Comprendre les performances des transceivers radioamateurs

Comprendre les performances des transceivers radioamateurs

Depuis que quelques grands constructeurs de matériel de télécommunication à l’usage des radioamateurs se sont implantés sur les marchés mondiaux des appareils électroniques en radiofréquences, les radioamateurs disposent d’un large éventail de transceivers pour équiper leur station dans leur shack.

Introduction :

Quel transceiver choisir en fonction des QSO que l’on vise ? Comment choisir un transceiver en fonction de son QTH et de ses aériens ? Comment s’y retrouver dans toutes ces mesures aux unités diverses ? Comment faire parler ces mesures dans le concret ?

Rétrospective :

Il est bien loin le temps où les radioamateurs construisaient de toutes pièces leur récepteur et leur émetteur ondes courtes à l’époque héroïque des tubes radio puis plus tard avec les premiers transistors disponibles. Toutefois, les OM actifs en SHF et microondes doivent encore être capables aujourd’hui en 2018 de monter leur station eux-mêmes, parfois à l’aide de modules dédiés ou de matériel de récupération qui doit être adapté sur les bandes de fréquences radioamateurs. En effet, peu de matériel (pratiquement aucun) n’existe « tout fait » clef sur porte dans ces gammes de fréquences.

Il y a eu une période de transition vers les années 70 et 80 où les OM pouvaient disposer de récepteurs et d’émetteurs en kit. Nombreux sont les OM parmi nos aînés qui ont construit leur première station à partir du matériel Heathkit, un constructeur très célèbre en matière de kits performants, très bien documentés, avec des composants triés par sous-ensembles électroniques, et montages qui ont toujours fonctionné du premier coup. Rien n’est donc perdu dans la maîtrise technique et électronique chez les radioamateurs car il y a devant nous un nouveau défi : celui de comprendre intimement les performances d’un transceiver.

Tant vaut l’antenne, tant vaut l’émetteur ! Oui, c’est vrai et chaque OM devrait commencer par le choix de ses aériens, mais aussi par choix du QTH, pour bien faire en altitude, dans des conditions de dégagement des aériens et dans une zone où il y a le moins possible de QRM. Tout le monde n’est pas logé à la même enseigne au point de vue du QTH, des aériens, du QRM, etc., ainsi, dans la situation réelle d’un OM, il y a moyen de choisir un transceiver adapté en fonction du contexte dans lequel cet OM se trouve.

Comprendre les mesures, c’est d’abord comprendre dans les grandes lignes les fonctionnalités des différents appareils de mesure qui sont utilisés pour relever les performances d’un transceiver. Comprendre les mesures, c’est aussi comprendre le fonctionnement d’un récepteur et celui d’un émetteur. Il y a donc lieu de bien avoir à l’esprit le schéma-bloc d’un récepteur superhétérodyne ou SDR (Software Defined Radio) et celui d’un émetteur AM, SSB, FM, et même à modulation numérique.

Les données du constructeur et les mesures relevées par le laboratoire de l’ ARRL

Lorsqu’on veut s’attaquer au domaine des mesures, il y a lieu de définir un protocole de mesure. Celui-ci est indispensable pour définir les conditions dans lesquelles les mesures ont été effectuées de façon à ce que celles-ci soient reproductibles quels que soient les appareils de mesure et quels que soient les transceivers qui sont testés.

Les données des mesures fournies par les constructeurs ont certes été relevées dans les règles de l’art, ceci n’est pas à mettre en doute, mais le protocole de mesure ou conditions de mesures sont rarement explicitées dans les caractéristiques fournies par un constructeur. En outre, les données de certaines caractéristiques parfois particulièrement intéressantes pour nous, dans notre contexte de radioamateurs, ne sont pas toujours mentionnées par le constructeur. Ces données peuvent ainsi apparaître comme lacunaires et il devient ardu de comparer des caractéristiques de mesures qui n’ont pas été effectuées sous le même protocole ou bien de comparer des mesures de types différents ; en d’autre mots, il devient difficile de dresser un synoptique des caractéristiques entre des transceivers de constructeurs différents.

Le laboratoire de l’ARRL a établi un protocole de mesure particulièrement complet et strict pour relever les performances d’un transceiver, en particulier dans des conditions qui sont similaires à celles qui sont présentes dans la réalité de l’utilisation des stations d’émission-réception par les radioamateurs. Lorsqu’un type de transceiver a été testé dans les laboratoires de l’ARRL, les résultats sont non seulement publiés dans la revue QST mais sont aussi accompagnés d’une analyse complète de l’appareil qui est agrémentée de nombreux commentaires utiles pour éclairer au mieux tous les radioamateurs dans le choix d’un transceiver ou pour que ces OM puissent établir un comparatif le plus objectif possible en vue d’un investissement potentiel pour leur station radio.

Le « ARRL lab » :

Derrière cette appellation, il y a des OM particulièrement dévoués qui se rendent utiles pour tous les radioamateurs du monde entier. Leur travail est apprécié par les différents constructeurs de matériel à l’usage des radioamateurs et il arrive parfois qu’un dialogue s’établisse entre l’ARRL Lab et un constructeur qui reçoit ainsi quelques remarques constructives si un défaut majeur de performance est constaté sur un de leurs produits.

