
A Verviers, les adeptes du ‘Tripotage sans fil’- comme on disait alors – se groupèrent dès 1922 sous l’égide de Laurent HENROTAY.
Remontons plus de cent ans en arrière…
Laurent Joseph Henrotay vit le jour le 8/11/1892 à Chaineux. Dès son plus jeune âge, il fut attiré par le mystère de l’électricité et de ses applications.
En 1912, il entre à la Société d’Electricité de L’Est de la Belgique. Avec l’aide d’un ancien condisciple, il étudie avec sérieux et réalise certaines expériences sur les courants continus et alternatifs. Au début de 1913, il se rend à Paris. Il s’y met en rapport avec la Maison Péricaud, spécialisée en appareils de physique et d’électricité. Il revient à Verviers peu avant août 1914.
Laissons le évoquer quelques souvenirs¹ :
« En rentrant en Belgique, après mon séjour à Paris, la T.S.F. m’avait ensorcelé et je commençai mes premiers essais de réception avec un récepteur à galène et un autre électrolytique. Survint la guerre. Après celle-ci mes parents hébergèrent des soldats français du Génie, qui précisément utilisaient dans leurs services les fameux amplis à trois lampes TM. Ces amplis font mon émerveillement… et après de nouveaux voyages à Paris, je décide, aidé par mes parents d’ouvrir en Crapaurue le premier magasin de radio. Je vends des galènes, des accessoires, des écouteurs …
En 1920, je rapporte de Paris un ampli haute fréquence à 4 lampes qui me permet de pousser plus avant et de transformer mon premier poste en un deux lampes à couplage par capacités.
La Tour Eiffel est alors le seul émetteur puissant de radiotéléphonie à heures régulières. Le poste récepteur construit par mes soins est le premier à Verviers à écouter la Tour Eiffel sur deux lampes …
Ainsi, à chaque voyage, je rapportais des nouveautés. J’avais aussi l’occasion d’entrer en relation avec des personnalités, des amateurs et notamment avec Joseph Roussel en sa petite pharmacie de Juvisy. Il était secrétaire général de la Société Française d’Etudes de T.S.F. ; il devait devenir le premier Président d’Honneur du Radio-club² ».
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¹ « Le Radio-Club Belge de l’Est a 35 ans », ‘GDV PRESS’, janvier 1975 (pp. 1-2) et février 1975 (pp. 1-3).
² Joseph Roussel : « Ce que j’ai vu et entendu en Belgique », La TSF moderne, Juillet 1926, pp. 400-402.

« En mon magasin de Crapaurue, les amateurs se présentaient de plus en plus nombreux. Ainsi fus-je amené à la constitution d’un club d’amateurs. La séance de constitution du Radio Club de l’Est se tint au second étage du café de l’Emulation, place du Martyr à Verviers le 26 mars 1922.
La publicité faite autour de notre petit noyau d’amateurs nous incita bientôt à chercher un local qui ne fut pas un café et où nous pourrions éventuellement installer du matériel. Nous ne cherchâmes pas longtemps et trouvâmes ce local au 2ème étage de l’Université Populaire, 50, rue Tranchée où Madame Peltzer de Clermont voulut bien nous accueillir. Nous y rencontrâmes Monsieur Lambion, alors directeur de l’école de mécanique, qui se dévoua et nous aida dans nos premiers pas.
La séance d’inauguration du Radio-Club eut lieu le 8 août 1922. En notre nouveau local, nous avions installé un appareil récepteur qui, à l’émission de midi, fut remarquable de puissance et de pureté. Hélas, celle du soir, à 5 heures, devant un public qui avait répondu nombreux à notre appel, fut défavorisée par de nombreux parasites. Par la suite, nous fûmes plus heureux.
Une visite collective au Centre de l’Observatoire Royal d’Uccle nous valut plusieurs dizaines de nouveaux membres.
Le Radio-Club de l’Est était lancé. Les nouveaux adeptes qui rivalisaient d’initiatives, s’intéressaient de plus en plus à la radio et commencèrent vers fin novembre 1922 à faire de l’émission ».
Tels sont, brièvement résumés par son premier Président, la naissance et les premiers mois de la vie du Radio-Club Belge de l’Est.
