georges De Caluwe passionnĂ© de radio expĂ©rimentait des Ă©missions en ondes courtes, et quatre ans plus tard, il parvenait Ă  obtenir une licence ON 4 ED pour dĂ©buter en tant que pionnier une station de radio en ondes moyennes qu’il dĂ©cida d’appeler Radio Antwerpen.

Elle Ă©mettait initialement depuis Anvers avec deux tourne-disques. TrĂšs rapidement, les auditeurs furent lĂ©gion car son crĂ©ateur connaissait particuliĂšrement bien les goĂ»ts musicaux des Flamands, et ses bulletins d’information locale sĂ©duisaient Ă©galement les auditeurs.

Les Ă©missions avaient lieu depuis l’Église protestante situĂ©e dans la Bexxstraat. LĂ , il dĂ©cida d’y installer une antenne sur un clocher, de mĂȘme qu’un studio tout en bas des cordes Ă  cloches. La radio fut officiellement lancĂ©e sous le nom de radio Antwerpen.

En peu de temps, cette station devint trĂšs populaire et les auditeurs la surnommĂšrent radio kerkske soit radio petite Ă©glise car l’office dominical y Ă©tait retransmis. La radio diffusait de la publicitĂ©, et celle-ci Ă©tait lue en direct depuis un texte manuscrit. Mais les Ă©missions devenaient de plus en plus onĂ©reuses et De Caluwe voulait abandonner, Il reçut alors un soutien populaire de plus de vingt mille auditeurs qui dĂ©cidĂšrent de financer la station.

Par la suite, soit en 1935, il ne trouvait plus le local adĂ©quat et les Ă©missions eurent lieu depuis Edegem. Malheureusement, la guerre avec l’Allemagne dĂ©buta et les troupes ennemies n’étaient plus trĂšs loin du lieu d’émission. Georges de Caluwe pris alors la dĂ©cision de dĂ©truire sa radio afin qu’elle ne tombe aux mains des nazis qui auraient pu l’utiliser pour rĂ©pandre leur propagande haineuse vis-Ă -vis des juifs.

DĂšs la fin de la guerre, radio Antwerpen fut relancĂ©e mais ce fut pour une courte durĂ©e, car le gouvernement belge qui rentrait Ă  peine d’exil dĂ©cida de placer toutes les radios sous le contrĂŽle de l’état. De Caluwe poursuivit en mode pirate ses Ă©missions mais peu de temps aprĂšs, la station fut saisie et il dĂ» rendre la licence qui lui avait Ă©tĂ© auparavant octroyĂ©e.

En 1962 l’ingĂ©nieur s’inspira du succĂšs rencontrĂ© par les stations de radio offshore en mer du Danemark et de SuĂšde comme radio Nord, radio Syd, radio Merkur ainsi que par la suite en mer du nord cette fois avec radio Veronica la doyenne des radios pirates nĂ©erlandaises.

Georges De CaluwĂ© dĂ©cida cette annĂ©e-lĂ , et ce Ă  l'Ăąge de 73 ans de redonner du service Ă  son cher Ă©metteur d'antan, mais cette fois depuis un navire de radiodiffusion. Il acheta un navire du nom ‘’le crocodile’’ en provenance de France qui fut rebaptisĂ© ‘’Uilenspiegel‘‘, du nom du lĂ©gendaire hĂ©ros flamand.

Le 15 octobre 1962 le mĂȘme Uilenspiegel fut ancrĂ© au large de Zeebruges et commença Ă  Ă©mettre en nĂ©erlandais en ondes moyennes sur 1493 kHz soit 201 mĂštres mais aussi en ondes courtes sur 7.600 kHz avec une antenne long fil en forme de T maintenue par deux piliers en bois de 25m de haut, Il s’agissait techniquement parlant, d'un radiateur vertical Ă©quipĂ© d'une capacitĂ© supĂ©rieure pour compenser le manque de longueur verticale. Ce type d'antenne s’avĂ©rait trĂšs efficace et rĂ©sistant aux tempĂȘtes dans la pratique radio offshore (y compris pour Radio Veronica). La puissance transmise Ă©tait de 10 kilowatts. De Caluwe se rendait alors rĂ©guliĂšrement sur son navire dont il Ă©tait trĂšs enthousiaste mĂȘme parfois en pleine tempĂȘte.

