vendredi, 9 mai 2025

Histoire du Réseau Belge

Souvenirs de ON4TI

Mes souvenirs dĂ©butent en 1919, date Ă  laquelle la radio n'Ă©tait pas du tout vulgarisĂ©e comme aujourd'hui, et, sauf quelques Ă©metteurs comme la tour Eiffel, les stations cĂŽtiĂšres et les navires, on n’entendait pas grand chose, surtout sur un poste a galĂšne. De plus il fallait absolument connaĂźtre le morse car il n'y avait pas d'Ă©mission en tĂ©lĂ©phonie.
Si vous le voulez bien, je vais essayer de me souvenir de ce qu'Ă©tait la radio, il y a 30 ans. Dans ces souvenirs, je vais aussi essayer de raconter comment fut crĂ©e le premier groupement des amateurs belges, sous le nom de "RĂ©seau Belge" qui par la suite, devait devenir l’UBA.

Je venais de passer les 4 annĂ©es de guerre en voyages qui n'Ă©taient pas d'agrĂ©ment, Ă  travers la Hollande, l'Angleterre et la France, et je rentrais enfin Ă  Bruxelles en 1919. Pendant ces tribulations involontaires, j'avais pu voir fonctionner les Ă©metteurs Ă  Ă©tincelles en service sur les navires. J'ai mĂȘme pu Ă©couter du morse et voir que les opĂ©rateurs avaient des casques avec cordon de 4 ou 5 mĂštres de long. Ce dĂ©tail leur permettait de sortir sur le pont et d'assister au torpillage des navires du convoi, sans pour cela quitter l’écoute. C'Ă©tait d'autant plus pratique que la bande passante Ă©tait fort large et qu’il n’était pas nĂ©cessaire de toucher au rĂ©glage pour Ă©couter une plage de frĂ©quence de 60 ou mĂȘme de 80 kilocycles. Depuis, les choses ont bien changĂ©.

Vers 1918, j'avais vu au camp d'Avord, prÚs de Bourges, l'un des premiers récepteurs à lampes. C'était le fameux 3TER (1), mais je ne l'ai su que quelques années aprÚs.
C'Ă©tait un ampli Ă  3 lampes BF, avec dĂ©tecteur Ă  galĂšne. Je dois dire que je ne voyais absolument pas ce que venaient faire ces lampes dans un rĂ©cepteur. J'avais bien reçu quelques explications, mais elles me semblaient tellement incroyables que je n'arrivais pas Ă  me rendre compte que c'Ă©tait vraiment possible.
Un des opĂ©rateurs m'avait dit que les lampes s'allumaient automatiquement lorsque le rĂ©cepteur recevait son indicatif. Un autre disait que c'Ă©tait le tout nouveau rĂ©cepteur de l'armĂ©e française et qu'il utilisait les "relais thermoĂŻoniques". D'autres encore, que c'Ă©tait un rĂ©cepteur avec tubes Ă  vide. J'avais Ă©tĂ© fortement impressionnĂ© d'Ă©couter du morse que l'on entendait Ă  50  mĂštres avec une puissance du tonnerre.

Ayant vu ce mystĂ©rieux rĂ©cepteur, je n'avais plus qu'une idĂ©e: monter un modeste  poste Ă  galĂšne et Ă©couter la Tour Eiffel afin de me perfectionner en morse. Seulement il y avait deux grandes difficultĂ©s Ă  la rĂ©alisation de ce rĂȘve : la premiĂšre Ă©tait le manque d'argent (Ă  20 ans, on n’est jamais riche) et la deuxiĂšme, le manque de documentation. Pour la question des fonds, le problĂšme Ă©tait fort compliquĂ© mais pas sans solution, tandis que pour se procurer les schĂ©mas et le nombre de spires des bobines d'accords, c'Ă©tait beaucoup plus difficile.    

Dans l'espoir de trouver ces renseignements, j'allais passer des aprĂšs midis entiers Ă  la bibliothĂšque du Palais du Midi, qui Ă©tait alors ce que sont les Arts et MĂ©tiers aujourd'hui. Sans grand rĂ©sultat ! J'y trouvais des articles sur les dĂ©tecteurs Ă©lectrolytiques et il y avait beaucoup de descriptions d'antennes.
C'était à croire que l'on pouvait recevoir de la radio rien qu'avec une antenne. De plus, tout cela datait de 1910 et les 4 années de guerre avait fait avancer la radio à pas de géant.

Les quelques articles publiĂ©s aprĂšs la guerre n'Ă©taient pas fort explicites, car ne l'oublions pas, tout ce qui Ă©tait radio Ă©tait encore ultra secret et pour faire de la copie, les auteurs se perdaient en bla-bla du genre:  « Les rĂ©cepteurs de radiotĂ©lĂ©graphie de nos jours sont parvenus Ă  leur stade dĂ©finitif Â». Aujourd'hui, nous pouvons sourire de ces affirmations gratuites.

Je souhaite que ceux qui ont Ă©crit ces articles pourront, par la  suite, voir un super 14 tubes avec double changement de frĂ©quence!  

Pour en revenir Ă  cette question compliquĂ©e de documentation, je dois dire que j'avais rapportĂ© de Paris les catalogues des  premiers constructeurs français, mais Ă  part les belles gravures dessinĂ©es Ă  la plume, ils ne donnaient pas grand chose comme renseignement technique. Lorsqu’on relit aujourd’hui ces catalogues, on reste rĂȘveur devant les textes qui, alors, nous  remplissaient d'enthousiasme. J'en ai retrouvĂ© un au sujet d'un  dĂ©tecteur Ă  galĂšne, le voici : "Outre son insensibilitĂ© aux dĂ©charges atmosphĂ©riques, ce dĂ©tecteur possĂšde une sensibilitĂ© lĂ©gĂšrement supĂ©rieure pour les longues ondes, et en particulier  pour les ondes lointaines".
Cette derniĂšre phrase vaut son pesant de rigolade.

Alors qu'Ă  Paris il y avait dĂ©jĂ  plusieurs magasins spĂ©cialisĂ©s en  radio, ici Ă  Bruxelles il n'y en avait que deux qui, en plus  d'autres articles, vendaient quelques piĂšces de radio. L'un Ă©tait rue Plattesteen et l'autre rue PlĂ©tinckx. (2) On pouvait voir dans ces deux vitrines des bobines d'accord en Oudin et en Tesla dont  certaines avaient des diamĂštres de 15 Ă  20 cm et 40 ou 50 cm de longueur. Il y en avait mĂȘme dont le bobinage primaire pĂ©nĂ©trait dans le bobinage secondaire, tout cela Ă©quipĂ© de beaux tubes Ă  coulisses en laiton poli et vernis au tampon. La bobine pĂ©nĂ©trante avait une belle rangĂ©e de plots disposĂ©s en arc de cercle avec une manette Ă  contacts Ă  ressort que le constructeur conseillait d'enduire de pĂ©trole pour Ă©viter l'oxydation par l'air.

Je me souviens que quelques mois aprÚs, je devais entreprendre la construction d'une bobine d' accord de ce genre, mais encore plus compliquée.
C'Ă©tait la fameuse bobine universelle du Docteur Corret (3). Elle Ă©tait prĂ©vue pour couvrir la bande de 300 Ă  26000 mĂštres, bobinĂ©e en galettes pour les "Longues Ondes" et en spires jointives avec rĂ©glage par curseur pour les "Ondes Courtes” de 300 mĂštres.

Je devais me rendre compte, par la suite, que cette bobine d' accord était plus puissante en ventilateur qu'en sélectivité. En effet le bobinage de réaction rentrait dans le bobinage d'accord qui avait bien 15 cm de diamÚtre, et lorsque je manoeuvrais la réaction avec un peu trop de nervosité, le déplacement d'air était assez fort pour souffler ma cigarette hors du cendrier placé sur la table.

J'avais découvert par hasard qu'en plus des deux magasins, il y avait maintenant un rayon de radio au Grand Bazar. J'en ai gardé le souvenir, car c'est là que j'ai acheté mon premier livre de radio qui était "Les tubes à vides" de Dapsense. (4) C'est lui qui m'a expliqué comment fonctionnait une lampe de radio. S'il lit ces lignes, je lui lÚve mon chapeau, car pour décrire ce qui était si compliqué, il a su trouver des mots simples.

Ces trois vitrines reprĂ©sentaient pour moi le paradis et je ne descendais jamais en ville sans leur rendre une visite. Je trouvais mĂȘme des prĂ©textes de courses urgentes, histoire d'aller voir s'il n'y avait rien de neuf Ă  admirer.
Un jour que j'inventoriais des yeux la vitrine de la rue Plattesteen, j'ai vu pour la premiĂšre fois une petite revue Ă  couverture bleue foncĂ©e, c'Ă©tait la revue "La TSF moderne". Pour tous ceux qui faisaient de la radio vers 1920, elle a Ă©tĂ© l'inspiratrice des nuits blanches passĂ©es Ă  rĂ©aliser des montages savants, ou des rhĂ©ostats Ă  plots, montĂ©s sur de l'Ă©bonite. A l'Ă©poque c'Ă©tait la seule matiĂšre digne d'ĂȘtre utilisĂ©e en radio.
Elle avait cependant l'inconvénient de se travailler difficilement, sans éclat et lorsqu'il fallait en scier un morceau, elle dégageait une odeur de souffre et de petit endroit, enfin vous voyez une odeur bien particuliÚre.

Cette premiÚre revue de radio que je venais de découvrir, portait le n°5 d'août 1920. Elle a été la premiÚre à faire connaitre les travaux d'Armstrong (5), et elle publiait justement l'importante communication faite le 3 mars 1915 par Armstrong au sujet de " l'Audion comme détecteur et comme amplificateur ".

A l'Ă©poque, Armstrong Ă©tait un jeune ingĂ©nieur de 24 ans et s'intĂ©ressait Ă  la radio en tant qu'amateur. Entre parenthĂšses, cette dĂ©couverte prouve que les amateurs servent quand mĂȘme Ă  quelque chose.

Il avait donc montĂ© une lampe “Audion”, comme on disait alors, en dĂ©tectrice simple, et en rĂ©alisant diffĂ©rents montages, il s'Ă©tait rendu compte que si on couplait la plaque Ă  la grille d'une triode, au moyen du champ magnĂ©tique de deux bobinages sĂ©parĂ©s, on pouvait arriver Ă  faire osciller cette lampe, c'est Ă  dire Ă  produire du courant haute frĂ©quence.

Cette constatation Ă©tait une dĂ©couverte sensationnelle car jusqu'ici il n'y avait que les alternateurs ou les arcs pour produire du courant alternatif Ă  haute frĂ©quence, et encore ceci n'Ă©tait possible que pour les ‘Grandes Ondes’.

Ayant expérimenté et établi les lois mathématiques de sa grande invention, il avait immédiatement compris ce que son montage pouvait représenter comme progrÚs pour la radio. Sa premiÚre idée, qui avait été la bonne, fut de prendre un brevet, seulement et comme toujours, il n'avait pas l'argent nécessaire. De plus, il était orphelin et pratiquement sans famille, sauf un vieil oncle qui était notaire. Il lui rendit visite pour lui expliquer sa découverte, avec l'espoir de recevoir les quelques dollars nécessaires à son brevet.

Le vieil oncle qui Ă©tait encore du temps des carrosses, ne comprit absolument rien Ă  l’invention d'Armstrong et il lui rĂ©pondit qu'il Ă©tait inutile de dĂ©penser tant d'argent pour prendre un brevet. Il lui conseilla d'acter simplement son invention sur papier timbrĂ©, quitte Ă  faire valoir ses droits si par aprĂšs, c'Ă©tait vraiment nĂ©cessaire.

Armstrong fut bien obligĂ© d'accepter la dĂ©cision de son oncle. Seulement, lorsque sa dĂ©couverte fut connue et expĂ©rimentĂ©e par les grandes firmes amĂ©ricaines, celles-ci se rendirent immĂ©diatement compte des profits qu'elles pouvaient en tirer et firent breveter la dĂ©couverte Ă  leur nom. Armstrong intenta plus tard un procĂšs, mais sans rĂ©sultats. Il avait eu l’idĂ©e, mais les autres avaient les moyens, c’est-Ă -dire l’argent, et dans ce procĂšs, juges ou pas juges, ce n'est jamais celui qui a l'idĂ©e qui l’emporte. Le Français LĂ©vy, qui inventa le montage super hĂ©tĂ©rodyne, en sait quelque chose.

Vingt ans plus tard, Armstrong devait prendre une belle revanche, puisque c'est lui aussi qui inventa le systÚme de modulation de fréquence (FM), mais cette fois, il avait les brevets et les grandes firmes durent lui payer une forte somme pour obtenir ses licences.

Chaque mois, la « T.S.F. Moderne Â» Ă©tait attendue avec impatience. D'abord pour la suite des articles de Mignet "Fabrication des lampes Ă  vides Ă  3 Ă©lectrodes" par un amateur ; ensuite pour savoir ce qu'il y avait de neuf en radio et surtout pour son “Horaire des transmissions" qui donnait les indicatifs des stations officielles et les longueurs d'ondes. C'Ă©taient des renseignements trĂšs utiles, car en ce temps lĂ , les quelques Ă©metteurs que l'on pouvait recevoir avaient des longueurs d'ondes qui allaient depuis 1200 jusque 23.000 mĂštres. Cette rubrique Ă©tait tenue par le Docteur Pierre Corret, grand Ă©couteur de DX, ceci façon de parler, et maĂźtre d'espĂ©ranto, mais ceci est une autre affaire. (6)

J'avais appris qu'il y avait un Ă©metteur Ă  l'Observatoire d'Uccle, dont l'indicatif Ă©tait HS. Je me disais que, vu la petite distance qui sĂ©parait Uccle de Jette oĂč j'habitais, je devais certainement recevoir quelque chose. Je me suis mis Ă  construire un poste Ă  galĂšne avec une modeste bobine d' accord de l0 cm de diamĂštre et 30 cm de long, munie de deux magnifiques curseurs montĂ©s sur barre de laiton carrĂ©e.

Le tout poli et repoli avec du papier de verre de plus en plus fin.  Aujourd'hui cela n'a plus l'air de rien, mais en ce  temps lĂ , il fallait commencer par fabriquer un tube en carton, et pour servir de mandrin, trouver une bouteille qui avait les dimensions voulues. Mais voilĂ , celles que l'on avaient Ă©taient toujours ou trop grandes ou trop petites, ce qui prouve bien que la loi de l'em...bĂȘtement universel existe bien.

De plus, je n'Ă©tais pas rentier et je devais travailler la journĂ©e Ă  tout autre chose que la radio. Ce n'est pas si mal, mais le grand rĂȘve Ă©tait de pouvoir faire de la radio, le jour, la nuit et mĂȘme de ne plus dormir pour en faire davantage. AprĂšs quelques semaines de travail acharnĂ©, mon rĂ©cepteur Ă©tait montĂ© et je parvenais Ă  entendre la petite Ă©tincelle du buzzer constituĂ© par une vieille sonnerie Ă©lectrique.