La presse locale de Verviers (les journaux ‘Le Jour’ et ‘Le Courrier du Soir’) fit un large écho aux expérimentations de TSF menées par Laurent Henrotay.
Dès le début de l’année 1922, Le Courrier du Soir faisait l’éloge des ‘Merveilles de la téléphonie sans fil’ et titrait : « Nous entendons à Verviers un concert donné à la Tour Eiffel ».
« M. Henrotay, électricien, rue Crapaurue à Verviers a, comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire, installé un appareil récepteur de télégraphie et de téléphonie sans fil qui permet d’assister notamment aux auditions données par la Tour Eiffel. (…) M. Henrotay admet le public chez lui pour assister à ces intéressantes auditions. » (Courrier du Soir, 19/1/1922)
‘Le Jour’ annonça officiellement la création du R.C.B.E. dans un « Avis aux amateurs de T.S.F. » (Chose étrange : la création du club fut annoncée 3 mois après sa constitution !)
« Nous avons le plaisir d’annoncer aux amateurs de cette grande science moderne qu’un Club s’est fondé à Verviers sous le nom de ‘Radio-Club Belge de l’Est’ (R.C.B.E.). Cette société a pour but l’étude de la radiotéléphonie et surtout de sauvegarder les intérêts des amateurs. Pour tous renseignements s’adresser au président, L. Henrotay, Crapaurue 56, ou au secrétaire R. Niederprun, rue Xhavée, 13, Verviers ». (Le Jour, 17/6/1922)
Ce nouveau groupement de ‘sans-filistes’ remporta d’emblée un franc succès.
« MM. Henrotay et Niederprun nous ont appris qu’une cinquantaine d’adhésions leur sont déjà parvenues. C’est donc que les Verviétois veulent, en cette science nouvelle, se tenir encore ‘à la page’ ». (Le Jour, 23/6/1922)
La séance inaugurale eut lieu le 8 août 1922, au local du R.C.B.E., au 2ème étage de la « Mutuelle », rue Tranchée. Une trentaine de personnes composaient l’assistance. L’audition préparée par le comité du club fut un échec en raison de fortes perturbations atmosphériques.
« Séance blanche, donc, pourrait-on dire. Sauf pourtant pour les non initiés, les multiples détails techniques exposés, entre les « bruissements » par les aimables promoteurs du nouveau groupement, chez qui des mécomptes comme celui d’hier n’amoindrissent nullement la foi en l’avenir de la science qu’ils affectionnent et qui est encore, en somme à ses vagissements ‘secondaires’ ». (Le Jour, 9 /8/1922)
L’événement phare du R.C.B.E. en cette première année d’existence fut sans conteste la visite des installations de l’Observatoire Royal d’Uccle ainsi que son poste d’émissions radiotélégraphiques. Annoncée dans la presse dès octobre, cette visite mémorable se déroula le dimanche 5 novembre 1922.
Voici l’horaire de cette journée scientifique, « quelques cartes sont encore disponibles pour la visite ». (Courrier du Soir, 18/10/1922)

En ce mois de novembre 1922, plusieurs membres du R.C.B.E. supputèrent rapidement que l’émission ne devait pas être plus difficile à expérimenter que la réception, et ce malgré l’interdiction officielle.¹
Nil volentibus arduum est. (Rien n’est impossible à ceux qui veulent !)
Laurent Henrotay déclarait dans ses souvenirs : « L’émission n’est pas autorisée, mais foin des règlements, avec des puissances de quelques watts, c’est si agréable de rayonner, de remplir l’espace environnant de signaux d’appels ²».
Rappelons que les ondes ‘courtes’ n’offraient aucune utilité pratique, elles étaient dédaignées par les professionnels et livrées, de ce fait, aux amateurs.
« Avec André Courtois, Jean Lecloux, René Pirotte, ensuite René Toussaint de Spa, nous échangions chaque soir nos impressions en des séances expérimentales qui duraient très tard dans la nuit. Ces émissions devaient devenir justement célèbres ³».