Quelques jours plus tard, aprĂšs quelques tests d’émission, le succĂšs de radio Antwerpen fut fulgurant grĂące au format musical grand public.
Les émissions étaient enregistrées dans le studio de la Nerviërstraat à Anvers.
La radio belge flamande BRT dĂ©cida en consĂ©quence de lutter contre ce succĂšs remportĂ© par radio Antwerpen et dĂ©cida d’étendre ses heures de diffusion jusqu’à minuit.

DĂ©but dĂ©cembre 1962, le Parlement belge pris la dĂ©cision de voter en faveur d'une loi anti-piraterie. Le navire devait ĂȘtre arraisonnĂ© le 13 dĂ©cembre, mais l'opĂ©ration fut ajournĂ©e car les conditions climatiques n’étaient pas du tout rĂ©unies, mais le mĂȘme jour, Georges De CaluwĂ© dĂ©cĂ©dait peu aprĂšs une chirurgie Ă  l’hĂŽpital d’Anvers qui l’avait fortement affaibli. Il fut commĂ©morĂ© par une Ă©mission rĂ©alisĂ©e par ses Djs Ă  bord.

Un peu plus tard, soit le 16 dĂ©cembre, l’Uilenspiegel fut endommagĂ© par de puissantes bourrasques de vent dans une mer qui faisait rage. La chaĂźne de l’ancre se brisa et heurta le navire particuliĂšrement lourd qui commença Ă  dĂ©river au large de Zeebruges. L’eau s’infiltra dans la coque et provoqua une panne des gĂ©nĂ©rateurs. Un remorqueur tenta bien de leur venir en aide mais au regard des difficultĂ©s rencontrĂ©es, la dĂ©cision fut prise d’abandonner car le danger Ă©tait trop important L'Ă©quipage en pleine panique eut le temps de prendre la fuite (Ă  l’exception de quatre animateurs) et fut secouru par les garde-cĂŽtes ostendais, mais le navire s’échoua le jour mĂȘme sur la cĂŽte nĂ©erlandaise de Catzand de la commune de Sluis Ă  une centaine de mĂštres de l’embouchure du Zwin.

Bien Ă©videmment, plusieurs milliers de personnes s’étaient donnĂ© rendez-vous pour voir le navire Ă©chouĂ©. Des chasseurs de souvenirs Ă©taient montĂ©s Ă  bord et ont volĂ© pas mal de piĂšces souvenirs de la radio mais l'Ă©metteur endommagĂ© fut sans tarder saisi par la police nationale. Un bon nombre de policiers sont restĂ©s en faction devant la station radio offshore bloquĂ©e pendant plusieurs semaines sur le sable. La commune n’était pas pressĂ©e d’évacuer le navire qui Ă©tait devenu une vĂ©ritable attraction touristique, et la sociĂ©tĂ© d’assurance basĂ©e au Lichtenstein prĂ©fĂ©rait garder le silence au regard des frais importants de sauvetage et d’enlĂšvement de l’épave. Cette derniĂšre continuait Ă  s'enfoncer davantage dans les fonds marins et fut alors dynamitĂ©e en 1971 car elle reprĂ©sentait un danger pour les baigneurs.

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Une Ă©mission spĂ©ciale en soirĂ©e fut dĂ©diĂ©e Ă  feu monsieur De Caluwe par la BRT. 
Mais deux ans plus tard soit en 1973, Ă  l’initiative d’un riche patron flamand propriĂ©taire d’une firme de disques (dont le nom est Adriaan Van Landschoot) apparaissait une nouvelle radio depuis le bateau MV Jeannine ancrĂ© dans les eaux internationales de la mer du nord et prenait le nom de Radio Atlantis sur 385m. Mais son histoire vous sera contĂ©e ultĂ©rieurement ainsi que celle de radio Mi Amigo dĂ©tenue par un autre Belge nommĂ© Sylvain Tack, propriĂ©taire de l’entreprise de gaufres Suzy.

GUY HENKINET (ON6GH)

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