La renommée de l’ARRL Lab a atteint ces dernières années une certaine notoriété à telle enseigne que certains constructeurs d’appareils de mesure ont mis à disposition du laboratoire de l’ARRL [probablement sous la forme de sponsoring], des instruments de mesure ultra modernes et des logiciels dédiés aux mesures. C’est ainsi qu’en 2015, la société Keysight (anciennement Agilent et à l’origine Hewlett Packard) a mis à disposition des nouveaux générateurs radiofréquences avec des capacités de modulations numériques et a délivré aussi un logiciel de gestion et de communication avec les appareils de mesure permettant ainsi de réaliser un banc de mesure virtuel géré à partir d’un ordinateur. On peut ainsi imaginer le grand pas en avant technologique de l’ARRL Lab pour se tenir à la pointe du progrès des télé-communications des radioamateurs. Il y aura de nouveaux protocoles en perspective.

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Fig. 1 : Bob Allison, WB1GCM, ingénieur responsable des tests à l’ARRL Lab occupé à tester un nouveau modèle de transceiver. Source : ARRL.org, ARRL Lab.

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Fig. 2 : Bob Allison, WB1GCM, ingénieur responsable des tests à l’ARRL Lab devant le banc des appareils de mesures radiofréquences du laboratoire de l’ARRL. Source : ARRL.org, ARRL Lab.

Les appareils de mesure nécessaires aux tests d’un transceiver :

Il y a lieu de distinguer les appareils de mesures qui sont nécessaires pour tester les performances de la partie réceptrice d’un transceiver et ceux destinés aux tests de la partie émettrice de celui-ci. Tous les manuels de service d’appareils électroniques comportent en général un chapitre consacré aux équipements recommandés pour les tests et mesures des performances d’un dispositif sous test et pour les réglages qui doivent être effectués lors d’un calibrage ou lors de la maintenance de ce dispositif sous test, c’est-à-dire ici un transceiver radioamateur. Les équipements de mesure qui sont recommandés peuvent souvent être substitués par d’autres appareils à condition qu’ils soient pourvus des capacités de mesure équivalentes ou supérieures. Il arrive parfois que l’ARRL Lab doive créer de toute pièce certains dispositifs (Setup) pour des mesures particulières comme par exemple un générateur substituant un manipulateur d’une clef morse avec une cadence de 60 mots par minutes, ce qui n’existe évidemment pas dans le commerce. Ces dispositifs sont parfois très simples : dans le cas d’un générateur de code morse avec des « Did » à 60 mots par minute, il suffit d’un générateur de fonction carrée réglé à une fréquence de 25 Hz et avec un circuit externe « Open Collector » pour substituer le contact de la clef morse.

Voici donc les instruments de mesure nécessaires à un laboratoire de test. Ceux-ci sont listés succinctement.

  • Alimentation robuste 13,8 V (25 A)
  • Multimètre utilisé en voltmètre
  • Multimètre utilisé en ampèremètre, éventuellement avec un shunt externe
  • 3 Générateurs de signaux radiofréquences
  • 2 Amplificateurs HF à large bande et à faible bruit
  • 2 coupleurs hybrides 3 dB
  • Atténuateur par pas de 10 dB
  • Atténuateur par pas de 1 dB
  • Analyseur audio, distorsiomètre, SINAD-mètre
  • Analyseur de signaux (analyseur de spectre BF)
  • Amplificateur audio à haute impédance et haut-parleur pour le monitorage BF
  • Oscillateur HF à quartz et à faible bruit de phase
  • Oscilloscope double trace (500 MHz)
  • Analyseur de spectre radiofréquence ;
  • Générateur de bruit large bande HF
  • Générateur audio deux tons
  • Wattmètre / SWR-mètre avec coupleur directionnel double
  • Atténuateur HF de puissance et charge fictive étalon
  • Générateur simulant une clef morse avec « Did » à 60 mots par minute (25 Hz)
  • Dispositif radiofréquence de mesure du bruit de phase (Phase Noise Test Set)
  • Oscillateur variable radiofréquence à faible bruit de phase

Rares sont les OM qui disposent d’un tel parc d’équipements de mesure ! Rassembler les éléments d’un tel laboratoire n’est accessible qu’aux professionnels ou à des grandes associations nationales de radioamateurs.

Les tests des performances en trois parties :

  • L’alimentation
  • Les performances de la partie réceptrice
  • Les performances de la partie émettrice.

Les explications qui vont suivre dans cet article sont en partie inspirées du livre « Amateur Radio Transceiver Performance Testing » écrit par l’ingénieur responsable des tests à l’ARRL Lab, Bob Allison, WB1GCM. Cet article suit à peu près le même canevas que celui de ce livre. Les exemples des mesures chiffrées des performances d’un transceiver typique seront repris de ce même livre. Tout ceci est mentionné par honnêteté, par Ham Spirit et par respect du travail de l’auteur Bob Allison, WB1GCM de l’ARRL Lab.