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¹ A la demande d’un Sénateur relative à l’autorisation d’établir et de faire fonctionner des postes émetteurs de T.S.F. , le Ministre des Chemins de fer, M. Neujean a répondu « qu’il importe d’attendre les décisions qui pourront être prises en cette matière par la prochaine Conférence Internationale de T.S.F. » (Courrier du Soir, 17/11/1922)
L’administration des télégraphes et téléphones rappellera (une dernière fois !) en 1924 que « toute émission de radiations électriques quelconques est formellement interdite ». (Le Jour, 26/5/1924) Ces deux documents sont reproduits en annexe.
² « Le Radio-Club Belge de l’Est a 35 ans », op. cit.
³ « Le Radio-Club Belge de l’Est a 35 ans », op. cit.
La presse locale publie en ce mois de décembre 1922 un communiqué anodin mais absolument étonnant de M. L. Henrotay.
Sous le titre assez vague de « Radiotéléphonie et Radiotélégraphie », il aborde le sujet des essais transatlantiques d’amateurs et informe ses lecteurs des résultats, une première à ma connaissance en Belgique.

1923. André Courtois (4YZ), Laurent Henrotay (4QS) et René Pirotte (4RS) décident de procéder à des essais d’émission sur 200 mètres. René Toussaint (4US) de Spa se joint à eux. Les communications s’établissent aisément entre ces quatre amateurs, au moyen de simples lampes de réception dite ‘TM’.
Ces premiers pas en émission sont confirmés dans les « Notes Souvenirs de ON4RV », rédigées dans les années soixante du siècle passé ¹.
« Pour l’année 1923, écoute des premiers essais officiels en Belgique de radiotéléphonie au parc de Laeken, ainsi que des QSOs d’amateurs sur 200 mètres, puis sur 160 mètres. Début sur le plan local des B4QS, B4RS, B4US, B4YZ d’une part au R.C.B.E. et, d’autre part des B4CL, B4BL du C.V.E.R. sous l’impulsion du Père Verreux, professeur de physique ».
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¹ « Notes Souvenirs de ON4RV » (René GOKA), dans ‘Le Gang Verviétois’, N°8, 1965.
L’activité débordante de ces quatre amateurs leur permet de réaliser de multiples liaisons bilatérales : France, Grande-Bretagne, Danemark, Suède et Finlande. Des portées de plus de 2000 km sont atteintes.
Leurs exploits sont publiés dans la presse étrangère spécialisée ¹.




Encouragés par des succès dépassant leurs espérances les plus optimistes, ils ne tardèrent pas à envisager la grande aventure, c’est-à-dire traverser l’Atlantique, la ‘Grande Mare aux harengs’ et, autant que faire se peut, contacter des stations américaines.
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¹ « The Wireless World and Radio Review. The Official Organ of the Wireless Society of London. A magazine devoted to Wireless Telegraphy and Telephony. » (London)
Cette revue anglaise publie en décembre 1924¹ une photo de la station belge
B 4RS, Mr. René Pirotte. « A well-known Belgian amateur transmitting station, is extremely active, as may be judged from the ‘QSL’ cards. His aerial consists of a twelve-wire cage, 160 feet long and 60 feet high. »

B. 4RS – Mr. René PIROTTE 10, rue du Parc à Verviers
La notoriété de Laurent Henrotay est immense et s’étend bien au delà de nos frontières.
En mars 1924, à l’occasion de la visite en France de Mr. Hiram Percy Maxim, Président de l’A.R.R.L., il représenta la Belgique lors d’une réunion préliminaire à la formation d’une ligue Internationale d’amateurs de T.S.F.
Un banquet sous le haut patronage du Général Ferrié clôtura cette réunion internationale.
« Belgian amateurs are requested to send their address and call letters to Monsieur L. Henrotay, President of the Radio Club Belge de l’Est and delegate to the International Amateur’s Congress. Mr. Henrotay will then supply the information thus gained to all that are interested. Address : Henrotay, TSF Verviers, Belgique. ²»
Le premier « Congrès International des amateurs » eut lieu l’année suivante en avril à la Sorbonne : « L’UNION INTERNATIONALE DES RADIO-AMATEURS - THE INTERNATIONAL AMATEUR RADIO UNION » fut fondée.
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¹ «The Wireless World and Radio Review», N° 277. Vol. XV N°10, p. 324
² « QST », décembre 1924, p. 57. Texte similaire dans le “Journal des 8” N°17 du 11/10/1924.