Mais en dehors de ça, je n'entendais rien, mĂȘme pas le plus petit crachotement de parasites. Il faut ajouter que je n'avais pas d'antenne, ce qui explique tout. J'avais lu un article oĂč l'auteur disait que pour avoir une bonne antenne elle devait avoir au moins 10 mĂštres de longueur par 100 Km de distance entre l'Ă©metteur et le rĂ©cepteur.
Comme dans ma candeur naĂŻve, je croyais pouvoir recevoir les stations amĂ©ricaines sur mon poste Ă  galĂšne, une simple multiplication m'avait dĂ©montrĂ© que pour recevoir la station d'Arlington qui Ă©tait Ă  7000 Km de Bruxelles, il ne fallait une antenne de 700 mĂštres. Vraiment, je ne voyais pas oĂč et comment attacher un fil de cette longueur. Du haut de la lucarne du grenier, j'avais repĂ©rĂ© les plus hautes maisons environnantes, mais chaque fois le refus avait Ă©tĂ© ou souriant ou sec, mais refusĂ© quand mĂȘme. En vĂ©ritĂ©, aucun propriĂ©taire ne voyait d'un bon oeil une antenne attachĂ©e Ă  son toit d'abord, disait-il, cela attirait la foudre, mais aussi, et ça il ne le disait pas : qui disait T.S.F. disait aussi espionnage.

Depuis la fin de la guerre, tous les journaux publiaient en premiÚre page les récits d'agents des services secrets alliés avec tous les détails sur la façon extraordinaire dont ils avaient possédé les Allemands en recevant des messages de la plus haute importance, avec des tout petits récepteurs qui se mettaient en poche ou ailleurs. Je me souviens encore d'un de ces articles ou le journaliste racontait comment un ancien prisonnier Français, évadé, puis retourné en Allemagne comme agent de renseignements, avait reçu des messages ultra secrets et capables de terminer la guerre en quelques jours. Comme le journaliste lui demandait quel récepteur il avait utilisé, il lui répondit sans rire, qu'il avait servi dans la cavalerie et qu'il était parvenu à conserver le récepteur à galÚne qu'il utilisait en patrouille. Il faut avoir manipulé un poste à galÚne pour se demander comment ce cavalier pouvait bien faire pour régler le chercheur de son poste lorsqu'il avait les fesses sur son cheval.

Ces journalistes quand mĂȘme, ils n'ont jamais changĂ© et Ă  cotĂ© d'eux les Marseillais sont des petits garçons.

Puisqu'il n'y avait rien Ă  faire pour placer cette sacrĂ©e antenne de 700 mĂštres, j'ai trouvĂ© un autre systĂšme; il n'Ă©tait pas aussi bon, mais aprĂšs tout Uccle, n'Ă©tait quand mĂȘme pas si loin de Jette et je me disais que la seule solution Ă©tait de fabriquer une antenne dĂ©montable, de façon Ă  pouvoir la sortir chaque soir par la lucarne du toit. C'Ă©tait vite dit, mais en pratique ça durait beaucoup plus longtemps. J'avais lu dans la T.S.F. Moderne que plus l'antenne avait des brins, plus elle Ă©tait sensible.

Ces quelques mots n'ont l'air de rien, mais lorsqu'un soir j'essayais de sortir de la lucarne, une antenne de quatre brins de 6 mĂštres de long, j'en ai vu de toutes les couleurs.

Ses fils se sont d'abord entremĂȘlĂ©s au point que si on avait voulu le faire exprĂšs, il aurait au moins fallu une heure de travail pour y arriver. En plus de tout ça, j'avais accrochĂ© quelques tuiles du toit, d'oĂč la nĂ©cessitĂ© de faire l'ardoisier pendant une demi-heure avant de pouvoir continuer Ă  m'occuper du montage de mon antenne.

Finalement aprĂšs 6 ou 7 essais, je parviens quand mĂȘme Ă  l'installer en trois quarts d'heure, mais il fallait que tout marche bien.

Maintenant que je croyais avoir une antenne, j'Ă©coutais tous les soirs et mĂȘme souvent jusqu'Ă  deux heures du matin mais je n'entendais rien, absolument rien mĂȘme en rĂ©glant le chercheur au super point de sensibilitĂ©.

Je venais de lire le livre d'un publiciste français qui disait "Les difficultĂ©s ne sont pas faites pour vous vaincre, mais pour ĂȘtre vaincues." et calmement j'essayais d'appliquer ce slogan Ă  la question de mon antenne.

Un jour que je rentrais chez moi le nez en l'air, je m'aperçois qu'il y a un fil qui va d'un cĂŽtĂ© Ă  l'autre de la rue et que de plus il est accrochĂ© Ă  un isolateur placĂ© juste en dessous de la corniche de la maison oĂč j'habite. Je monte en vitesse au grenier et par les trous d'Ă©chafaudage je vois que ce fil passe Ă  proximitĂ© du mur et qu'il serait facile de m'en servir comme antenne. Je prĂ©pare immĂ©diatement un crochet attachĂ© Ă  un fil isolĂ©, mais je me dis qu'il serait imprudent de faire cet essai en plein jour et qu'il vaut mieux attendre qu'il fasse nuit de façon Ă  ne pas ĂȘtre vu, on ne sait jamais.

Enfin le soir tombe et j'attache ce fameux fil d'antenne. Je rĂšgle le chercheur de la galĂšne au point super sensible, et bonheur de bonheur, j'entends quelques trĂšs faibles parasites. Je dĂ©place les deux curseurs de la bobine d'accord d'un bout Ă  l'autre et, si j’avais pu, j'aurais rentrĂ© les deux Ă©couteurs dans mes oreilles pour ne rien perdre, mais hĂ©las, je n'entendais rien qui ressembla Ă  du morse. J'Ă©tais lĂ , perplexe, ne sachant plus que faire pour entendre quelque chose, quand en une fois j'entends un "top" formidable qui m'abasourdit, j'enlĂšve immĂ©diatement mon casque car ma premiĂšre impression est que le toit vient de s'Ă©crouler, mais le silence est complet et je n'entends que ma respiration prĂ©cipitĂ©e.

Je rĂ©flĂ©chi Ă  ce qui a bien pu produire un signal si puissant, quand au mĂȘme moment j'entends Ă  nouveau le mĂȘme top violent; par la suite cela s'est rĂ©pĂ©tĂ© d'une façon bien rĂ©guliĂšre.

Ce n'est que le lendemain matin que j'ai trouvé l'explication.
J'ai suivi le fil tout le long de la rue et aprÚs quelques centaines de mÚtres, j'ai vu qu'il était raccordé à une horloge électrique, alors j'ai compris, les fameux tops étaient simplement les impulsions électriques qui faisaient avancer l'horloge à chaque minute. Ceci a déjà été dit dans un ancien QSO mais il fallait bien le répéter pour que l'histoire soit complÚte.
Toujours Ă  cause de cette sacrĂ©e antenne, je n'Ă©tais pas encore parvenu Ă  recevoir quelque chose sur mon poste Ă  galĂšne. C'est alors que je dĂ©cidais d'aller Ă  la campagne pour faire un essai sĂ©rieux et Ă  monter une antenne, mais alors une vĂ©ritable antenne. J'avais projetĂ© d'aller faire cet essai sur le plateau au dessus de Jette, c'est Ă  dire Ă  l'endroit oĂč se trouve maintenant  l’hĂŽpital.

En ce temps lĂ  c’était un endroit bien dĂ©gagĂ©, pour le bon motif qu’il n’y avait aucune construction. Donc un aprĂšs-midi, je partis pour la grande aventure, Ă©quipĂ© de deux pieds photographiques pour servir de mats, d'un rouleau complet de fil de bronze 12/10, de deux douzaines d'isolateurs "VĂ©dovelli" et de mon poste Ă  galĂšne. Avec tout cet attirail j'Ă©tais fortement chargĂ©, et pour monter dans le tram c'Ă©tait toute une affaire. En cours de route j'ai dĂ» entendre pas mal de rĂ©clamations des autres voyageurs et entre autre celle d'une femme, du type ChaussĂ©e d'Anvers qui m'a dit "Dites jeune homme, retirez un peu votre affaire qui est dans mon dos". Comme il y avait double sens possible sur le mot ‘affaire’, j'ai vu des sourires retenus sur les lĂšvres des autres voyageurs; mais sachant que je partais pour le grand essai, j'Ă©tais de bonne humeur et rien ne pouvait me troubler.

J'arrive enfin sur place et j'installe les deux pieds photo Ă  300 grands pas l'un de l'autre et aprĂšs avoir enfoncĂ© les 6 piquets de fixation, je tends enfin cette antenne si longtemps espĂ©rĂ©e, que je raccorde Ă  mon poste Ă  galĂšne. Pour constituer un semblant de prise de terre, j'enfonce six bouts de fil d'antenne aussi profondĂ©ment que possible en les raccordant entre eux. Je sors mon buzzer de ma poche et je rĂšgle le chercheur au maximum de sensibilitĂ©. Je dĂ©place alors les deux curseurs de la fameuse bobine Oudin et en une fois j'entends des points-barres avec une puissance extraordinaire. Cette fois ça y est. Cependant je suis tellement Ă©motionnĂ© et content que je ne parviens pas Ă  lire une seule lettre. Je me rends compte que je reçois plusieurs stations, car j'entends qu'elles ont des notes bien diffĂ©rentes. J'ai beau essayer de diminuer mon Ă©motion, mais rien Ă  faire, j'en ai mĂȘme les larmes aux yeux, mais c'est de joie.

La station de tout Ă  l'heure est de nouveau lĂ , c'est du R6. Je  reprends mon crayon et je parviens Ă  lire OSA, puis quand il voulait bien se taire j'entendais plus faiblement FFH Le Havre, FFB Boulogne et plusieurs autres indicatifs encore inconnus. J'Ă©tais enchantĂ© et c'est dans la nuit tombante que j'ai repliĂ© tout mon fourbi en vitesse; mais quel rĂ©sultat !

Vers la fin de 1920 j'allais habiter quelques rues plus loin.

Cette maison et l'usine situĂ©e derriĂšre appartenaient au mĂȘme propriĂ©taire, qui me donna sans difficultĂ©s l'autorisation de placer une antenne et quelle antenne, un magnifique fil de 180 mĂštres de longueur. Depuis j'ai toujours considĂ©rĂ© ce propriĂ©taire comme le plus brave type de la terre. J'avais trouvĂ© au vieux marchĂ© un isolateur d'au moins 25 cm de long, avec un tas d'ailettes et capable de tenir 25000 volts, c'Ă©tait marquĂ© dessus.

En une aprÚs midi j'avais percé le mur, et c'est en reculant de 3 mÚtres, pour avoir une meilleure vue d'ensemble que j'ai pu admirer mon entrée d'antenne. Vraiment elle ressemblait à celle que j'ai vu à la Tour Eiffel, et je me disais que quand on à une entrée d'antenne comme ça, on se sent vraiment un tout autre amateur de T.S.F, et on n'a plus rien de commun avec celui qui à une entrée d'antenne toute petite et chétive, vraiment ça sentait la station professionnelle à plein nez. J'avais reçu l'autorisation paternelle d'installer tout mon fourbi de TSF dans le faux grenier, juste en dessous des tuiles.

En hiver il y avait la mĂȘme tempĂ©rature que dehors et en Ă©tĂ© obligĂ© de faire du nudisme pour rĂ©sister aux 40 degrĂ©s, mais tout ceci n'avait pas d'importance. LĂ  je pouvais faire de la radio loin du bruit de la maison, et comme il fallait une Ă©chelle pour y arriver, lorsque je dĂ©sirais ĂȘtre absolument tranquille, je remontais l'Ă©chelle et personne ne savait venir me dĂ©ranger, c'Ă©tait le paradis !

J'ai passé des années dans ce grenier et aussi beaucoup de nuits blanches à écouter le trafic des navires et des postes cÎtiers, sur 600 mÚtres, d'autant plus qu'avec ma nouvelle antenne, mon poste à galÚne était plus amusant qu'un super de nos jours.

Il n'avait pas la mĂȘme sĂ©lectivitĂ© c'est vrai, mais il permettait d'Ă©couter les 600 mĂštres sans toucher au rĂ©glage, ce qui Ă©tait bien pratique, d'autant plus que le chercheur d'une galĂšne a la mauvaise habitude d'ĂȘtre fort sensible et que la plus petite vibration le dĂ©rangeait dans son travail.

C'est assez drĂŽle Ă  dire, mais en ce temps lĂ  la sĂ©lectivitĂ© ne se faisait pas Ă  la rĂ©ception, mais Ă  l'Ă©mission. En effet les Ă©missions en ondes amorties donnaient Ă  chaque Ă©metteur une note bien particuliĂšre que l'on savait suivre trĂšs facilement malgrĂ© un fort brouillage. Il y avait Scheveningen PCHH avec sa note soufflĂ©e et asthmatique ; GNF qui sonnait comme un clairon avec une belle note mĂ©tallique ; Anvers OSA qui arrivait trĂšs fort avec une tonalitĂ© en bĂ©mol comme si les points barres regrettaient de quitter l'antenne ; Norddeich qui arrivait trĂšs faible avec une manipulation sans vie et une petite note triste. Les stations cĂŽtiĂšres avaient presque toutes une note ronflĂ©e, on aurait dit des billes qui passaient dans un tuyau de poĂȘle. Cette particularitĂ© provenait de ce qu'elles Ă©taient alimentĂ©es en courant Ă  25 pĂ©riodes.

Le grand sport de l'Ă©coute des 600 mĂštres Ă©tait de suivre le mĂȘme navire, depuis son dĂ©part jusqu'Ă  l'arrivĂ©e Ă  destination. Ceux qui quittaient Anvers ou un port anglais de la Manche ou Ă  destination de l'Afrique, Ă©taient reçu parfois jusque dans le Golfe de Gascogne, puis Ă  partir de cet endroit la rĂ©ception devenait beaucoup plus faible. J'en ai parfois suivi jusque Las Palmas, mais leurs notes devenaient si faibles et le brouillage Ă©tait si fort que c'Ă©tait un tour de force de les recevoir.

L’autodyne Ă  rĂ©action magnĂ©tique.

