Interférence entre relais radioamateurs

Interférence entre relais radioamateurs

Cet article proposĂ© par pierre Cornelis ON7PC, nous pousse Ă  avoir une idĂ©e plus gĂ©nĂ©rale, plus globale de l’Ă©volution du champ et sur les risques de perturbations entre deux relais radioamateurs.

1. Avant propos

Le logiciel Radio Mobile http://www.cplus.org/rmw/ est un excellent outil de la prĂ©diction de couverture d’un Ă©metteur radio ou d’un relais radioamateur en particulier. Il utilise des courbes de terrains (SRTM) disponibles sans frais sur le site Internet http://fr.wikipedia.org/wiki/Shuttle_Radar_Topography_Mission. Il utilise un modĂšle de propagation appelĂ© Longley-Rice qui est principalement utilisĂ© en AmĂ©rique du Nord, qui a fait ses preuves et qui est adaptĂ© Ă  la rĂ©ception mobile. Comme pour tous les modĂšles de propagation, il est indispensable de bien comprendre le modĂšle et de maĂźtriser tous les paramĂštres pour que le rĂ©sultat soit pertinent et comme pour tous les modĂšles de propagation, il a ses limites. 
Ce programme s’appelle Interferences_FM.exe.
Voici le lien pour le télécharger en .zip Interferences_FM.zip

En rĂ©alitĂ©, l’idĂ©e est venue pendant un cours de formation sur la planification des frĂ©quences de radiodiffusion. Il y avait dans ce cours un diagramme dont l’allure ne nous semblait pas conforme Ă  la rĂ©alitĂ©. Question d’intuition, de « feeling » 
 Nous avons donc Ă©crit un programme pour dessiner cela de façon plus rĂ©aliste. C’est ce programme qui a Ă©tĂ© retravaillĂ© pour les besoins du service radioamateur. L’emploi de ce programme n’est pas trĂšs compliquĂ©, il faut cependant avoir bien compris les concepts de bases. C’est la raison pour laquelle une grande partie de ce document constitue une synthĂšse et un rappel de la thĂ©orie.

2. Notions générales

Il est intéressant de revoir de concepts de bases sans toutefois entrer dans les détails scientifiques ou trop mathématiques.

2.1. La notion de champ Ă©lectrique

Lorsqu’il s’agit de dĂ©finir les propriĂ©tĂ©s d’un lieu, et entre autres la propriĂ©tĂ© de capter un signal radio, on utilise la notion de champ Ă©lectrique.  Le champ Ă©lectrique Ă©tant exprimĂ© en V/m, dans la pratique on utilise plutĂŽt le ”V/m et plus spĂ©cifiquement encore son expression logarithmique, le dB”V/m.

0 dB”V/m correspond donc 1 ”V/m et comme il s’agit d’une unitĂ© de tension (et non de puissance), 30 dB”V/m correspond Ă  1 ”V/m x 10(30/20) soit 1 ”V/m x 101,5 = 31,6 ”V/m et 60 dB”V/m correspond Ă  1 mV/m.

S’agissant de champ Ă©lectrique, donc des propriĂ©tĂ©s d’un point de l’espace, le type d’antenne de rĂ©ception, son gain, les pertes dans le cĂąble d’antenne de rĂ©ception n’interviennent plus.

Par contre le gain d’antenne de rĂ©ception et les pertes dans les cĂąbles, etc 
 interviendront lorsqu’il s’agira de convertir le champ reçu en tension ou en puissance au rĂ©cepteur (voir § 2.3.).

2.3. La tension ou la puissance Ă  l’entrĂ©e du rĂ©cepteur

Du cĂŽtĂ© rĂ©cepteur, on dĂ©finit une tension Ă  l’entrĂ©e du rĂ©cepteur qui permet d’obtenir un signal audio de bonne qualitĂ©.

La plupart des rĂ©cepteurs prĂ©sentent une sensibilitĂ© typique de 0.15 ”V pour obtenir un Sinad  de 12 dB. 0,15 ”V / 50 ohms correspond Ă  une puissance P = UÂČ/R = (0,15 10-6)ÂČ / 50 =  4,5 10-16 Watts soit sous forme logarithmique Ă  -153,4 dBW ou encore -123,4 dBm.

Les radioamateurs font plutĂŽt rĂ©fĂ©rence Ă  une Ă©chelle en point S fournit par leur S-mĂštre. Mais un S-mĂštre est souvent un appareil « relatif« , et mĂȘme « fort relatif« , il est rarement bien calibrĂ©. Les S-mĂštre des appareils mobiles avec un barre graphe sont des plus fantaisistes, dans le meilleur des cas un point quelque part au 3/4 de l’Ă©chelle correspond grosso modo Ă  un signal de S9, mais dans tous les cas l’Ă©chelle est plutĂŽt linĂ©aire (en ”V reçu au connecteur d’antenne) plutĂŽt que logarithmique (ce que devrait ĂȘtre un S-mĂštre).

Ceci Ă©tant, la ConfĂ©rence IARU-R1 de 1978 a fixĂ©, pour les bandes VHF-UHF, le signal S9 Ă  5 ”V/50 ohms et partant de lĂ  on peut calculer la puissance P = UÂČ/R = (5 10-6)ÂČ / 50 =  5 10-13 Watts soit sous forme logarithmique Ă  -123 dBW ou encore -93 dBm. Il a aussi Ă©tĂ© dĂ©cidĂ© que un point S correspond Ă  6 dB.