Mr Laurent Henrotay, Président du Radio-Club Belge de l’Est, fit partie de la délégation belge composée de 10 personnes.
Mais revenons brièvement en 1924 pour ces exploits qui firent la réputation des membres du R.C.B.E.
Lors d’une soirée chez lui, le 31 Octobre 1924, Laurent Henrotay parvient à décider ses amis à tenter des essais transatlantiques. Il est chargé de se mettre en rapport avec les dirigeants de l’A.R.R.L.
« A une demande de participation faite à l’A.R.R.L, Mr. Schnell, traffic manager, nous informait que ces essais lui paraissaient très téméraires, mais que le nécessaire serait fait dans l’éventualité de la réussite, et quelques milliers de copies d’une invitation furent envoyées parmi tous les amateurs américains; l’annonce de ces essais étant tardive pour paraître à date dans Q.S.T. »¹
La liaison avec l’Amérique est donc décidée au sein du Radio-Club (novembre 1924). En Belgique, personne n’avait encore realisé un tel exploit !
André Courtois, 4YZ, une autre figure marquante du Radio-Club, brillamment promu ingénieur A.I.T.V. en 1913, est le Vice-Président du R.C.B.E.
Bientôt la T.S.F. devient une véritable passion pour lui. La nuit, il se relève pour écouter les signaux horaires américains sur 15000 mètres.
Le matin du jeudi 11 décembre 1924, il téléphone triomphalement à ses amis.
A 6h GMT, il était entré en communication avec la station canadienne C 1AR, ‘Old Joe’ Fassett à Halifax.
Cette PREMIÈRE liaison (d’une durée de 1h30!) entre la Belgique et le continent américain , un exploit réalisé par un amateur-émetteur Verviétois, est confirmée dans le magazine ‘QST’ de l’A.R.R.L.
« Belgium became QSO the North American continent for the first time when c1AR ‘Old Joe’ Fasset, at Halifax, N.S. clicked with b4YZ on Dec.11th, the latter station using 9 watts input. 1QV, Westerly, R.I., worked P2, Brussels on Dec.20th, and on the 23rd W2, also in Brussels, worked u1KC (…) 1KC tied up with b4RS on Dec.24th, making the fourth Belgian to work this country. » (QST 02/1925, pp.13-14)
Ces ‘hardis et téméraires’ pionniers n’en restèrent pas là !
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¹ « RADIO-ÉCHOS», Organe officiel du R.C.B.E., N°1 Janvier 1925, p.6
Le 25 décembre, 4RS traverse également l’Atlantique et contacte U 1KC. Ce même jour, Mr. Courtois, 4YZ établit une liaison avec U 2APY.
Le lendemain, Mr. Henrotay, 4QS communique avec U 1SF et U 3AB.
« Dans chacun des cas, la puissance ne dépassa pas le maximum fixé, soit 20 watts, et tous les correspondants accusèrent des signaux qsa r 4 à r 6 … (…)
D’autre part, des amateurs belges signalèrent que ces 3 amateurs, 4RS, 4QS et 4YZ furent appelés par des Américains des quatrième et cinquième districts, et notamment par U 5OT. ¹»
En ce début d’année 1925, le Radio-Club Belge de l’Est était bien organisé et connaissait un succès retentissant. Le président de cette ‘Société technique’ (siège : rue Tranchée, 50 à Verviers) était donc Laurent Henrotay 4QS ; le vice-président André Courtois 4YZ ; le secrétaire René Pirotte 4RS. Il y avait en outre 1 trésorier, 3 conseillers et de nombreux (14) ‘membres protecteurs’.
La revue ‘Radio-Échos’, « revue mensuelle de T.S.F., écrite par des amateurs pour l’amateur » devint l’organe officiel du R.C.B.E. Elle paraissait le 15 de chaque mois.
Son contenu est très intéressant à bien des égards : (commentaires personnels en italique)
- Une description de la station B4RS : photo, description et schéma de l’émetteur ainsi que les résultats obtenus.
- Essais transatlantiques (réussis) de 4QS, 4YZ et 4RS. (confirmés dans le QST 02/1925, p.13 et 14)
- Liste exhaustive d’indicatifs entendus et contactés. (Impressionnant pour l’époque : des dizaines d’Américains !)