Depuis que la T.S.F. Moderne avait publiĂ© les schĂ©mas de dĂ©tectrices Ă  rĂ©action, la radio avait fait un grand pas en avant, car quelques amateurs curieux avaient rĂ©alisĂ© le montage et les rĂ©sultats Ă©taient si surprenants que chacun dĂ©sirait les faire connaĂźtre. C'est alors que paru « Le livre de l'amateur de TSF Â» par Roussel. (7) Cette fois il y avait une bible de la radio avec toutes les explications. C'Ă©tait un gros bouquin de 300 pages qui, en plus de tout ce qu'il fallait savoir sur les schĂ©mas des postes Ă  lampes, donnait aussi beaucoup de renseignements sur les indicatifs des stations officielles et mĂȘme des cartes avec leurs situations gĂ©ographiques. J'ai retrouvĂ© ce livre et en voyant la crasse qui recouvre certaines pages, je me suis souvenu qu'il avait beaucoup servi. On peut dire que c'Ă©tait le Handbook de l'Ă©poque hĂ©roĂŻque. Depuis que j'ai lu ce livre je ne rĂȘvais plus que de dĂ©tectrices Ă  rĂ©action, qui en plus de la rĂ©ception des ondes amorties, permettaient aussi celle des ondes entretenues, ce qui augmentait Ă©normĂ©ment le nombres de stations que l'on pouvait recevoir.

Au sujet de ces ‘entretenues’, je savais bien qu'il y avait autre chose que les ondes qui portaient le mĂȘme nom, mais vraiment je ne voyais pas ce qu'elles venaient faire dans la radio, mais passons. L'annĂ©e 1921 a Ă©tĂ© l'annĂ©e prolifique pour la documentation radio.

AprĂšs ce livre, je dĂ©couvrais la revue « L'Onde Electrique Â» puis « Wireless World Â» et mĂȘme le « QST Â». Tout ça Ă©tait rempli de schĂ©mas les plus divers, et je les avais tous recopiĂ©s dans un cahier tout neuf. Cependant il y avait tellement de diffĂ©rence entre eux que je ne savais vraiment pas dĂ©finir celui qu'il fallait faire. Les uns disaient que l'on pouvait parfaitement recevoir les entretenues avec une hĂ©tĂ©rodyne couplĂ©e Ă  un poste Ă  galĂšne, ce qui Ă©tait une solution fort simple.

Un autre auteur disait que l'hĂ©tĂ©rodyne Ă  rĂ©action Ă©tait bien prĂ©fĂ©rable car « seul ce montage se prĂȘte Ă  la bonne rĂ©ception des ondes en dessous de 1000 mĂštres, les lampes dĂ©tectrices proprement dites, dĂ©tectant mal ces ondes courtes Â».

Vous vous rendez compte, ces ondes en dessous de 1000 mĂštres ! D'autres auteurs prĂ©conisaient le montage Ă  deux lampes du nom de "amplificateur dĂ©tecteur hĂ©tĂ©rodyne Ă  haute frĂ©quence". Rien que le titre me mettait l'eau Ă  la bouche. Roussel dans son livre disait : « Ce rĂ©cepteur autodyne Ă  rĂ©action Ă  deux lampes permet l'audition de la station Clifden Ă  plusieurs centimĂštres des Ă©couteurs, avec une antenne unifilaire de 30 mĂštres, et la nuit, rĂ©ception de la station amĂ©ricaine d'Arlington Â».

Ce qui m'avait le plus frappé dans toute cette littérature, c'était d'apprendre que l'amplification de ces deux lampes était de plus de 200 fois, mais par contre qu'il fallait au moins 350 frs pour le montage, ceci d'aprÚs les multiples additions que j'avais faites. J'ai raclé les fonds de tirelires, j'ai rationné les cigarettes et fait part à mon pÚre de l'urgent besoin d'augmentation des "dimanches" mais il n'était pas du genre généreux.

J'ai repris le schéma de mon deux lampes pour la trente sixiÚme fois afin de trouver un accord de principe, entre matériel nécessaire et l'argent dont je disposais ou allais disposer, car il y avait urgence.

Il me fallait deux lampes, deux condensateurs variables, une bobine d' accord à réaction et encore, en plus de cela un accu de 4 volts et un autre de 45 volts.

J'ai repris alors sĂ©parĂ©ment la rĂ©alisation de ce qui Ă©tait possible et j'ai dĂ©cidĂ© de remplacer les condensateurs variables Ă  air avec des lames d'aluminium de 2 mm d'Ă©paisseur par deux verres de lampe cylindriques recouverts de papier d'argent et coulissant l'un dans l'autre. AprĂšs avoir fait des dizaines de magasins pour trouver ces sacrĂ©s tubes en verre, je n'avais encore trouvĂ© que les deux petits, permettant la rĂ©alisation du condensateur de grille, il restait encore Ă  trouver les 2 grands qui devaient avoir au moins 40 mm de diamĂštre pour le condensateur d' accord. Or, un jour que je tĂ©lĂ©phonais de la gare de Jette, je vois par la fenĂȘtre de la cabine un manchon Ă  gaz coiffĂ© d'un magnifique tube en verre, parfaitement cylindrique.

Je n'ajouterai rien, sauf de vous dire que j'ai eu mon condensateur variable.

Pour la question des accus, je les ai remplacĂ©s par des piles en sĂ©rie et en parallĂšle, ce n’était pas fameux, mais ça marchait quand mĂȘme assez bien pendant quelques heures.

Restait Ă  me procurer les deux lampes du type TM  (TĂ©lĂ©phonie Militaire).

Ceci est une toute autre histoire.

Il y avait derriĂšre l'Ă©glise St-Marie, juste en haut de la rue des Palais, (vous voyez que cet endroit a toujours Ă©tĂ© le quartier de la TSF !) un Ă©lectricien nommĂ© LĂ©on, qui en plus des magnĂ©tos, s'Ă©tait spĂ©cialisĂ© dans le matĂ©riel de radio de l'autre guerre (1914-1918) et qui, Ă  ce titre, fut peut ĂȘtre le pĂšre du “War Surplus”. Il possĂ©dait quelques piĂšces de radio, fort rares et entre autre des condensateurs variables de 1500 cm, complĂštement taillĂ©s dans la masse ; six ou sept lampes TM qu'il vendait 35 francs piĂšce, ce qui en 1921 reprĂ©sentait beaucoup d'argent ; deux ou trois RS5 qui Ă©taient les premiĂšres lampes d'Ă©mission et quelques dizaines de lampes Ă  montage horizontal dites ‘type Cochon’, ceci dit sans jeu de mots mais parce qu'elles avaient quatre pattes de fixation. Il avait encore des ondemĂštres et de quoi faire baver d'admiration tous les amateurs de l'Ă©poque. Ce brave LĂ©on Ă©tait un commerçant qui avait des principes bien Ă  lui. Il ne vendait pas son matĂ©riel Ă  n'importe qui, il fallait d'abord lui plaire en tant que client et ensuite convenir avec lui que le matĂ©riel qu'il avait Ă©tait trĂšs rarissime. Il y a des constructeurs de cette Ă©poque qui ont offert des milliers de francs pour avoir deux condensateurs variables taillĂ©s dans la masse, mais il a refusĂ©, leur tĂȘte ne lui revenait pas...

Comme il cachait toutes ses merveilles en dessous de son comptoir, Ă  chacune de mes visites je ne manquais jamais de lui en parler afin de pouvoir jeter un coup d'oeil et de me rendre compte ainsi de la diffĂ©rence absolue qu'il y avait, entre ces magnifiques CV et mes verres de lampes avec papier d'argent. Chaque fois qu'il les sortait, il ne manquait jamais de les passer dĂ©licatement sur le revers de sa manche, comme pour enlever des poussiĂšres imaginaires, et il ajoutait : « Ă‡a Monsieur, c'est une piĂšce de prĂ©cision que je ne vends pas, car s'il fallait la refaire, ça coĂ»terait des milliers de francs ». A vouloir ĂȘtre commerçant et Ă  ne pas vouloir vendre, il a du quitter la rue des Palais et lorsque je l'ai rencontrĂ© par hasard Ă  Maransart, plusieurs annĂ©es aprĂšs, il avait toujours ses CV. Seulement les Français s'Ă©taient mis Ă  en fabriquer en sĂ©rie et ils coĂ»taient beaucoup moins cher.

C'est chez LĂ©on que j'ai donc achetĂ© mes deux premiĂšres lampes TM, et comme il n'y avait pas encore de lampemĂštre, on se contentait d'essayer les filaments avec une pile. AprĂšs lui avoir payĂ© la forte somme, il voulut me les emballer,  mais je trouvais que c'Ă©tait beaucoup trop dangereux. J'en ai mis une dans chaque main et mes deux mains en poche je suis retournĂ© Ă  Jette Ă  pied, j'avais bien trop peur d'ĂȘtre bousculĂ© dans le tram et d'en casser une, si pas les deux. Tout au long de cette marche triomphale, je me voyais dĂ©jĂ  assis devant mon futur rĂ©cepteur Ă  deux lampes, le casque sur la tĂȘte et recevant les Ă©metteurs amĂ©ricains avec une puissance du tonnerre et mĂȘme Ă  50 cm des Ă©couteurs comme disait l'auteur.                         

Je suis finalement arrivé chez moi avec mes deux lampes en bon état, mais je ne pouvais pas en dire autant de mes mains qui étaient toute endolories. Cependant, les émotions de cette journée mémorable n'étaient pas encore terminées.

Il restait Ă  piquer ces lampes sur mon poste qui Ă©tait fin prĂȘt, ce qui n'Ă©tait pas difficile. Mais le plus dĂ©licat Ă  faire, c'Ă©tait de raccorder les piles de haute tension sans faire griller les filaments.

J’ai d'abord branchĂ© les piles de 4 volts afin d'ĂȘtre bien certain qu'il n'y avait pas d'erreur, puis en arrĂȘtant ma respiration, j'ai branchĂ© la haute tension, ceci façon de parler puisqu'il n'y avait que 45 V.C'est alors que le vrai miracle s'est produit, j'ai tirĂ©  le bouton de tiroir fixĂ© au bout de mon verre de lampe de la gare de Jette qui, j'oubliais de vous le dire, Ă©tait le CV d'accord et j'ai entendu une multitude de sifflements.

Ca marchait et mĂȘme bien, car une fois les premiĂšres Ă©motions passĂ©es, j'ai fignolĂ© le rĂ©glage de la bobine d' accord, manoeuvrĂ© la bobine Ă  coulisse de  rĂ©action et modifiĂ© la capacitĂ© de grille d'un coup de pouce et ça accrochait partout depuis 600 jusque 24000 mĂštres de longueur d'ondes. Sur tous les rĂ©glages, j'entendais enfin les fameuses ondes entretenues.

J'ai Ă©coutĂ© jusque vers 3 heures du matin et je n'Ă©tais pas encore fatiguĂ©, mais voilĂ , les piles se sont vidĂ©es avant moi. Ne sachant plus Ă©couter, faute de courant, j'ai Ă©tĂ© chercher ma grande carte planisphĂšre "Taride" et, une Ă  une, j'ai pointĂ© les stations reçues, il y en avait des quatre coins du monde : Poldhu MPD, Aranjuez EAA, Nauen  POZ, Lyon YN,  Croix d’Hins LY, Eilvees OUI, Anapolis NSS,  Rome IDO, Stavanger  LCM, Carnaevon  MUU, New Brunswick WIL,  Tuckerton WGG, Marion WSO. C'est avec le mĂȘme rĂ©cepteur que, vers 1922, j'ai entendu les premiers essais en phonie de la Tour Eiffel, de Chelmsford et de 2LO de Londres qui transmettait le soir de la musique de jazz du ‘Savoy Hotel’.

Ici se place un intermĂšde de ma vie d'amateur. En effet, je devais  continuer Ă  faire de la radio, mais cette fois aux frais de l'Etat. J'avais reçu un papier qui me demandait de bien vouloir me rendre Ă  la caserne N°1 Ă  Vilvorde avec des vivres pour 2 jours.     

C'est lĂ  que j'ai rencontrĂ© pour la premiĂšre fois RenĂ© Verstrepen ex 4AA, qui bien plus tard devait devenir un des prĂ©sidents de l’UBA. Il se promenait Ă  longueur de journĂ©e dans la cour de la caserne, ayant toujours sous le bras une pile de revues de radio. Nous devions nous rencontrer car tous les deux avions la mĂȘme envie de trouver un petit coin tranquille pour ĂȘtre loin des yeux du sergent de semaine et Ă©viter ainsi les questions qu'il aimait tant poser et que nous n'aimions pas entendre.

Un matin, Verstrepen m'annonça qu'il avait la clĂ© d'une roulotte de radio placĂ©e dans un coin Ă©loignĂ© de la cour de la caserne, et il me demandait de brosser le cours de morse de l'aprĂšs midi et de le rejoindre dans la roulotte Ă©quipĂ©e d'un rĂ©cepteur sur accus. Une fois rentrĂ©, nous avions fermĂ© la porte Ă  clef et nous nous sommes assis par terre pour ne pas ĂȘtre vus de l'extĂ©rieur. Verstrepen a sorti sa thĂ©iĂšre Ă©lectrique qui marchait sur 6 volts et toute l'aprĂšs midi, nous avons fait du thĂ© grĂące aux accus si aimablement mis Ă  notre disposition par l'armĂ©e.

J'ai apportĂ© mes revues et lui les siennes et l'aprĂšs-midi s'est passĂ©e agrĂ©ablement Ă  parler  d'Ă©metteur et de rĂ©cepteur. Nous avions trouvĂ© dans une de ces revues des renseignements sur la puissance des Ă©metteurs en fonctionnement Ă  l'Ă©poque et ça nous laissait rĂȘveurs par rapport aux petits Ă©metteurs de 25 ou 30 watts que nous voulions construire. J’ai encore ces revues et voici les renseignements donnĂ©s par la T.S.F. Moderne de fĂ©vrier 1922. La Tour Eiffel sur 2670 mĂštres mettait 82 AmpĂšres dans l’antenne. Nantes sur 8990 mĂštres 190 ampĂšres et Croix d’Hins sur 23740 mĂštres 460 ampĂšres.

 Nous avions aussi lu et relu les articles de ‘’Wireless World" ou l'amateur Godley, spĂ©cialement venu en Angleterre pour Ă©couter les amateurs amĂ©ricains, donnait les premiers rĂ©sultats du concours transatlantique oĂč 33 amateurs amĂ©ricains  avaient Ă©tĂ© reçus sur 200 mĂštres par Godley. (8)

Il avait installĂ© sa station de rĂ©ception en plein champ, sous une tente, Ainsi qu’une antenne dont la longueur atteignait 260 mĂštres.

Comme il  n’avait rien entendu  pendant les premiers jours d'essai, il avait cablĂ© en AmĂ©rique pour demander de monter un Ă©metteur  plus puissant, qu'Armstrong rĂ©alisa immĂ©diatement avec d'autres amateurs.
Comme les Américains n'y vont pas avec le dos de la cuiller, ils avaient monté quatre tubes UV 204, avec 2000 volts plaque, ce qui  donnait 6 A dans l'antenne et une puissance de 558 Watts.
Par la suite, l'amateur français Léon Deloy, 8AB devait établir la premiÚre liaison  Europe-Amérique, avec 200 watts seulement; il en avait donc que plus de mérite. (9)

A cette Ă©poque, toutes les revues de radio publiaient des articles sensationnels sur la grande rĂ©ussite de ces essais transatlantiques faits par des amateurs qui, en utilisant des puissances relativement petites, avaient traversĂ© l’Atlantique avec des Ondes dites courtes, sur 230 mĂštres, ne riez pas !