N.B. : cet article n’est pas du tout une traduction du livre de Bob Allison WB1CMG.

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Fig. 3 : Photo de couverture du livre « Amateur Radio Transceiver Performance Testing » rédigé par Bob Allison, WB1GCM, First Edition, First Printing, 2013, publié par l’ARRL, 225 Main Street, Newington, Connecticut CT 06111-1494 USA, ISBN 978-1-62595-008-6. Scan de couverture : ON4IJ.

Je vous recommande de lire le livre de Bob Allison WB1GCM (en anglais) car il est riche d’enseignements et est particulièrement bien rédigé.

Les OM qui sont passionnés de mesures sur les équipements de radio-communications peuvent aussi consulter un document très intéressant publié par l’ETSI (European Telecommunications Standards Institute).

Vous y retrouverez des protocoles de mesures largement détaillés et qui sont parfois relativement proches de ceux qui sont suivis par l’ARRL Lab.

ETS 300 113, Second Edition, June 1996, un document de pas moins de 100 pages :

« Radio Equipment and Systems (RES), Land mobile service, Technical characteristics and test conditions for radio equipment intended for transmission of data (and speech) and having an antenna connector »

Il existe une version plus récente :

ETSI EN 300 113 V2.2.0, Sept 2016 sous la forme de draft :

« Land Mobile Service ; Radio equipment intended for the transmission of data (and/or speech) using constant or non-constant envelope modulation and having an antenna connector ; Harmonized Standard covering the essential requirements of article 3.2 of the Directive 2014/53/EU »

Ces deux documents sont disponibles sous format « pdf » sur le site Internet de l’ETSI :

Etsi.org

Il y a lieu de noter que ces documents ont été basés sur des recommandations de la CEPT (Conférence Européenne des Administrations des Postes et des Télécommunications) ; cette dernière coordonne et défend les propositions européennes communes au sein de l’UIT (Union Internationale des Télé-communications).

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Illustration de la page de couverture du document ETSI EN 300 113 V2.2.0. Source : ETSI.org.

 
1. Tests des performances de l’alimentation :
L’alimentation d’un transceiver peut être soit interne à l’appareil et dans ce cas-ci elle est directement raccordée au secteur de distribution d’énergie électrique 230 V 50 Hz, soit l’alimentation est externe et le transceiver est en général raccordé sur une alimentation 13,8 V. Dans le cas d’une alimentation externe, il y a lieu de prévoir du matériel suffisamment robuste afin de pouvoir délivrer au transceiver une tension fixe non seulement sous un courant d’appel du transceiver en réception (considéré comme courant de repos) mais aussi sous un courant fort e t éminemment variable lors d’émissions en CW ou SSB. L’alimentation doit être prévue en outre pour un service pratiquement ininterrompu spécialement pour les émissions en FM ou en certains modes de modulations numériques où le courant est en permanence à sa valeur maximale pendant toute la durée d’émission.
Le modèle d’alimentation sera de préférence du type à régulation de tension. Quatre caractéristiques doivent retenir notre attention :
  • la précision de la tension régulée en fonction de la charge (load regulation) ;
  • la rapidité de réaction de la régulation pour un saut de variation de courant ;
  • le taux d’ondulation résiduelle après filtrage et après régulation ;
  • le niveau de QRM émis par cette alimentation et sa conformité CEM(compatibilité électromagnétique).
Pour en savoir un peu plus sur les qualités d’une alimentation, vous pouvez aller relire l’article « Une alimentation au poids devenue de qualité OM » sur le site internet ON5VL.org.
Deux modèles d’alimentations régulées existent :

FIN DE L’EXTRAIT

Ceci était l’introduction de mon article « Comprendre les performances des transceivers radioamateurs testés au laboratoire de l’ARRL (American Radio Relay League) »

Comme il est exceptionnellement long, retrouver la suite de cet article passionnant en version Pdf :

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 par Jean-François Flamée | ON4IJ

Auteur / autrice

  • Bonjour. Je suis né en 1960 et je suis père de deux enfants. J'ai passé ma licence HAREC en 1984 (ex ON1KYM) et j'ai repris l'indicatif de mon papa (silent key 2012) ON4IJ en 2016. Je suis passionné par les instruments de mesure radiofréquence pour les utiliser dans mon activité de radioamateur. Ayant constitué un labo de mesure HF, je peux ainsi expérimenter et parfaire mes connaissances en électronique HF. Je m'emploie à contribuer au site Internet ON5VL.org avec la publication de plusieurs articles techniques pour partager quelques expériences avec tous les radioamateurs. Ces articles sont largement illustrés et sont rédigés dans un esprit didactique sans me prendre au sérieux : je m'efforce de rester pratique et ludique, mais parfois vous y trouverez de la technique pure et dure et de temps en temps un peu de mathématique, juste ce qu'il faut, sans plus, c'est-à-dire le stricte nécessaire et suffisant pour comprendre. Ces articles sont enfin rédigés dans le Ham Spirit avec l'intention de partage de connaissances et d'expériences radioamateur. 73 à tous. ON4IJ. +