- Un article relatif au Congrès International de T.S.F. (Avril 1925) et ses préparatifs. (4QS fera partie de la délégation belge !)
- Le rapport de la réunion préparatoire du 12 Mars 1924 à Paris… (4QS y était !)
Perfectionnant ses appareils, André Courtois, B 4YZ effectue le 29 août 1925 la première liaison avec les antipodes. Il contacte Z 2AC de Gisborne, Nouvelle Zélande en utilisant 65 watts sur 45 mètres de longueur d’onde.²
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¹ « RADIO-ÉCHOS», Organe officiel du R.C.B.E., N°1 Janvier 1925, p.6
² « JOURNAL DES 8 », N° 57 du 4/9/1925.

Des liaisons à grandes distances tous azimuts sont réalisées !
« Il nous revient que les amateurs Verviétois 4AS et 4XS ont travaillé récemment avec l’Amérique. Le premier le 16 février à 23h30 avec C 1AF qui accusait r8 sur 2 lampes. La puissance alimentation plaque était de 15 watts. Le second le 1er mars à 06h15 avec U 1ACK, naviguant sur le bateau « The Sea-Gull » à 200 kilomètres des côtes du Massachusetts. L’Américain accusait r5 sur 3 lampes ; la puissance interne était de 17 watts. Les distances couvertes sont respectivement de 5.000 et 4.000 kilomètres environ.¹ »
« La station B 4RS de Verviers a établi le dimanche 13 décembre 1925 à 21h15 GMT le 1er QSO Belgique - Afrique du Sud en travaillant avec A6N de Cape Town. La distance entre les 2 stations est de 9500 km, parcours entièrement sur terre. B 4RS utilisait seulement 30 watts alimentation, en alternatif 50 périodes non redressé sur 43 mètres de longueur d’onde.² »
En 1926, André Courtois succède à Laurent Henrotay comme Président du R.C.B.E. Mathématicien de valeur, doué d’un sens pédagogique extraordinaire, il crée de toutes pièces un cours d’une clarté étonnante, traitant du courant alternatif. Il dispensa ce cours pendant plusieurs années, permettant à de nombreux membres d’assimiler cette partie si ardue de l’électricité.
C’est en cette même année 1926 qu’il est le premier belge à décrocher la plus haute distinction pour un radioamateur de l’époque : le diplôme ‘WAC’, attribué sur demande aux stations ayant réalisé une liaison bilatérale avec des stations des 6 continents. Les cartes QSL, preuves confirmant ces contacts, envoyées à l’A.R.R.L. , étaient retournées, accompagnées du prestigieux certificat.
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¹ « L’ANTENNE » N° 102 du 10/03/1925.
² « L’ANTENNE » N° 143 du 22/12/1925.
Le premier WAC (CW) belge fut donc obtenu par André COURTOIS, B 4YZ de Verviers. Il s’agit par ailleurs du 1er WAC européen et du 7e WAC mondial. Son indicatif est cité pour la première fois dans le ‘QST’ de juin 1926, p.54.
« The following stations have submitted applications and have been entered on the rolls of the the WAC Club as full-fledged members : u6OI, u6HM, u1AAO, c4GT, pr4SA, u9ZT-9XAX, b4YZ and gi5NJ. »
Cette formidable prouesse est confirmée à maintes reprises dans les listes récapitulatives publiées régulièrement dans ‘QST’, dans la revue autrichienne ‘OEM’ de mars 1935 (pp.12-14) ainsi que dans le ‘QSO’ de mai 1935, p.82.
Il est remarquable de constater que le second WAC (CW) belge (4e WAC européen, 20e mondial) fut décerné à B 4RS, René PIROTTE de Verviers. Son indicatif apparaît pour la première fois dans le ‘QST’ de novembre 1926, p.50.
En 1929, René Toussaint, ON4US, un autre membre du R.C.B.E., reçut son WAC CW et son diplôme de membre de l’A.R.R.L., tous deux datés du 22 octobre 1929. (5ème WAC CW belge)
Le Radio-Club compte près de 200 membres.