Ce rĂ©sultat Ă©tait d'autant plus surprenant, que les grands bonzes de la radio avaient dit et redit que seuls les trĂšs grandes ondes Ă©taient capables de franchir les grandes distances; d'ailleurs, la station de Bordeaux LX qui Ă©mettait sur la longueur d'onde monstrueuse de  23.450 mĂštres et qui avait Ă©tĂ© construite par l'armĂ©e amĂ©ricaine lors de son dĂ©barquement en  France, en Ă©tait la preuve..                                    

AussitĂŽt renvoyĂ© dans mes foyers, avec une culotte de toile blanche et une paire de souliers Ă  clous, je n'avais plus qu'une idĂ©e : monter un Ă©metteur sur ondes courtes de 200 mĂštres et participer a ce concours transatlantique. Le coeur y Ă©tait, mĂȘme beaucoup, mais mon portefeuille Ă©tait d'une minceur qui faisait peine Ă  voir. Le problĂšme technique et mĂȘme financier, pour employer le grand mot, Ă©tait beaucoup plus compliquĂ© que pour monter un rĂ©cepteur.

J'allais souvent rendre visite Ă  l'ami Genin, qui tenait le nouveau magasin de radio "Noir et Blanc" au Boulevard, et j'avais remarquĂ© depuis des mois qu'il exposait dans son magasin un magnifique triplex encadrĂ© oĂč Ă©tait prĂ©sentĂ©e la nouvelle sĂ©rie des lampes bleues ‘FOTOS’.

Ce soir là, lorsque je rentrais chez lui, il avait ce fameux cadre dans les mains et me dit qu'il était fort embarrassé, car il ne trouvait plus une place pour le mettre. Il me demanda si je le voulais, ce que j'acceptai d'emblée, avec un plaisir d'autant plus grand qu'il y avait sur ce tableau 2 lampes dites d'émission.

AussitÎt rentré chez moi, j'essayais les filaments et je constatais avec le plus grand étonnement, que dans les deux lampes d'émission, il y en avait une dont le filament brulait parfaitement bien. Du coup, je me sentis heureux et léger, et déjà je voyais mon émetteur complÚtement terminé.

De ce cĂŽtĂ© lĂ  tout allait bien, il restait maintenant Ă  entreprendre le montage de cet Ă©metteur ondes courtes. En ce temps lĂ , il n'Ă©tait pas du tout question de faire le montage sur un chĂąssis en aluminium et encore moins en rack. Il fallait respecter la sacro-sainte rĂšgle du ‘low-loss’ qui Ă©tait alors Ă  la mode, et pour cela adopter une disposition oĂč il y avait de l'air, mĂȘme beaucoup d'air, surtout pour un appareil destinĂ© aux ondes courtes. Il  fallait aussi, disaient tous les auteurs, que les  connexions soient courtes, ce qui ne cadrait pas trĂšs bien avec le  ‘beaucoup d'air’ mais on y arrivait cependant, car une connexion de 10 cm Ă©tait considĂ©rĂ©e comme courte.

Encore et toujours, pour se soumettre à cette sacrée formule du low-loss, il fallait réduire au strict minimum les piÚces métalliques. A ce sujet, les pontifes de la radio étaient d' accord, le moindre petit morceau d'aluminium créait des pertes effrayantes.

Certains auteurs, parmi ceux qui devaient devenir les grands esprits du journal « L'Antenne Â» (10), avaient vidĂ© des encriers pour dire et expliquer qu’un condensateur variable montĂ© avec flasques mĂ©talliques Ă©tait la cause de pertes formidables. Ceci a durĂ© jusqu'au jour oĂč la marque Pival a sorti des CV entiĂšrement mĂ©talliques, mais isolĂ©s seulement avec deux petits bouts de quartz.

Etant fortement nourri de toutes les thĂ©ories du low-loss, j’avais montĂ© mon Ă©metteur sur une vieille planche Ă  dessin, Ă©metteur assemblĂ© sans clous, donc sans pertes. De cette façon, j'Ă©tais bien certain que toute la haute frĂ©quence allait rester bien sagement dans mon Ă©metteur. Cependant, je n'Ă©tais pas encore au bout de mes peines, il restait Ă  faire les deux bobinages, celui de grille et celui de plaque pour l'entretien des oscillations, comme on disait alors.

LĂ , il n'y avait pas d’autre solution : elles devaient absolument ĂȘtre du type super low-loss. Je les avais donc bobinĂ©es en gros fil en me servant d'une bouteille comme mandrin, puis les spires ainsi obtenues Ă©taient alors vissĂ©es, c'est le cas de le dire, tour par tour dans 4 petites rĂ©glettes en Ă©bonite, dans lesquelles Ă©taient forĂ©s autant de petits trous qu'il y avait de spires. VoilĂ , c'est simple. Seulement, lorsqu'on entreprenait la construction d'une self de ce genre, il ne fallait jamais prĂ©voir d'aller se coucher avant 2 heures du matin, mĂȘme si on avait commencĂ© avant le souper.

Les autres piĂšces, les plus importantes comme le manipulateur, et surtout le fameux thermique d’antenne Ă  fil chaud, la piĂšce essentielle d'une station d'amateur avaient Ă©tĂ© achetĂ©s chez l'autre LĂ©on, celui du Vieux MarchĂ©. Ceci bien entendu, aprĂšs beaucoup de marchandage qui, certains jours, mettaient LĂ©on en colĂšre au point qu'il en avalait son Ă©ternel bout de cigare.

Entre-temps j'avais bobiné le transformateur haute tension sur un circuit métallique constitué par du fil de fer de fleuriste. Une fois terminé, il ressemblait beaucoup plus à une betterave qu'à transformateur, mais ça marchait, surtout si on faisait semblant de ne pas voir la chute de tension.

Finalement le grand jour oĂč j'allais pouvoir mettre la haute tension sur mon Ă©metteur Ă©tait enfin arrivĂ©. C'Ă©tait un auto­-oscillateur du type fort Ă  la mode, un feedback Hartley du genre dĂ©tecteur Ă  rĂ©action, mais en plus puissant. N'ayant pas de redresseuse, j'avais mis les 300 V 50 pĂ©riodes bruts sur la plaque de ma lampe Fotos. De ce fait ma note ressemblait beaucoup plus au bruit que faisait un corbillard en passant sur une rue mal  pavĂ©e, qu'Ă  celle d'un chant d'oiseau ! Mais je mettais 0,4 A dans l'antenne, c'est çà qui avait de l'importance.

Maintenant que j'Ă©tais fin prĂȘt, les grands DX n'avaient qu'Ă  bien se tenir. C'Ă©tait Ă©videmment une illusion, mais c'est ce qui est le plus beau.

Depuis quelques mois dĂ©jĂ , mon rĂ©cepteur avait subi lui aussi, la vague des ondes courtes. Le bobinage d'accord de 2500 spires avait Ă©tĂ© remplacĂ© par un autre bobinage en fond de panier comportant quelques spires seulement, ce qui me permettait d'Ă©couter les premiers amateurs sur 200 mĂštres. En ce temps-lĂ , les indicatifs n'Ă©taient pas prĂ©cĂ©dĂ©s de la lettre prĂ©fixe qui indique le pays, et lorsqu'on entendait un amateur, on ne savait jamais d'oĂč il Ă©tait. Le seul moyen de l'identifier Ă©tait de voir quelle langue il parlait, et comme beaucoup parlaient l'anglais, on n'Ă©tait pas fort renseignĂ©.

PremiĂšre rencontre avec les autres amateurs belges.

Depuis quelques mois, les Ă©missions d'amateurs qui avaient commencĂ© sur 200 mĂštres diminuaient rĂ©guliĂšrement de longueur d'onde et je constatais avec effroi que toutes les semaines je devais enlever une ou deux spires de ma bobine en fond de panier, car chaque semaine aussi les CQ et les Tests se faisaient entendre sur des longueurs d'ondes de plus en plus petites. Je voyais dĂ©jĂ  arriver le jour oĂč je serais obligĂ© d’enlever la derniĂšre spire et alors comment faire!

Des 200 mÚtres, on était descendu à 150, puis 100 et maintenant on était sur 45 mÚtres et ça diminuait toujours.

Un soir que j'Ă©coutais sur 42 mĂštres, j'entendis un CQ de B7, qui arrivait R9 mais RAC, c'est-Ă -dire une note aussi charmeuse que peut ĂȘtre du 50 pĂ©riodes brut. Je passe en vitesse mon inverseur d'antenne sur Ă©mission et pour la toute premiĂšre fois j'utilise mon indicatif tout neuf K2. Il me rĂ©pond, tout va bien, j'arrive aussi trĂšs fort chez lui, mais la curiositĂ© dĂ©vorant les contacts de mon manipulateur, je lui demande immĂ©diatement oĂč il est. Il hĂ©site, fait des sĂ©parations qui n'en finissent plus et finalement me dit ĂȘtre situĂ© dans le haut de la ville.

Seulement comme il y a plusieurs hauteurs autour de Bruxelles, le renseignement Ă©tait fort vague. Je crois qu'il a dĂ» comprendre ma curiositĂ©, car au tour suivant il me passe « rendez-vous mardi 8h, au cercle d'Ă©tudes Palais d'Egmont Â». Je n'avais encore jamais entendu parler de ce cercle, mais je lui rĂ©ponds « d'accord Ă  mardi Â».

Le jour attendu arrive et me voilà perdu à travers les allées du parc du Palais d'Egmont, à la recherche du concierge. Il est 8 heures du soir et il fait noir comme dans un four, pas de concierge et pas de lumiÚre, et toutes les portes sont fermés.

En remontant vers la sortie cĂŽtĂ© porte de Namur, je vais m'emboutir  ­dans le dos d'un Monsieur qui sort d'une porte cachĂ©e par la verdure, je m'excuse et j'en profite pour lui demander oĂč se trouve ce fameux cercle. Il me dit ne pas le connaĂźtre et me conseille de rentrer et de consulter les plaques Ă©maillĂ©es qui se trouvent dans le couloir. LĂ  non plus, pas de lumiĂšre, je gratte une allumette et je vois enfin « Cercle ETC 3Ăšme Ă©tage au fond du couloir Â».

Je monte au 3e, je prends le couloir, toujours pas de lumiÚre. Je marche les bras ouverts pour sentir arriver le mur quand en une fois, je butte dans quelque chose de trÚs solide qui m'arrive juste dans le ventre. J'allume une allumette et je constate que je viens de rentrer dans un billard placé juste au milieu du couloir, ça c'était vache!

L'obscuritĂ© revient puis j'aperçois trois ou quatre mĂštres plus loin un trĂšs faible trait de lumiĂšre, qui sort semble-t-il du trou d'une serrure.  J'ouvre et ça y est c'est bien le cercle, car il y`a un monsieur qui a un casque sur la tĂȘte. Je ne connais personne et de ce fait je salue tout le monde, quand d'un petit groupe Ă  part arrive, quelqu'un qui me demande si je suis K2. Je lui rĂ©ponds affirmativement et il me prĂ©sente aux autres en disant que c'est avec moi qu'il a fait un QSO. Les autres du petit groupe me serrent la main .... mais personne ne me dit son nom. Ca sent le mystĂšre Ă  plein nez. Je parle avec B7 et il me dit que son nom est Hautmont et qu'il habite avenue Albert. Je trouve tout cela naturel et je lui dis qui je suis et que j'habite Jette. Pendant cette conversation, je remarque que tous les autres se sont Ă©clipsĂ©s un Ă  un.

Finalement j’en demande la raison Ă  Hautmont qui me rĂ©pond sans rire, que les autres se mĂ©fient de moi, car ils ont aussi des Ă©metteurs et ils me prennent pour un type des PTT.

Comme tous ceux qui Ă©taient lĂ  et mĂȘme moi faisions de l'Ă©mission sans autorisation, on m'Ă©coute Ă  distance. Motus et bouche cousue! (11)

Je m'explique, je dis ce que je fais et petit Ă  petit la confiance revient. Je leur dis mĂȘme que je reçois trĂšs bien P2, D2, W2 et je demande si ces indicatifs sont ceux d'amateurs belges. Cette demande est accueillie par une franche rigolade et finalement Hautmont me prĂ©sente Pollart, D2. Mais l'autre, celui qui a un genre espagnol, demande Ă  Hautmont de ne pas me dire son indicatif. Nous nous mettons Ă  parler de radio, tout va bien, puis Pollart sort de sa poche son dernier achat: un magnifique manipulateur en bronze massif, l'admire et l'essaye, puis finalement c'est au tour de ‘l'espagnol’ de le prendre. Il fait toujours semblant de ne pas me voir ni de me connaĂźtre. Il rĂšgle la course du manipulateur, puis en une fois et sans s'en rendre compte il se met Ă  manipuler des W2.

Cette fois c'est Ă  moi de sourire et je lui dis: « Mais c'est vous W2 Â». Il a l'air trĂšs ennuyĂ© et son regard ne quitte plus le bout de ses bottines. Il nous quitte en douce et s'en va dans l'autre salle de rĂ©union. Pollart, Hautmont et moi cette fois fraternisons franchement et nous racontons chacun ce que nous faisons et surtout ce que nous avons comme station.

A partir de ce moment, lorsque nous nous rencontrons, le temps passe avec une telle rapidité que les heures ne semblent durer que 10 minutes. C'était d'ailleurs le cas, car je me suis aperçu en une fois qu'il était minuit et que je devais galoper à toute vitesse pour ne pas rater mon dernier tram. On promet de se revoir sans faute le mardi suivant, mais au moment de se serrer la main, plus moyen de retrouver Couppez, W2. Il était parti en douce, et sans rien dire, bien convaincu que j'étais le je ne sais quoi des PTT.

A la rĂ©union suivante les choses se sont arrangĂ©es et Couppez s'est rendu Ă  l'Ă©vidence et nous  sommes devenus de trĂšs bons amis. Mais il avait eu chaud le pĂŽvre! Si mes souvenirs sont bons, nous ne nous sommes rĂ©unis que 3 ou 4 fois au cercle d'Ă©tudes, et chaque fois que nous rentrions c'Ă©tait le mĂȘme enthousiasme dĂ©bordant de gaitĂ© et aussi de bonnes nouvelles.