Mr. Joseph Roussel, Secrétaire de la Société Française d’Études de T.S.F., auteur de nombreux ouvrages de vulgarisation radio, vient en Belgique à la demande de Laurent Henrotay. Il donne 2 conférences à salle comble. ¹
Sa visite en Belgique (Photo en ANNEXE 1) est relatée dans un article intitulé « Ce que j’ai vu et entendu en Belgique ²». Mr. Roussel fut nommé Membre d’Honneur du R.C.B.E., tout comme Mr. Louis Houben, ingénieur A.I.T.V. (Andrimont)
Dans le cadre des Festivités du Cinquantenaire de la Gileppe, eut lieu, du 29 juillet au 9 septembre 1928, une grande Exposition des Arts et de l’Industrie.
Le R.C.B.E. a un stand très remarqué dans la salle de chimie de l’Athénée Royal. On y voit notamment diverses réalisations de ses membres, un superbigrille et le transmetteur automatique d’André Courtois.
En 1930, le Radio-Club édite un traité élémentaire d’électricité élaboré par Edmond Penders. La première édition de cet ouvrage, honorée d’une souscription du Ministère des Sciences et des Arts, est rapidement épuisée.
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¹ Joseph Roussel donnera une seconde conférence (sujet : la télévision) au R.C.B.E. le 1er décembre 1927
² « La TSF Moderne » 07/1926, pp. 400-402.


Mr. Joseph Roussel n’apparaît plus comme Membre d’Honneur dans cette seconde édition, tirée à quelques 3000 exemplaires. Il décéda entre-temps, le 8 juillet 1929 d’une congestion pulmonaire. Il n’avait pas 50 ans !
Le R.C.B.E. comptait dans ses rangs des amateurs photographes : Louis AM ZEHNHOFF, René PIROTTE, Emile PIRET et Jean HOUBEAU. Dès 1932, des causeries et séances pratiques de photo viennent étoffer les activités radio du club. Un laboratoire photo modèle, œuvre d’un sans-filiste et photographe dévoué, est inauguré en 1935.

La plupart des pionniers de la première heure délaissent le hobby pour se consacrer à leurs activités familiales et professionnelles.
Peu d’informations filtrent en cette période tourmentée.
10 Mai 1940 : les équipements radio furent remis aux autorités ou …confisqués par l’occupant. La société fut mise en veilleuse pendant les années d’occupation.
Pour ce qui est de l’après-guerre, retenons que le 25ème anniversaire du club ne fut pas fêté en raison du décès d’André Courtois ON4YZ (‘QSO’ 01/1946).
Le 35ème anniversaire du Radio Club de l’Est fut fêté en grandes pompes. Le quotidien ‘Le Jour’ du jeudi 27 juin 1957 relatait ces 35 années de rayonnement dans le monde des radioamateurs. Le club comptait alors 110 membres !
En 1958, une tentative de jumelage du « Royal Radio Club de l’Est » et de l’UBA échoua. Le R.C.B.E. disparaît de nos écrans vers cette époque.
La jeune section UBA de Verviers, futur GDV, présidée par Léon Peters ON4PL, tient sa première réunion officielle le 27/2/1962 au Café du Tank, Place Verte.
Monsieur Laurent Henrotay, radio technicien et fondateur du R.C.B.E. rejoindra son ami André Courtois le 16/12/1967, René Toussaint de Spa décède en 1971, René Pirotte disparaît en 1983.
Et tous les autres amateurs de la première heure les ont rejoint.
Bravant l’interdiction d’émettre, ces pionniers Verviétois, membres du R.C.B.E., du C.V.E.R. ou du R.V. apporteront leur quote-part appréciable au développement de cette fascinante science nouvelle. Côtoyant les plus éminents radioamateurs de leur temps, ils participeront à l’élaboration de l’IARU. Ils établiront des liaisons radio qui connaîtront un retentissement international, ils récolteront de prestigieuses récompenses et leurs prouesses techniques porteront loin dans le monde le nom de leur ville, VERVIERS, le berceau du radio amateurisme en Belgique.
ANNEXE 1
Le Radio Club Belge de l’Est en 1926.

Assis (de gauche à dr.) : André Courtois (B4YZ), Président du R.C.B.E.,Joseph Roussel de Juvisy-sur-Orge (Seine-et-Oise), Louis Houben , Ingénieur, Président d’Honneur.