En effet, au cours de la semaine, chacun de nous avait fait quelque chose de neuf, soit un nouveau QSO avec les stations lointaines qui Ă©taient alors la SuĂšde ou bien un autre avait changĂ© quelque chose Ă  son rĂ©cepteur et on l'entendait dire : « Ă§a alors mon vieux maintenant ça pĂšte des Ă©tincelles Â». Un autre avait fait quelque changement  sur son Ă©metteur, de façon par exemple Ă  mettre plus d'ampĂšres dans l'antenne, ce qui Ă©tait une obsession constante pour un amateur d'alors, car tous d'ailleurs, nous Ă©tions persuadĂ©s, que plus il y avait d'ampĂšres, plus on allait loin. Je me souviens que l'ampĂšremĂštre que j'utilisais Ă©tait un gros machin Telefunken Ă  fil chaud, surplus de la premiĂšre guerre.

Comme il Ă©tait fait pour 4 ampĂšres, j'avais enlevĂ© le shunt, ce qui dĂ©molissait complĂštement l'Ă©talonnage, mais par contre le rendait Ă©normĂ©ment de fois plus sensible, ce qui Ă©tait trĂšs important.             

Malheureusement mes 3 ou 4 petits watts le faisaient dévier que péniblement et avec lenteur, jusqu' au point marqué quatre dixiÚmes d'ampÚres de l'ancienne échelle bien entendu...

J’attribuais son manque de dynamisme non pas Ă  mes 4 watts, mais bien Ă  la grosseur et Ă  la lourdeur de son aiguille, qui ressemblait beaucoup  plus Ă  une flĂšche de la grille du parc de Bruxelles, qu'Ă  une aiguille d'ampĂšremĂštre thermique. Finalement je l'ai sorti de son boitier et avec une paire de ciseaux Ă  ongle de mon pĂšre, j'ai diminuĂ© sa largeur de moitiĂ© et  la flĂšche du quart de ce qu'elle Ă©tait.

Mais ça n'a rien changé, hélas j'avais 4 dixiÚmes d'ampÚres aprÚs comme avant. C'était une désolation. Par contre, qu'est ce que j'ai pris comme en.....guirlandes

quand mon pĂšre a revu ses ciseaux, qui Ă©taient devenus lĂ©gĂšrement concaves ! En ce temps lĂ , lorsque nous entendions un amateur AmĂ©ricain, c'Ă©tait toute une affaire, surtout s'il se trouvait loin des cĂŽtes.

A plus forte raison lorsqu'on entendait un amateur de Nouvelle Zélande, on pouvait dire que c'était du tout grand DX. Ne riez pas! Le signal sortait d'une détectrice plus une basse fréquence; soit 2 tubes. Ce n'était déjà pas facile à faire et en plus des difficultés cÎté récepteur, il y en avait une autre qui était encore plus importante. En effet, par suite du décalage horaire, si on voulait entendre quelque chose, il fallait se lever à 4 heures du matin, ce qui n'était pas une mince affaire.

Chaque mardi soir, à la réunion nous étions tous bien d' accord de nous lever le lendemain matin à 4 heures. Seulement lorsque le réveil sonnait en pleine nuit et que l'on s'était couché vers 1 heure du matin, il fallait pour se lever un courage que je ne sais décrire.

Un matin, Pollart nous a racontĂ© qu'au cours de la semaine il avait pris la ferme rĂ©solution de se lever pour Ă©couter, et pour que sa volontĂ© ne soit pas contrariĂ©e par son envie de dormir, il avait pris la prĂ©caution de placer son rĂ©veil Ă  l'autre bout de sa chambre. De cette façon il Ă©tait bien obligĂ© de se lever pour l'arrĂȘter. Malheureusement, lorsque son rĂ©veil sonna Ă  une heure aussi indue, pourrait-on dire, il lui envoya son oreiller avec une telle vivacitĂ©, que non seulement le rĂ©veil bascula de l'autre cĂŽte de la table, mais aussi un verre et carafe qui se trouvaient dans les environs, tout ça avec un bruit de tonnerre qu'il eut beaucoup de mal Ă  justifier le lendemain matin au dĂ©jeuner.

De mon cÎté, j'avais fabriqué un systÚme de sonnerie électrique qui se déclenchait avec la sonnerie du réveil. C'était parfait, parce que si je ne me levais pas, ça continuait à sonner.

Malheureusement là aussi il y avait un défaut. Un matin, mon pÚre m'a dit qu'il ne voyait pas pourquoi je devais faire de l'émission avec cette sonnerie qui réveillait toute la maison.

Un mardi que nous Ă©tions rĂ©unis au cercle, un nouveau, pas encore vu, arriva. Il avait le verbe facile et l'accent de la butte, c'Ă©tait Louvet 8SSN. (12) Nous Ă©tions donc maintenant Ă  cinq et Ă  chaque rĂ©union nous formions un petit groupe Ă  part, dans un des coins des deux mansardes qui formaient le local du cercle d'Ă©tudes. Je dis Ă  part, car Ă  ce moment lĂ , le cercle connaissait une grande activitĂ© du fait d'un grand nombre de membres nouveaux, mais tous des BCL. Ceci, provenait de ce que Radio Belgique venait de commencer ses Ă©missions et comme l'Ă©metteur se trouvait rue de Stassart, donc juste en face du Palais d'Egmont, Ă  chaque rĂ©union il y avait une grande foule pour venir assister Ă  l'expĂ©rience fantastique qui consistait Ă  recevoir Radio Belgique sur cadre et avec un poste Ă  galĂšne. Nous avons souvent entendu dire par les BCL d'alors, que ce qui les Ă©tonnaient le plus, ce n'Ă©tait pas la rĂ©ception sur cadre, mais que les ondes traversaient mĂȘme les murs.

Une fois 10 heures du soir, Radio-Belgique cessait ses émissions, et comme il n'y avait plus rien à écouter, les membres BCL (pas nous bien sûr), commençaient des discussions qui n'avaient que de trÚs lointains rapports avec la TSF. Ce soir là par exemple, ils avaient commencé une grande discussion sur les mérites respectifs des lapins angoras, au point de vue poids du poil. Nous n'étions pas contraires bien sur, mais ça ne nous intéressait absolument pas.

Aussi quand Hautmont proposa d'aller prendre un verre dans un des cafĂ©s Ă  la Porte de Namur, et de continuer lĂ  en toute tranquillitĂ© nos explications sur la finesse de doigtĂ© et les astuces nĂ©cessaires pour le dĂ©culottage des lampes TM afin de les rendre plus sensibles sur ondes courtes, tout le monde fut d' accord. La perspective d'ĂȘtre assis devant une table, avec quelque chose Ă  boire Ă©tait irrĂ©sistible. Nous sommes donc partis tous les cinq par la sortie du Palais d'Egmont cĂŽtĂ© Porte de Namur.

Dans ces temps là, il y avait déjà autant de cafés que maintenant, mais beaucoup moins de lumiÚre et de ce fait beaucoup plus d'YL, qui dans les coins, essayaient de faire des QSO visu, mais ça ne nous intéressait absolument pas.

D'ailleurs, il n'y avait qu'une sorte de liaison qui nous intéressait, c'était celle des ondes courtes, et dans ce genre, les belles YL ne savaient pas encore osciller.

D'ailleurs si on se souvient que l'abrĂ©viation T.S.F. veut dire « Type sans femmes Â», nous en Ă©tions tous les cinq bien convaincus, n'ayant vraiment pas de notre temps Ă  consacrer Ă  une autre passion que celle de la radio. Nous prĂ©fĂ©rions faire osciller une lampe qu'une YL. Bien que depuis nos prĂ©fĂ©rences ont beaucoup changĂ©.

Une fois sorti du palais d'Egmont, nous n'avions que le boulevard à traverser pour arriver au café situé juste en face, mais pendant ce court trajet nous devions passer à cÎté du pissodrome au jet d'eau puissant et sympathique et comme nous venions de passer deux heures debout, son utilité se faisait fortement sentir. Comme il n'y avait que deux places, Pollart et moi nous rentrions les premiers, pendant que Hautmont expliquait aux deux autres la théorie du condensateur shunté, en faisant le schéma du bout de sa chaussure sur la terre du boulevard.

Pendant que nous accomplissions cette noble fonction, maintenant mise Ă  l'honneur par Clochemerle, Pollart appelle les autres et leur dit: "Mais au fait, pourquoi ne fonderions nous pas le  « RĂ©seau des Deux Â»? (13) Cette idĂ©e toute neuve fut accueillie avec le plus grand enthousiasme. Nous Ă©tions tous bien d' accord, il fallait crĂ©er le rĂ©seau des Deux et c'est en discutant dĂ©jĂ  des futurs statuts que nous sommes dirigĂ©s vers le cafĂ© des "Deux BĂ©casses".

Pollart venant de prononcer des paroles historiques et de ce fait devenait à jamais le premier fondateur de l’U.B.A.

Fondation du Réseau Belge. (14)

Si mes souvenirs sont exacts, ceci se passait en fĂ©vrier 1925 et cette date serait donc celle oĂč fut commencĂ© Ă  Bruxelles, le premier groupement des amateurs Ă©metteurs belges.

L'idĂ©e de Pollart avait dĂ©jĂ  fait beaucoup de chemin depuis le mardi prĂ©cĂ©dent. De son cĂŽtĂ© il avait alertĂ© tous ceux qui au cercle d'Ă©tudes faisaient oĂč avaient envie de faire de l'Ă©mission. Notre premiĂšre idĂ©e n'avait pas Ă©tĂ© de faire un groupement genre "sociĂ©tĂ©" mais au contraire de former rapidement un groupement actif et de l'annoncer dans toutes les revues de radio, ceci avec l'espoir de connaĂźtre les amateurs Belges qui pouvaient exister et que nous ne rencontrions pas aux rĂ©unions du cercle d'Ă©tudes.

Ceci Ă©tait d'autant plus urgent que les essais transatlantiques allaient commencer et que nous  dĂ©sirions y participer en tant qu'amateurs Belges, et ceci de la mĂȘme façon officielle que les amateurs Français et Anglais. Seulement pour cela il fallait que nous soyons groupĂ©s et non isolĂ©s.

Donc le mardi suivant, réunion du tonnerre aux "Deux Bécasses". Chacun avait des idées grandes comme ça sur ce que nous allions faire. Il fallait avant toutes choses un président, un trésorier, et un trafic manager.

Pour le reste des autres fonctions, chacun de nous Ă©tait prĂȘt Ă  faire n'importe quoi. Il y avait de la bonne volontĂ© Ă  revendre. Cela marchait bien. Vers les 9 heures du soir, Pollart va au cercle qui Ă©tait en face, chercher les futurs manitous, car il y avait maldonne sur l'endroit de notre rĂ©union. Il revient et me prĂ©sente un grand monsieur mince qui fumait la pipe : c'Ă©tait Mussche 4BK, que je n'avais pas encore vu. Il me prĂ©sente un autre monsieur mince qui ne fumait pas, c'Ă©tait Deloor, P2.

Pendant  le trajet du cercle aux "Deux BĂ©casses" soit la largeur du boulevard, Pollart avait dĂ©jĂ  tout expliquĂ© Ă  Mussche et Ă  Deloor, et comme Deloor venait de faire le premier QSO Belgique-AmĂ©rique du Nord, il avait Ă©tĂ© bombardĂ© d'office PrĂ©sident. (15)

Comme Mussche Ă©tait dĂ©jĂ  trĂ©sorier du cercle d'Ă©tudes, nous lui proposons mine de rien, d'ĂȘtre trĂ©sorier. Il accepte Ă©videmment, puis de 9h Ă  minuit et demi nous parlons sans arrĂȘt, au point que Mussche ne trouve mĂȘme plus le temps d'allumer sa pipe, ce qui Ă©tait trĂšs grave.

Ici une virgule dans ce texte, pour expliquer comment Mussche et Deloor se sont connus. Depuis déjà tout un temps ils écoutaient tous les deux les émissions de la premiÚre station de broadcasting anglaise 2LO au moyen d'une détectrice réaction.

Un soir, juste aprĂšs la fin du programme, Deloor entend le sifflement caractĂ©ristique de la dĂ©tectrice de Mussche, puisqu'ils Ă©taient sur la mĂȘme frĂ©quence, pardon la mĂȘme longueur d'ondes comme on disait. Puis Deloor dĂ©fait le fil qui va au + HT et il se met Ă  manipuler du morse. Mussche lui rĂ©pond et pendant toute cette parlotte, ils se donnent rendez-vous pour le lendemain midi Ă  la`BarriĂšre de St Gilles. Au moment de ce QSO, Deloor avait une tension plaque de 20 volts sur sa dĂ©tectrice et Mussche en avait environ 40.

Il est vrai que ses ondes devaient remonter vers la BarriÚre de St Gilles et que le trajet était plus difficile.

Nos rĂ©unions du mardi soir au cafĂ© des deux bĂ©casses n’ont durĂ© que deux oĂč trois semaines, pour le motif suivant: Lorsque deux amateurs se rencontrent, Ă  peine ont-ils parlĂ© quelques minutes, que la discussion devient trĂšs compliquĂ©e et il faut toujours qu’ils fassent un schĂ©ma pour mieux s’expliquer. Malheureusement, c’est toujours Ă  ce moment lĂ  que personne n’a le moindre petit bout de papier en poche. Il en Ă©tait de mĂȘme Ă  chaque rĂ©union “Aux deux BĂ©casses”, et de ce fait nous Ă©tions bien obligĂ©s de faire nos schĂ©mas sur les belles tables en marbre blanc.

Seulement, le patron  du cafĂ© n’a pas trouvĂ© notre façon de faire Ă  sa convenance, ce qui explique qu’un mardi soir, vers les 9 heures ça a bardĂ© et nous sommes tous partis; enfin quand je dis tous, nous n’étions que cinq et le vide n’a pas Ă©tĂ© bien grand. Nous sommes sortis trĂšs dignes, bien persuadĂ©s que nous avions raison: il y a dans la vie d’un boss de cafĂ©, des clients qui sont vraiment difficiles Ă  comprendre et nous Ă©tions de ceux lĂ .

Une fois sur le trottoir, nous avions bonne mine, car nous ne savions vraiment pas oĂč aller passer le reste de notre rĂ©union, et tout en continuant une discussion trĂšs animĂ©e sur  la meilleure façon de transformer un accu Tudor de 80V en soupape Ă©lectrolytique, en utilisant les petits tubes en verre, nous sommes arrivĂ©s finalement devant l’ancien cafĂ© oĂč se trouve maintenant le cafĂ© de l’Horloge.

Nous y sommes rentrĂ©s mais le genre ne nous convenait pas, il n’y avait pas de petits coins tranquilles pour nos discutions et de plus on voyait les autres clients qui nous regardaient comme si nous Ă©tions des phĂ©nomĂšnes. Nous sommes sortis vers 11 heures, sans savoir oĂč nous pourrions passer le reste de la soirĂ©e. Nous nous sommes dirigĂ©s vers la fontaine de la Porte de Namur afin de condenser tous les cinq nos pensĂ©es pour savoir oĂč nous allions aller. C’est Ă  ce moment qu’Haumont a subitement retrouvĂ© le souvenir d’un petit cafĂ© bien tranquille disait-il oĂč, avec d’autres Ă©tudiants, il allait boire des pots. C’était le cafĂ© de la Lunette, place de la Monnaie. Son idĂ©e fut immĂ©diatement adoptĂ©e Ă  l’unanimitĂ© avec dĂ©cision de descendre Ă  pied. Hautmont Ă©tait un type capable de transformer un neurasthĂ©nique en bon vivant en moins de deux, et pour montrer son contentement, il se met Ă  marcher sur le bord assez surĂ©levĂ© de la fontaine, mais en une fois son pied dĂ©rape et en moins de temps qu’il faut pour l’écrire, il glisse vers l’intĂ©rieur du bassin qui Ă©tait en forte pente et heureusement sans eau, et va embrasser de pleine figure  la statue qui se trouve au milieu.

Dans le fond du bassin il avait glissĂ© dans une affreuse berdouille de vase et il lui Ă©tait impossible de reprendre pied pour en sortir. Nous avons nouĂ©s deux Ă©charpes ensemble et tant bien que mal nous l’avons ramenĂ©, c’est alors que nous avons constatĂ© qu’il avait glissĂ© sur son derriĂšre et que le bas de son pardessus ainsi que le fond de sa culotte Ă©taient remplis d’une espĂšce de mĂ©lasse gluante, mĂ©langĂ©e Ă  quelques chose qui ressemblait Ă  des Ă©pinards mal cuits. Nous l’avons aidĂ© Ă  se remettre dans un Ă©tat potable puis le cƓur lĂ©ger et le sourire aux lĂšvres nous sommes partis vers le cafĂ© de la Lunette.

Ce petit cafĂ© existe toujours dans un des coins de la place, mais il a Ă©tĂ© transformĂ©   depuis en un Ă©tablissement moderne avec comptoir frigo. Vers 1925, quand nous y sommes arrivĂ©s pour la premiĂšre fois, c’était le vieux cafĂ© bruxellois rĂ©putĂ© dans toute la Belgique pour ses verres oĂč il y avait une sĂ©rie de petits trous vers le dessus, et celui que l’on invitait et qui ne connaissait pas le truc se mettait Ă  baver comme une fontaine chaque fois qu’il voulait boire, d’oĂč franche rigolade de leur part.

Dans le fond du cafĂ© il y avait un escalier raide et qui tournait, Ă  croire que le menuisier l’avait dessinĂ© en plaçant son coude sur un papier. La « salle » de rĂ©union comme nous l’appelions, avait environ 3 mĂštres de largeur sur 4 ou 5 mĂštres de longueur. DĂ©tail typique, le plancher Ă©tait incurvĂ© au milieu avec un angle tellement grand qu’il fallait choisir une table dans un coin si on ne voulait pas qu’un verre bien rempli se vide en partie dans la soucoupe. A part ces quelques dĂ©tails, c’était le coin rĂȘvĂ© pour nos rĂ©unions. Nous y Ă©tions bien tranquilles et de plus, les laits russes Ă©taient bien servis et prĂ©parĂ©s avec du lait frais, chose qui avait une grande importance pour nous tous, car de l’avis de tous les amateurs de l’époque, ce doux breuvage n’avait pas son Ă©gal pour Ă©claircir les idĂ©es  lors des grandes discussions techniques sur la façon de faire osciller une A415 avec 6 tours Ă  la self de plaque, quant il n’y en avait que pĂ©niblement  4 dans la grille.

De plus toutes les tables étaient en marbre, blanc douteux, car elles étaient passablement usées par des milliers de verres qui leur avaient fait du pied.

Cependant avec de solides crayons Ă  l’aniline, que nous trempions dans les restes de soucoupes, nous parvenions quand mĂȘme Ă  tracer des schĂ©mas bien lisibles.

Un jour, Max Cosyns, B9 (16) nous a expliquĂ© en dĂ©tail le standard de frĂ©quence qu’il voulait construire, en utilisant des roues de  vieux rĂ©veils matins, ses explications et les nĂŽtres ont Ă©tĂ© tellement longues et compliquĂ©es, que nous avons Ă©tĂ© obligĂ©s de changer de table, il n’y avait plus de place  sur la premiĂšre pour continuer le schĂ©ma.

Ces réunions de la Lunette ont été les plus beaux mardis de notre vie, car nous pouvions parler de radio de 8 heures du soir à 1 heure du matin, et puis aussi parce que nous avions 20 ans.

Depuis la radio a bien changĂ© et nous aussi d’ailleurs. Maintenant nous  avons 50 ans et pourtant certains d’entre nous ont encore le microbe aussi virulent.

Lorsque nous manipulons, les points barres sont peut-ĂȘtre moins dĂ©tachĂ©s et au micro notre voix est plus grave qu’il y a 30 ans, mais il ne faut pas oublier qu’entretemps nous nous sommes mariĂ©s et ce qui est le rĂ©sultat le plus extraordinaire, c’est que nous avons continuĂ© Ă  faire de l’émission  malgrĂ© l’avis souvent contraire de nos femmes; ce qui prouve que notre marotte de faire de la radio Ă©tait une chose sĂ©rieuse et une idĂ©e absolument continue.

A ces premiĂšres rĂ©unions de la Lunette il y avait Pollart, D2; Hautmont, B7; Couppez, W2; Deloor,  P2; Mussche, BK; et moi (K2), et a chaque liaison que faisions avec un autre amateur belge nous ne manquions pas de lui dire de venir le vendredi soir aux rĂ©unions des amateurs du RĂ©seau Belge. C’est ainsi que quelques temps aprĂšs nous Ă©tions plus de dix  et chaque semaine il y en avait des nouveaux. Je me souviens trĂšs bien de l’arrivĂ©e de Janssens, 4BZ; Cosyns, B9; Stainier, S2; Ocreman Gowy,4PU; Mathieu, 4AU; Koninckx,4VK; de Neck 4UU et une foule d’autres, a tel point qu’il y avait des vendredis oĂč les deux petites lampes d’éclairage de 40 Watts n’arrivaient plus Ă  faire de la lumiĂšre, tellement il y avait de la fumĂ©e de cigarettes.

En plus de ceci, lorsque nous Ă©tions rĂ©unis Ă  15 ou 20 dans les 15 mĂštres carrĂ©s de la Lunette, le QRM Ă©tait si violent que le soir nous sortions tous avec un mal de gorge bien caractĂ©ristique, tellement il fallait parler fort pour se faire comprendre. Chaque vendredi il y avait des discussions sans fin, mais lĂ  c’était permis. Chacun expliquait avec schĂ©ma dessinĂ© sur les tables de marbre, les ennuis et les avantages des schĂ©mas d’émetteurs en vogue Ă  ce moment lĂ . L’un Ă©tait un fervent du Mesny, l’autre du Hartley et heureusement il n’y avait pas encore d’oscillateur avec cristal, car il me semble   que notre vie entiĂšre aurait Ă©tĂ© nĂ©cessaire pour discuter d’un montage aussi compliquĂ©.

Chacun avait son dada dans ces discussions. Deloor savait nous faire baver lorsqu’il nous parlait de son rĂ©cepteur Schnell avec lequel il recevait les amateurs du monde entier, alors que nous n'en entendions que quelques uns et encore lorsque la propagation Ă©tait vraiment bonne.

De plus, comme il n’avait que du courant continu chez lui, il avait trouvĂ© le moyen d’alimenter une et mĂȘme deux Flieg sur son secteur de 220V et par ce systĂšme fort ingĂ©nieux, il avait rĂ©solu le problĂšme de la haute tension. Mais ceci est une autre histoire dont je parlerai plus loin, car les Flieg de Deloor valent Ă  elles seules une page historique de la radio d'amateur avec moult belles histoires d’attaches en caoutchouc au plafond de sa mansarde.

Cosyns Ă©tait le mathĂ©maticien qui chaque vendredi trouvait la solution Ă  tous nos problĂšmes, en quatre coups de rĂšgle Ă  calculs. La haute frĂ©quence ne suivait pas toujours ses prĂ©visions mais avec son aide nous Ă©tions dĂ©jĂ  sur le sentier qui devait nous conduire Ă  l’autostrade oĂč nous pensions pouvoir arriver malgrĂ© tout, Ă  mettre 4 ampĂšres sur l’antenne, avec 500 petits volts sur la plaque d’une RS5, c’est Ă  dire faire un miracle. Pollart nous parlait de son Ă©metteur Mesny qu’il avait installĂ© dans sa chambre, avec un grand luxe d’appareils de mesure, et des interrupteurs Ă  couteaux capables de couper 30 ampĂšres avec plus de facilitĂ© que le fil Ă  couper le beurre.

Son entrĂ©e d’antenne Ă©tait un impressionnant isolateur en Pyrex, qui passait Ă  travers un des carreaux de la fenĂȘtre, et lorsque l’on arrivait chez lui, on avait nettement l’impression d’ĂȘtre devant une station de 2KVA.

Couppez Ă©tait le mĂ©ticuleux qui ne laisse rien au hasard, aussi avait-il une belle station. Cependant il Ă©tait constamment tracassĂ© par les rĂ©sultats mirobolants de Deloor, qui avec son rĂ©cepteur recevait des AmĂ©ricains Ă  la pelle, alors que lui n’en entendait pas. Il   dĂ©cide donc un jour de venir chez Deloor avec son rĂ©cepteur sous le bras, pour bien se rendre compte de ce qui n’allait pas.

Une fois les deux rĂ©cepteurs essayĂ©s sur la mĂȘme antenne, il se rendit Ă  l’évidence que sa dĂ©tectrice faisait ‘’ploc’’ Ă  la limite du dĂ©crochage, alors que celui de Deloor avait le dĂ©crochage bien caractĂ©ristique d’un soupir d’ingĂ©nue dans les bras d’un satyre.

Ce sont des souffles qui se ressemblent, mais il y a une nette diffĂ©rence par celui produit dans une dĂ©tectrice Ă  rĂ©action. Tous les deux se mettent en manche de chemise, et hop, aprĂšs quelques heures d’escrime au fer Ă  souder, le rĂ©cepteur de Couppez marchait cette fois  aussi bien que celui de Deloor. Couppez rentre chez lui, branche ses accus, puis attend patiemment que minuit arrive pour se rendre compte si cette fois   il allait enfin recevoir des AmĂ©ricains. Il en reçoit tellement qu’il reste Ă  l’écoute toute la nuit et fait par la mĂȘme occasion son premier QSO Belgique-AmĂ©rique. C’est alors que les AmĂ©ricains lui ont dit qu’ils l’entendaient depuis tout un temps dĂ©jĂ  et qu’ils l’appelaient souvent et comme son rĂ©cepteur ne fonctionnait pas bien, il ne les entendait pas. VoilĂ  comment on rate bien souvent un beau DX.

AprĂšs cette victoire Couppez dĂ©cide de photographier sa station, et pour que se soit une photo d’art, il invite Louvet Ă  venir lui donner un coup de main. (17)

Tout est bien en ordre, le rĂ©cepteur, le log book, le crayon, une montre posĂ©e contre le bord de la table. Couppez sort son appareil sur pied, puis disparaĂźt en dessous du drap noir et fait la mise au point pendant lequel Louvet prĂ©pare la charge du magnĂ©sium sur un bout d’aluminium. Ne sachant ni l’un ni l’autre ce qu’il fallait mettre comme charge, ils dĂ©cident de mettre une cuillĂšre Ă  cafĂ© de magnĂ©sium pour le premier essai. On fait la photo et Couppez se prĂ©cipite dans la chambre noire pour contrĂŽler l’effet. DĂ©veloppement, et aprĂšs un quart d’heure aucune trace n’apparaĂźt sur la plaque dite sensible. On recommence mais avec deux cuillĂšres Ă  cafĂ© de magnĂ©sium cette fois. MĂȘme rĂ©sultat, c’est-Ă -dire rien ! Couppez qui veut absolument cette photo dĂ©cide d’en refaire une troisiĂšme et verse cette fois tout ce qui reste de magnĂ©sium, ce qui reprĂ©sente un beau petit tas. Tout est prĂȘt, on allume, et dans une dĂ©tonation du tonnerre, le rideau de la fenĂȘtre se roule comme un serpent de mer qui se promĂšne au plafond pendant tout un moment. Couppez et Louvet sont tous les deux Ă  moitiĂ© assommĂ©s par la dĂ©flagration et lorsqu’ils se dĂ©cident Ă  refaire de la lumiĂšre, Couppez part d’un Ă©clat de rire en voyant que Louvet Ă  la figure toute noire et automatiquement  Louvet se met Ă  rigoler de voir la tĂȘte de Couppez qui a la mĂȘme couleur.

Tant bien que mal on remet tout en place, puis on dĂ©veloppe la plaque, mais malheurs de malheurs il n’y avait rien dessus. Ce n’est  qu’alors qu’ils se sont aperçus que chaque fois ils oubliaient  d’ouvrir le volet du chĂąssis qui contenait la plaque.

J’ai dĂ©jĂ  dit que ce qui Ă©tait le plus compliquĂ© Ă  rĂ©aliser pour nous autres, amateurs de cette Ă©poque, c’était de redresser 4 ou 500V-100mA pour alimenter la plaque de la lampe finale. Elle Ă©tait toujours plus gourmande de HT qu’il n’y avait de sous dans notre poche. A ce point de vue lĂ , Hautmont qui Ă©tait alors Ă©tudiant aux Arts et MĂ©tiers, avait trouvĂ© une solution toute neuve et fort spĂ©ciale, qui doit ĂȘtre restĂ©e unique en son genre. Dans ses diffĂ©rents cours d’électricitĂ©, il avait vu que les gros redresseurs Ă©taient Ă©quipĂ©s de lampes Ă  vapeurs de mercure. Hors, un jour qu’il Ă©tait chez un Ă©lectricien du voisinage qui lui demandait de temps en temps   de rentrer avec lui dans les cabines Ă  6000V, car l’électricien n’osait pas y entrer seul, celui-ci lui montra une lampe Ă  cornes dans laquelle il y avait une bonne tasse de mercure qui se baladait dans tous les sens quand on la dĂ©plaçait.

D’aprĂšs l’électricien, cette lampe Ă©tait utilisĂ©e dans les sous marins allemands de l’autre guerre, pour redresser le courant alternatif.

AprĂšs des marchandages dont seul Hautmont avait le secret, il parvint Ă  emporter cette lampe pour un prix qui n’était pas supĂ©rieur Ă  l’argent qu’il avait en poche. C’est Ă  dire pour deux fois rien. SitĂŽt rentrĂ© chez lui il n’a plus qu’une idĂ©e “Mettre le jus sur cette lampe” pour voir  ce qui allait se passer.