Debouts (de gauche à dr.) : M. Navaux, Vice-Président. Edmond Penders, Vice-Président, Jean Lecloux, Conseiller, René Pirotte (B4RS),
Secrétaire, Willy Putz et Willy Delrez, Conseillers techniques.
Source :
« La TSF Moderne », 07/1926, pp. 400-402.
Bibliographie
La TSF Moderne. Revue mensuelle illustrée. Organe officiel du Cercle belge d’Études radiotélégraphiques, du Radio-Club de Belgique, de la Société Luxembourgeoise et de nombreuses autres Sociétés. Paris-Bruxelles.
La revue ‘GDV PRESS’, 01-02/1975 (« Le Radio-Club Belge de l’Est a 35 ans »)
« Notes Souvenirs de ON4RV » (René GOKA), dans ‘Le Gang Verviétois’, N°8, 1965.
The Wireless World and Radio Review. The Official Organ of the Wireless Society of London. A magazine devoted to Wireless Telegraphy and Telephony. London. (1924-1926)
« Radio-Échos », Organe officiel du R.C.B.E., N°1 - 01/1925.
Léon Peters (ON4PL): L’histoire des radioamateurs de la région de Verviers, dans ‘Temps Jadis’ n°49, pp. 8-10.
Edmond Penders : Premières notions d’Électricité et de T.S.F. Verviers, 1931.
Journaux ‘Le Jour’ et ‘Le Courrier du Soir’ de Verviers, 1922-1924. (archivage ON5WG et ON4PS)
« Le Radio-Feuillet – Le Bulletin des Ondes Courtes », Organe mensuel de l’Union des Radio-Amateurs Belges, Verviers, 1926-1929. (43 numéros)
« QSO », Organe officiel du Réseau Belge. Bulletin de liaison et compléments des communications entre amateurs. Bruxelles.
« Le Journal des 8 », Organe de liaison entre les amateurs français et étrangers. Imprimerie Veuclin, Rugles (Eure) (1924-1926)
« L’Antenne ». Supplément hebdomadaire illustré de ‘La Meuse’ (Liège) (Collection personnelle, années 1924-1926)
« QST ». Devoted exclusively to Amateur Radio. Published by the A.R.R.L. (années 1924-1925)
Le Logbook de ON4GS. (1930)
Conclusions additionnelles et de synthèse.
Maurice RUTH, membre du R.C.B.E. avec l’indicatif B 4GS, puis ON4GS habita successivement à Wegnez, 321 rue de la Croix Rouge puis à Ensival lez-Verviers, 23 rue Godin et enfin 86, rue de Pepinster dans cette même localité.
Il apparaît dans les listes officielles belges de 1927 à 1932.
Ce splendide document d’époque répertorie 320 contacts réalisés entre le 1er mars et le 15 mai1930, au rythme de un ou plusieurs contacts journaliers. Soit 76 jours de la vie d’un radio amateur Verviétois de 1930. Seul le 1er avril resta sans contact ! Le logbook s’arrête brutalement le 15 mai 1930. Des liaisons ont cependant été effectuées par Maurice Ruth avant et après les dates ci-dessus.
Les contacts se répartissent comme suit :

Les stations belges se taillent la part du lion, les stations Verviétoises du R.C.B.E., du C.V.E.R et du R.V. étant de loin les plus actives. Voici une liste de ces indicatifs : ON4FI, ON4QS, ON4LU, ON4FZ (Theux), ON4AZ, ON4FJ, ON4PC, ON4 Y2, ON4IP et ON4JVX, ce dernier comme seule station non identifiée à ce jour. La palme revient à ON4FI, Ernest : 24 contacts.
Quant aux stations françaises, très nombreuses aussi, la plupart sont des ‘3 lettres’…. Des ‘noirs’ comme on avait coutume de dire à l’époque.
Je tiens à remercier chaleureusement ON4LG, Fred de Liège qui a reçu ce document trouvé dans une brocante philatélique. Merci de nous avoir permis de nous immerger dans le quotidien d’un radio amateur Verviétois de 1930.
Joseph Roussel (1879-1929)(1)
Joseph ROUSSEL est né à Verneuil-sur-Avre, le 26 Décembre 1879 où son père exerce la profession de pharmacien. Il fréquente l’école Sainte-Croix de Neuilly. Il y est un très brillant élève, à tel point que la Direction lui aurait demandé d’enseigner les mathématiques aux élèves préparant les Grandes Ecoles. Ses études terminées, il s’installe à Juvisy-sur-Orge comme pharmacien, où sa passion l’oblige à avoir un « très bon préparateur en pharmacie ». Il se marie en 1908 avec Mademoiselle Madeleine VETTER. C’est un homme complet, à la fois excellent manuel et brillant intellectuel.
Sa femme se charge de l’éducation des quatre enfants. Elle sera pour lui une précieuse collaboratrice, l’accompagnant dans ses conférences et l’épaulant dans ses recherches.
Après la Grande Guerre, passée à l’hôpital de Vannes comme Opérateur-Radiologue, Joseph ROUSSEL se lance auprès du public dans une grande campagne de sensibilisation à la TSF.
Il anime des causeries à Paris, fait des conférences en France et à l’étranger¹, tout cela dans un seul but, inoculer le « microbe de la Radio » à tous.

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¹ Sa visite en Belgique (1926) est relatée dans un article intitulé « Ce que j’ai vu et entendu en Belgique ». Il fut publié dans « La TSF Moderne » de Juillet 1926, pp. 400-402. Il fit salle comble lors de 2 conférences au Radio-Club Belge de l’Est (Verviers), dont il devint Membre d’Honneur.
Pour être plus sûr de réussir, il ouvre son « labo » à tous les jeunes qui s’intéressent à sa passion.
Rédacteur en chef du Journal « l’Onde Hertzienne » et il est également l’auteur de nombreux ouvrages de vulgarisation.
Le plus connu est sans doute « Le premier livre de l’AMATEUR DE T.S.F » sorti des presses de l’éditeur parisien VUIBERT en 1921.
Ce livre qui était le résultat de ses recherches a permis aux amateurs de réaliser en toute sécurité de nombreux montages de postes récepteurs.
Le succès fut tel que dès 1924, l'éditeur mettait sous presse la cinquième édition.
En 1923, il écrira « Comment recevoir la TÉlÉphonie Sans Fil », un livre à l'attention de tous ceux qui voulaient écouter les nouvelles émissions parlées transmises depuis le poste de la Tour Eiffel.
Il assurait aussi à cette époque les fonctions de Secrétaire Général de la Société Française d'Etudes de Télégraphie et de Téléphonie Sans Fil.
Joseph Roussel créera le Radio Club Juvisien. C’est au sein de celui-ci qu’il enseignera aux jeunes le morse et les principes de la radio.
Grâce à cet inventeur de génie, la radio devenait populaire.
Joseph Roussel fait partie aussi des pionniers des radio-amateurs français (indicatif 8AD) et était le 4ième à avoir reçu l'autorisation d'émettre.

Cinquante ans après sa mort, le Radio Club Juvisien existait encore.
Quelques années auparavant les dirigeants du Radio Club et le Conseil Municipal de Juvisy-sur-Orge décidèrent de faire connaître leur maître, de le faire sortir de l’oubli, de l’ombre, en déposant une plaque commémorative.
Il avait envisagé d’enregistrer les émissions de la Tour Eiffel au moyen d’un écouteur téléphonique et d’un stylet, qui en pivotant servait de relais pour actionner la palette de l’imprimeur d’un appareil à morse.
Alors qu’il faisait des études sur la télévision et sur les transistors, il était allé passer quelques jours de vacances à Saint-Georges-Motel, où il possédait une maison.
C’est là qu’il succomba d’une double congestion pulmonaire le 08 juillet 1929.
Cette tragique mort allait figer les connaissances en matière de télégraphie pendant près de 20 ans.
Le temps nécessaire à trois Américains pour mettre au point les recherches entreprises par Joseph ROUSSEL et sans doute trop avancées pour être comprises par son entourage.
Pour célébrer le centième anniversaire de sa naissance (1879-1979), le Radio-Club, le Conseil municipal de Juvisy-sur-Orge ainsi que celui de Saint-Georges-Motel ont ensemble proposé au Secrétaire d’Etat aux Postes et Télécommunications, l’émission d’un timbre à son effigie.
Sources : Bibliographie de M. Olivier ROUSSEL.
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