C’était vite dit, mais comme il n’avait que du 220V alternatif et rien en dessous de cette valeur, il tremblait quand mĂȘme un peu de voir sa lampe se volatiliser avec un “flash” du tonnerre, au moment oĂč il aurait mis le 220V, sur les deux petites Ă©lectrodes. J’oublie de vous dire que cette lampe  avait la forme d’une poire conçue par le St Esprit et de ce fait indĂ©finissable. Elle pouvait se reprĂ©senter par une boule allongĂ©e de 8 cm de diamĂštre terminĂ©e en dessous par un tube de 4 cm, puis encore en dessous une nouvelle boule plus petite, dans laquelle Ă©tait le mercure. Sur la grosse boule il y avait deux Ă©lectrodes Ă  tĂ©tons en cuivre rouge qui traversait le verre de la lampe et qui ne touchait Ă  rien. Dans la petite boule il y avait Ă©galement deux Ă©lectrodes qui ne touchaient pas le mercure, mais en dessous il y en avait une troisiĂšme qui elle Ă©tait en contact avec le mercure. Suivez bien et vous allez vous rendre compte que ce que GalillĂ© Ă  dĂ©couvert n’était presque rien Ă  cĂŽtĂ© de ce que

Hautmont avait pensĂ©. Il s’était thĂ©oriquement dit ceci : ” Si je trouve la tension qu’il faut appliquer aux deux petites Ă©lectrodes, pour arriver Ă  amorcer un arc, sans envoyer ad patres toute la lampe, je vais faire chauffer le mercure, d’oĂč production de vapeur de mercure dans le haut de cette sacrĂ©e lampe, et alors lorsque j’appliquerai de la haute tension sur les deux Ă©lectrodes du dessus, je vais redresser le courant”. N’ayant pas de transfo capable de dĂ©biter  tous les ampĂšres qu’il fallait pour arriver Ă  faire l’arc qui allait chauffer le mercure, il a dĂ©cortiquer un vieux transfo “Ferrix”, puis l’a rebobinĂ© avec du fil de 20/10 au secondaire en ayant soin de faire quelques prises symboliques d’ailleurs, car il n’avait pas de voltmĂštre pour mesurer les tensions.

Une fois le transfo terminĂ©, prĂ©paration de quelques bouts de fils dĂ©nudĂ©s aux deux bouts, arrĂȘt de quelques secondes pour allumer une cigarette, car se disait-il il vaut mieux ĂȘtre en forme pour une expĂ©rience de ce genre. Puis il raccorde la lampe au transformateur et dans une trouille intense il tourne l’interrupteur qui met le jus sur cette installation historique. Rien ne se passe, pas d’arc, pas de vapeur et de  fait rien. Pendant qu’il se demande ce qui ce passe, et ceci sans quitter le mercure des yeux, il sent une odeur caractĂ©ristique de transfo qui dĂ©passe le point de roussissage du coton; il se  retourne en vitesse pour couper le courant, mais en faisant ce geste il accroche un des fils qui va Ă  la lampe de mercure, elle bascule , le mercure gigote et vlan! L’arc s’amorce, Hautmont en reste comme deux ronds de flan, sidĂ©rĂ©, Ă©tonnĂ© au point qu’il ne se rend  compte  qu’aprĂšs coup, que sa chambre est Ă©clairĂ©e par une lumiĂšre extrĂȘmement forte et il se rend compte que pour amorcer l’arc il faut basculer la lampe de façon que le mercure quitte une des Ă©lectrodes d’amorçage. Il coupe le courant mais il se sent tellement faible qu’il doit s’asseoir, ses jambes ne le supportent plus, l’émotion avait Ă©tĂ© trop forte.

Hautmont a toujours gardĂ© de cette expĂ©rience un souvenir extraordinaire  et il l’a classĂ© dans les bons moments de son existence. Chaque amateur a ainsi une collection de bons moments qui se sont produits Ă  l’époque hĂ©roĂŻque de la radio, et lorsque nous nous en souvenons, ils font renaĂźtre des souvenirs, qui, blague dans le coin, sont plus vivaces que la premiĂšre photo de notre fiancĂ©e.

Maintenant que Hautmont avait dĂ©couvert le principe de l’arc dans cette sacrĂ©e lampe Ă  vapeur de mercure, il ruminait en douce de faire un transfo large et haut comme ça, avec une multitude de prises et qui donnerait au moins 2 fois 2000V et 300 milliampĂšres, de façon; Ă  ĂȘtre tranquille une bonne fois avec la question de haute tension.

Ce qu’il avait dĂ©cidĂ© a Ă©tĂ© fait, mais les capitaux nĂ©cessaires Ă  la construction de ce transfo avaient complĂštement vidĂ© son portefeuille, et de ce fait il ne lui restait plus rien pour construire une self de filtrage et encore beaucoup moins pour acheter le fameux condensateur de filtrage, pourtant si nĂ©cessaire, mais qui reprĂ©sentait en ce temps lĂ , les Ă©conomies de plusieurs annĂ©es de vie d’étudiant.

Je me souviens du premier QSO que nous avons fait ensemble un dimanche soir, alors qu’il venait de mettre son nouveau redresseur en service. La note qu’il avait pouvait ĂȘtre qualifiĂ© d’indĂ©finissable. Il y avait du 50 pĂ©riodes mĂ©langĂ© avec du 100, plus un fond de souffle qui ressemblait au suintement que fait une seringue lorsque l’on appuie  trop fort en une fois, et pour une note bien personnelle, on pouvait dire qu’il Ă©tait champion toutes catĂ©gories!

De plus l’expĂ©rience avait montrĂ© que le redresseur Ă  mercure de ce genre avait un inconvĂ©nient assez spĂ©cial. Comme il n’y avait pas moyen de faire autrement et pour plus de sĂ©curitĂ©, Hautmont manipulait dans le primaire de son transfo haute tension, et il arrivait que la lampe ne s’amorçait pas Ă  chaque point ou barre qu’il manipulait.

Je ne sais pas si vous parvenez Ă  vous rendre compte de ce qui se passait, mais imaginez-vous que vous ĂȘtes occupĂ©s Ă  Ă©couter son CQ, puis en une fois c’est la premiĂšre barre du C qui manque ou bien la deuxiĂšme barre du Q et ainsi de suite pendant tout son appel, Ă  tel point que l’on se demandait  ce que vraiment il manipulait.

A ce grave défaut prÚs, son redresseur marchait bien, mais les points et les barres qui manquaient rendaient un QSO fort difficile.

L’imagination d’un amateur est sans limites et voici ce qu’il a trouvĂ© comme remĂšde.

Dans le circuit de l’arc, il avait dĂ©jĂ  placĂ© une self en sĂ©rie destinĂ©e Ă  crĂ©er un dĂ©phasage entre la tension d’amorçage et la tension Ă  redresser, mais le rĂ©sultat n’était pas meilleur. Vers cette Ă©poque Hautmont avait un rĂ©cepteur qui marchait du tonnerre, et il entendait depuis une semaine dĂ©jĂ  les amateurs NZ de  Nouvelle ZĂ©lande, c’est Ă  dire la plus formidable distance que l’on pouvait faire en trafic d’amateur. Vous pouvez vous rendre compte maintenant si Hautmont avait des battements de cƓur qui faisait chavirer son crayon lorsqu’il Ă©crivait les CQ et tous les indicatifs qu’il entendait chaque nuit entre 4 et 6 heures du matin et que, en raison de son redresseur haute tension Ă  fonctionnement intermittent, il ne pouvait pas appeler.

Une nuit, aprĂšs avoir tripotĂ© son redresseur, depuis 10 heures du soir jusque vers 4 heures du matin sans trouver de continuitĂ© Ă  son fonctionnement, il a en une fois trouvĂ© un systĂšme qui n’était peut ĂȘtre pas trĂšs Ă©lectrique mais qui fonctionnait trĂšs bien. Chaque fois que sa lampe Ă  mercure ne voulait pas amorcer il fallait lui donnĂ© une petite secousse et c’est alors qu’il a imaginĂ© de prendre une corde, d’en attacher une des extrĂ©mitĂ© Ă  la lampe et l’autre Ă  sa cheville; ainsi chaque fois qu’elle dĂ©samorçait, hop, un petit coup de pied et tout se remettait en marche sans devoir se lever de sa chaise, car sa lampe donnait une lumiĂšre tellement violente qu’il avait dĂ» la placer dans un coin de sa chambre et de la cacher par une planche Ă  dessin .

VoilĂ  comment Hautmont a fait le premier QSO Belgique Nouvelle-ZĂ©lande
..   (18)                        .

Cet article revu et corrigĂ©, publiĂ© Ă  l’origine dans les revues ‘QSO’ de mars 1955 Ă  juillet/aoĂ»t 1956, fut Ă©crit par Hugo De Meyere 30 ans et plus aprĂšs la rĂ©alitĂ© historique. Il contient des Ă©lĂ©ments non vĂ©rifiables et/ou erronĂ©s. Je considĂšre dĂšs lors ce texte comme anecdotique, plaisant Ă  lire mais historiquement peu fiable.  (ON4PS - 01/2019)   


Notes additionnelles aux ‘Souvenirs de ON4TI’

(1) L’amplificateur Ă  3 lampes modĂšle ‘3TER’ (A) pouvait ĂȘtre utilisĂ© pour la rĂ©ception des signaux de T.P.S. (TĂ©lĂ©graphie par le sol – annexe 1) et pour la dĂ©tection et l’amplification des signaux de T.S.F. Il fut mis en service en 1916. Des modifications (supports de lampes suspendus et coffret diffĂ©rent) furent apportĂ©es (B) qui permirent d’éliminer l’effet microphonique dĂ» aux chocs lors des bombardements.

               Source : http://tsfls.pagesperso-orange.fr/guerre14.htm

(2) Hugo De Meyere fait rĂ©fĂ©rence ici d’une part aux Établissements M. de Wouters, 16 rue PlĂ©tinckx (Succursale de vente : 99, rue du MarchĂ©-aux-Herbes et Usine : 78, rue de la Caserne) et d’autre part, Ă  la Maison Carez, 12, rue Plattesteen. (Bruxelles). Avant la premiĂšre guerre mondiale, les rĂ©fĂ©rences sont rares : la SRR (SociĂ©tĂ© de Recherches RadioĂ©lectriques) (‘Nous construisons depuis 1910’) ; une publicitĂ© du « Comptoir International de T.S.F »., 188, rue du HĂȘtre , annonce parue dans ‘Radio, Revue mensuelle de TSF’ (juin 1914) ainsi que la ‘P.A.W.’ (Mr. P-A Wenmaekers), 18, rue des Mineurs qui vendait des ‘rĂ©cepteurs de radio pour les signaux horaires de la Tour Eiffel’ (1913). Dans les annĂ©es qui suivirent, les commerces de T.S.F. (piĂšces dĂ©tachĂ©es, postes rĂ©cepteurs
) ont poussĂ© comme des champignons Ă  Bruxelles et il serait quasiment impossible d’établir une liste complĂšte : citons ‘ITAX-Radio’, fondĂ© en 1921 ; ‘Radielec’, 5, rue de l’Arbre ; ‘Radio-Centre’ prĂšs de la Bourse ; la ‘SBR’, 4, rue d’Egmont Ă  ses dĂ©buts ; la ‘CIAC’, 18, rue de la Fontaine ; la ‘SociĂ©tĂ© Anonyme Internationale de TSF’, 13, rue Brederode ainsi qu’un nombre encore plus important de ‘petits’ rĂ©parateurs de matĂ©riel et appareillages Ă©lectriques.

(3) Dr. Pierre Corret : « TĂ©lĂ©graphie sans fil : rĂ©ception des signaux horaires et des tĂ©lĂ©grammes mĂ©tĂ©orologiques ». (1912) Librairie de la Bonne Presse, Paris. Dans « La TSF Moderne » N°4 de juillet 1920 (p.124), nous pouvons lire le commentaire suivant au sujet du livre du Dr. Corret : « L’amateur y puisera tous les renseignements qui peuvent l’aider Ă  s’initier, depuis les signaux Morse jusqu’aux montages Ă©lĂ©mentaires les plus divers ». Pionnier de la radio en France, le Docteur Corret (1881-1936) rĂ©alisa au dĂ©but de 1914 des liaisons avec un Ă©metteur Ă  arcs, avec le radioamateur Pierre Louis entre OrlĂ©ans et Versailles. Par la suite, il fut titulaire de l’indicatif d’émission ‘8AE’, station Ă©tablie 97, rue Royale Ă  Versailles.

(4) Aucunes rĂ©fĂ©rences relatives Ă  cet ouvrage trouvĂ©es dans les catalogues de recherche des bibliothĂšques universitaires belges et Ă©trangĂšres. Il existe bien « La T.S.F. par les tubes Ă  vide » par Pierre Louis chez Vuibert, Paris 1920. Le nom Dapsens d’Yvoir apparaĂźt dans des publications plus rĂ©centes.

(5) L’ingĂ©nieur amĂ©ricain Edwin Howard Armstrong (1890-1954) fut l’un des inventeurs les plus prolifiques de l’histoire de la radioĂ©lectricitĂ©. Il dĂ©posa plusieurs brevets exceptionnels dans l’histoire de la radio : le circuit Ă  rĂ©action (1914), la super rĂ©action (1922) et le rĂ©cepteur superhĂ©tĂ©rodyne, brevet dĂ©posĂ© en 1918 alors que Armstrong Ă©tait en France, sans doute influencĂ© par Lucien LĂ©vy, Ă  l’époque chef de laboratoire de la radio militaire de la Tour Eiffel. Revenu aux Etats-Unis, il poursuivit ses travaux dans un autre domaine qui rĂ©volutionnera la radiodiffusion : la modulation de frĂ©quence (FM)

(6) Lors du 1er CongrĂšs International des Radio-Amateurs (Paris, 14-18 Avril 1925), le Docteur Pierre Corret participa Ă  la commission d’étude « Langue internationale auxiliaire ». Convaincu de l'intĂ©rĂȘt de l'usage d'une langue auxiliaire internationale dans les relations entre radioamateurs, il sera un Ă©nergique dĂ©fenseur de l'EspĂ©ranto et crĂ©era, avec E. Aisberg, R. Mesny et d'autres pionniers de la TSF, la premiĂšre association internationale de radioamateurs ‘espĂ©rantophones’ en 1926 : IRA (Internacia Radio Asocio). Il sera par ailleurs l’auteur d’une thĂšse trĂšs remarquĂ©e sur « L’utilitĂ© et la possibilitĂ© de l’adoption d’une langue internationale auxiliaire dans la mĂ©decine ».

(7) Joseph Roussel (1879-1929), fut rĂ©dacteur en chef du Journal « l’Onde Hertzienne » et  auteur de nombreux ouvrages de vulgarisation. Le plus connu est sans doute  « Le premier livre de l’amateur de T.S.F. » sorti des presses de l’éditeur parisien Vuibert en 1921. Ce livre a permis aux amateurs de rĂ©aliser en toute sĂ©curitĂ© de nombreux montages de postes rĂ©cepteurs. Le succĂšs fut tel que dĂšs 1924, l'Ă©diteur mettait sous presse la cinquiĂšme Ă©dition. En 1923, il Ă©crira « Comment recevoir la tĂ©lĂ©phonie sans fil », un livre Ă  l'attention de tous ceux qui voulaient Ă©couter les nouvelles Ă©missions parlĂ©es transmises depuis le poste de la Tour Eiffel. Il assurait aussi Ă  cette Ă©poque les fonctions de SecrĂ©taire GĂ©nĂ©ral de la SociĂ©tĂ© Française d'Etudes de TĂ©lĂ©graphie et de TĂ©lĂ©phonie Sans Fil. Joseph Roussel fit aussi partie des pionniers des radio-amateurs français (Station ‘8AD’ Ă©tablie 12, rue Hoche Ă  Juvisy-sur-Orge (Seine-et-Oise).

(8) L’A.R.R.L, puissante association d’amateurs Ă©metteurs aux États-Unis, lança l’idĂ©e des essais transatlantiques. Entre fĂ©vrier 1921 et janvier 1924, il y eut 4 sĂ©ries d’essais. En fĂ©vrier 1921, les premiers essais transatlantiques unilatĂ©raux eurent lieu entre les États-Unis et l’Angleterre. Ces tests se sont avĂ©rĂ©s infructueux.
En dĂ©cembre 1921, les essais furent repris pendant cette fois 10 nuits consĂ©cutives. Un amateur amĂ©ricain, Mr. Paul F. Godley vint Ă©tablir un poste d’écoute super hĂ©tĂ©rodyne Ă  Ardrossan, en Ecosse.
Il reçut les signaux d’une vingtaine de postes d’amateurs amĂ©ricains, et plusieurs Anglais rĂ©ussirent Ă  entendre les transmissions d’outre-Atlantique. Les amateurs europĂ©ens se piquĂšrent au jeu. En dĂ©cembre 1922, eurent lieu les premiers essais transatlantiques bilatĂ©raux sous la direction (en France) du Dr. Pierre Corret. Enfin, une derniĂšre sĂ©rie d’essais eut lieu du 22 dĂ©cembre 1923 au 10 janvier 1924.
40 stations europĂ©ennes d’amateur ont Ă©tĂ© entendues aux États-Unis et au Canada par   96 amateurs amĂ©ricains : 20 amateurs britanniques, 14 stations françaises et 6 stations hollandaises. Le retentissement des essais transatlantiques fut considĂ©rable dans les diffĂ©rents milieux s’intĂ©ressant au dĂ©veloppement de la radioĂ©lectricitĂ©.

(9) En Novembre 1922, LĂ©on Deloy, titulaire de l’indicatif 8AB, commençait ses premiers essais Ă  Nice. En 1923, il construisit son Ă©metteur pour une longueur d’onde de 100 mĂštres. DĂšs le premier essai, Mr. Schnell, 1MO de Hartford (Connecticut) reçut 8AB parfaitement ; lui-mĂȘme Ă©tait entendu en France. Enfin, le 28 novembre 1923, dans les premiĂšres heures du matin, la premiĂšre communication bilatĂ©rale eut lieu entre les États-Unis et l’Europe sur une longueur d’onde avoisinant les 100 mĂštres. Le poste d’émission 8AB comportait 2 lampes de 250 watts (‘La fin justifie les moyens’) et un jeu de transformateurs fournissant la haute tension. Le rĂ©cepteur Ă©tait un ‘Grebe’ et l’antenne du type prismatique de 10m de longueur et de 25m de hauteur avec son contrepoids. Ci-dessous le schĂ©ma de l’émetteur utilisĂ©.

(10) ImprimĂ© sur un papier jaune caractĂ©ristique, le premier numĂ©ro de l’édition belge du journal « L’Antenne » vit le jour le mercredi 5 mars 1924. Ce magazine fut Ă  l’origine le ‘supplĂ©ment hebdomadaire illustré’ de « La Meuse », un quotidien liĂ©geois bien connu. ParticuliĂšrement intĂ©ressante pour les trĂšs nombreux lecteurs en Belgique, une ‘Chronique Belge’ fut annoncĂ©e pour la 1Ăšre fois en janvier 1925. Ce magazine, publiĂ© de maniĂšre continue pendant 14 ans, constitua LA rĂ©fĂ©rence technique parmi les revues consacrĂ©es Ă  la T.S.F.

(11) En Belgique, alors que les « conditions d’établissement des postes rĂ©cepteurs de tĂ©lĂ©graphie sans fil »  sont clairement dĂ©finies dans un ArrĂȘtĂ© MinistĂ©riel (7 AoĂ»t 1920, taxe: 10 Fr.), « l’émission est tolĂ©rĂ©e avec grande bienveillance par l’administration des P.T.T. » (Science et savoir-faire 1925 p.110) mais elle reste interdite. Ces premiers ‘radioamateurs’ opĂ©raient sans autorisation, dans la clandestinitĂ© la plus totale. La crainte des ces ‘noirs’ vis-Ă -vis des autoritĂ©s et une certaine mĂ©fiance mutuelle sont merveilleusement racontĂ©s par H. De Meyere dans ses ‘Souvenirs’. A Bruxelles, les amateurs ‘sans-filistes’ se rĂ©unissaient dans les locaux du « Cercle belge d’études radioĂ©lectriques » (CBER), au 3e Ă©tage du Palais d’Egmont. Ils Ă©taient 4 Ă  l’origine.

          ◊   Hugo De Meyere, K2, 33, rue J. Lahaye, Jette - Bruxelles. (Aussi : RAB (1924), R-001 et ON4TI)

          ◊   Georges Pollart, D2, 62, rue de Hollande, Bruxelles. (Aussi : 4GP (1924), EB4BY et ON4BY)

           ◊   Rudolph Couppez, W2, 23, rue Elise, Bruxelles. Il fut le correspondant belge du cĂ©lĂšbre journal ‘L’Antenne’.

           â—Š   Constantin Haumont, B7, Avenue Albert, 187, Bruxelles.

 (12) Ernest Louvet, 5, rue Jean Robie, Bruxelles. Titulaire des indicatifs 8SSN, O2, puis ON4SN (‘QSO’ 05/1940)

 (13) Le « RÉSEAU des DEUX »  fut fondĂ© le 12/8/1924 au cafĂ© ‘Marnix’ Ă 

         Bruxelles par : B7, W2, O2, K2, D2. Robert Deloor, P2, (futur ON4SA) 2 Avenue du Mont-Kemmel, Saint-Gilles, Bruxelles ainsi que Joseph Mussche, C2 63, Boulevard PoincarĂ©, Bruxelles (futur ON4BK) rejoignirent le groupe. « Le RĂ©seau des 2 existe depuis janvier 1922 Â» (‘L’Antenne’ N°100 du 24/2/1925) constitue une affirmation fantaisiste. Une liste (quasi) complĂšte des membres du « RĂ©seau des deux Â» est reproduite en annexe. (annexe 2)

(14) Le mĂȘme article relatant la crĂ©ation du « RĂ©seau Belge » fut publiĂ© dans le ‘Journal des 8’ N°37 du 28/3/1925 et dans ‘L’Antenne’ N°106 du 7/4/1925. Il dĂ©bute ainsi :  «  L’ancien « RĂ©seau des 2 », groupement des Ă©metteurs belges a pris une telle extension qu’il a Ă©tĂ© nĂ©cessaire de crĂ©er le « RĂ©seau Belge » des Ă©metteurs ». Une liste de 45 indicatifs ‘actifs’ Ă©tait publiĂ©e. La 1Ăšre rĂ©union des membres du RB eut lieu le dimanche 3 mai 1925 Ă  14h30 au local, 11, rue du CongrĂšs Ă  Bruxelles. (‘L’Antenne’ N°111 du 12/5/1925)

(15) La rĂ©alitĂ© historique est diffĂ©rente ! Ce fut AndrĂ© Courtois, 4YZ de Verviers qui rĂ©alisa le 11 dĂ©cembre 1924 la 1Ăšre liaison entre la Belgique et le continent amĂ©ricain. Un article paru dans le ‘QST’ de l’époque constitue une preuve irrĂ©futable. « Belgium became QSO the North American continent for the first time when c1AR ‘Old Joe’ Fasset, at Halifax, N.S. clicked with b4YZ on Dec.11th, the latter station using 9 watts input. 1QV, Westerly, R.I., worked P2, Brussels onDec.20th, and on the 23rd W2, also in Brussels, worked u1KC (
) 1KC tied up with b4RS on Dec.24th, making the fourth Belgian to work this country. » (QST 02/1925, pp.13-14)

(16) Max Cosyns est nĂ© le 29 mai 1906 Ă  Schaerbeek. Son pĂšre, fondateur de la sociĂ©tĂ© Pharma, Ă©tait professeur de pĂ©trochimie Ă  l’ULB. Encore Ă©tudiant, il se lia d’amitiĂ© avec les amateurs-Ă©metteurs du RĂ©seau Belge. Son indicatif d’émission, B9, figurait dans la liste des tout premiers indicatifs du RB. (Liste du 28 mars 1925) En 1927,  Max Cosyns obtient son diplĂŽme d’ingĂ©nieur Ă©lectromĂ©canicien Ă  l’UniversitĂ© de Bruxelles. Il poursuit des recherches en biophysique et physique nuclĂ©aire dans lecadre de la Fondation MĂ©dicale Reine Elisabeth et du ComitĂ© Solvay. Il rencontre les scientifiques les plus illustres de l’époque : Auguste Piccard dont il est l’assistant à  l’U.L.B., FrĂ©dĂ©ric Joliot-Curie, Enrico Fermi, Albert Einstein, Jean Perrin, Niels Bohr, Sir Ernest Rutherford, Louis de Broglie, Paul Langevin et bien d’autres. ConsidĂ©rĂ© comme un des meilleurs spĂ©cialistes belges en physique nuclĂ©aire et en biologie, Max Cosyns participe aux travaux du professeur Auguste Piccard sur la stratosphĂšre. Il effectuera 2 vols stratosphĂ©riques (1932 et 1934) qui firent « la une  des journaux de l’époque. Pionnier de la stratosphĂšre et des profondeurs abyssales, spĂ©lĂ©ologue confirmĂ© mais controversĂ©, hĂ©ros de la rĂ©sistance et survivant des camp de la mort mais surtout un des plus Ă©minents spĂ©cialistes belges en physique nuclĂ©aireet en biologie, il s’éteindra en mai 1998 Ă  l’ñge de 92 ans.

(17)    

                                                                                                          (Station ‘W2’ – 1925)

(18) Autre ‘carabistouille’ des bonzes du RĂ©seau Belge ! Ce sont les pionniers de Verviers (groupĂ©s et trĂšs actifs depuis 1922 au sein du R.C.B.E.) qui ont rĂ©alisĂ© ces prouesses,  bien Ă©videmment aurai-je tendance Ă  dire!
Les documents de l'Ă©poque constituent la seule source fiable, pas les souvenir‘ anecdotiques’ racontĂ©s 30 ans aprĂšs. Le 29 aoĂ»t 1925, B 4YZ AndrĂ© Courtois (Hodimont-Verviers) contacte Z2AC et établit ainsi la premiĂšre liaison Belgique - Nouvelle ZĂ©lande. Le lendemain, René Pirotte B 4RS (Verviers) contacte Ă  son tour les antipodes. (Z2AE)

         ’L'Antenne’ N°128 du 8/9/1925 ET ‘Le Journal des 8’ N°57 du 4/9/1925 publient leurs exploits.

Cet exploit est confirmĂ© dans « The Wireless World and Radio Review Â» (London) September, 9th, 1925. p.338)

BELGIAN AND NEW ZEALAND DX.   We are glad to state that the first two -way working between Belgium and New Zealand has been carried out by B4YZ, who worked Z2AC on August 29th at 05.30 G.I.T. Z2AC received B4YZ, strength R5. The power at B4YZ station was 65 watts input, pure C.W. Wavelength : 45 metres. During the test Z2AC said he had also heard B4RS, another amateur at Verviers. The input at B4RS was 45 watts, rough A.C.   RenĂ© Pirotte Secretary, Radio Club Belge de l'Est. Verviers, Belgium.  

ANNEXE 2 : Membres du « RÉSEAU des DEUX Â»

L’astĂ©risque (  ⃰  ) signifie qu’aucune information n’est disponible Ă  ce jour.

Le « RÉSEAU des DEUX Â»  fut fondĂ© le 12/8/1924 au cafĂ© ‘Marnix’ Ă  Bruxelles par : B7, W2, O2, K2, D2.

« Le RĂ©seau des 2 existe depuis janvier 1922 Â» (‘L’Antenne’ N°100 du 24/2/1925) constitue une affirmation fantaisiste.

Notes

  1. A2 (ex 4AA) attribué à Woluwé-Stockel par la suite. (A. Berqueman deviendra Q2)
  • E2 ou É2 Ă©tait l’indicatif de Mr. Bonhomme, constructeur des postes ‘Orthodyne’. QSL au Radio-Club de LiĂšge, Maison des Combattants Ă  LiĂšge.
  • Aussi indicatif du poste QRP de W2.
  • L’attribution d’indicatifs d’écoute en « R Â» par le journal « L’Antenne Â» fut suggĂ©rĂ©e par notre compatriote.

          En ‘rĂ©compense’, il reçut R-001 !

  • ON4SF (Radio-Club Socialiste), 17, rue Joseph Stevens, Bruxelles. Dans la publication flamande ‘Radio’, L2 est attribuĂ© Ă  J. Vandepitte, Uytkerke Blankenberghe. Une autre source (‘The Wireless World and Radio Review’, October 14th, 1925, p.521) situe l’indicatif L2 Ă  Athus.
  • M2 attribuĂ© d’abord Ă  Forest-Bruxelles, puis Ă  Namur. (‘QSO’ N°2, 02/1926)
  • ‘O2 de 1923 devenu ON4SN’ (‘QSO’ 05/1940)
  • Premier ‘General Manager’ du futur RĂ©seau Belge. Paul De Neck (U3- ON4UU) lui succĂšdera en Juin 1926.
  • Dans la liste des stations du RB classĂ©es par localitĂ©s (Octobre 1925), U2 se trouvait dans la localitĂ© de Thulin.
  1.  Aussi : Lieutenant Vanhay, Camp de Beverloo.
  1.  Autre titulaire : X2 – 4AX Marcel Fouassin, 64, rue de Serbie, LiĂšge.
  1.  AttribuĂ© dans un premier temps Ă  Anvers.

Sources

         ◊   Revues ‘QSO’ (AnnĂ©e 1926), ‘Le Journal des 8’ (AnnĂ©es 1924 et 1925) et ‘L’Antenne’ (collection personnelle)

          ◊   Citizens Radio Callbook –Amateur Section- 1926, p.52.

          ◊   Cartes QSL (collection personnelle)

Pierre Stoffel ON4PS

© ON4PS. Reproduction et distribution interdite.

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