Nous voici donc avec deux limites

  • le point oĂč le SINAD est de 12 dB, c’est le minimum minimorum, au-delĂ  la rĂ©ception devient presque inexploitable, cette limite vaut -123 dBm
  • le point le signal est S9 et que l’on pourrait qualifiĂ© de zone de confort et ce qui Ă©quivaut Ă  – 93 dBm

Entre ces deux limites, il y a une différence de 30 dB, ce qui correspond à 5 points S, en conséquence en dessous de S4 le signal devrait devenir mauvais, S3 serait trÚs mauvais et S2 serait absolument inexploitable !

QRL-ham-repeater-figure3-1
Figure 1.

La question suivante sera de convertir cela en champ Ă©lectrique.

2.3. Conversion de dB”V/m en dBm.

QRL-ham-repeater-figure3-2
(figure 2.) Imaginons donc un endroit de l’espace oĂč rĂšgne un champ Ă©lectrique E (exprimĂ© en dB”V/m). A cet endroit on place une antenne dont le gain G (par rapport Ă  l’antenne isotrope) est connu.
La question est de convertir un champ Ă©lectrique en tension sur une rĂ©sistance de charge (Vr) , ce qui revient Ă  dĂ©finir un facteur K. Mais ce qui nous intĂ©resse plus, c’est la puissance et plus prĂ©cisĂ©ment la puissance exprimĂ©e en dBm.

 

Passons la dĂ©monstration, pour donner la relation utile.  

E(dB”V/m)  = P(dBm)  +  20 log f(MHz)  – G(dBi) + 77,2   (quelle que soit l’impĂ©dance !)

ou inversement :  P(dBm)  = E(dB”V/m) – 20 log f(MHz)  + G(dBi) – 77,2    

Nous ne considĂ©rons pas le cĂąble qui relie cette antenne au rĂ©cepteur, mais le cas Ă©chĂ©ant on pourrait soustraire les pertes du gain d’antenne.
Dans la pratique, pour une installation fixe :

QRL-ham-repeater-figure3-11

ou pour une installation mobile :

QRL-ham-repeater-figure3-12

Ou plus simplement encore :

QRL-ham-repeater-figure3-13

Ceci constitue une premiÚre approche du calcul du champ nécessaire pour deux cas typiques et pour deux bandes de fréquences.

2.4. Le rapport de protection

Imaginons une antenne de rĂ©ception qui reçoive deux signaux, un signal voulu (le « wanted ») et un signal perturbateur (l’interferer). Ce champ est appelĂ© champ perturbateur ou champ brouilleur.
Si le signal perturbateur est trĂšs faible, il n’aura aucune influence sur le signal voulu (figure 3 b).
Par contre, si le signal perturbateur est plus Ă©levĂ©, il va brouiller le signal voulu, jusqu’Ă  rendre inaudible   (figure 3 c).

QRL-ham-repeater-figure3-3

Figure 3.

Mais encore faut-il qu’il y ait une certaine diffĂ©rence de niveau entre champ voulu et champ perturbateur. On parle alors d’une valeur appelĂ© rapport de protection. Le rapport de protection est une valeur minimale conventionnelle du rapport signal/brouillage qui correspond Ă  une qualitĂ© de rĂ©ception dĂ©finie subjectivement comme acceptable. Ce rapport peut avoir diverses valeurs suivant le genre de service que l’on dĂ©sire assurer.
Le rapport de protection dĂ©pend du type de modulation qui perturbe une autre modulation. On parle alors en termes de « service » et on peut considĂ©rer tous les cas possibles, la radiodiffusion FM qui perturbe la radiodiffusion FM, la radiodiffusion FM qui perturbe le service aĂ©ronautique mobile, le service de radiodiffusion TV analogique qui perturbe la TV numĂ©rique, etc 
  Mais nous n’allons considĂ©rer ici que de la NBFM qui perturbe de la NBFM, ce que l’on appelle parfois aussi le service « land mobile ».
Le rapport dĂ©pend Ă©galement de l’Ă©cart de frĂ©quence entre le signal souhaitĂ© et le signal brouilleur. Plusieurs cas doivent alors ĂȘtre analysĂ©s :

  • Le cas le plus dĂ©favorable est Ă©videment celui oĂč le signal souhaitĂ© et le signal brouilleur sont sur la mĂȘme frĂ©quence (la diffĂ©rence de frĂ©quence est nulle ou quasi nulle), on parle alors de brouillage co-canal.
  • Si le signal brouilleur prĂ©sente une diffĂ©rence de frĂ©quence Ă©gale au pas du plan de frĂ©quence (12,5 kHz ou 25 kHz pour les plans NBFM), alors on parle de brouillage par canal adjacent Le rapport de protection est dĂ©terminĂ© entre autres par le filtrage au niveau de la frĂ©quence intermĂ©diaire (filtre FI) (de l’ordre de 40 Ă  60 dB) et par l’aptitude du discriminateur FM Ă  dĂ©tecter des signaux fort Ă©loignĂ©s de sa frĂ©quence centrale. Le rapport de protection pour le canal adjacent est pratiquement toujours nĂ©gatif, ce qui veut dire que le brouilleur peut ĂȘtre plus fort que le signal voulu.
  • Et parfois, on considĂšre aussi des brouillages pour des diffĂ©rences de frĂ©quences autres.

Il existe un document de l’ITU qui spĂ©cifie le rapport de protection, il s’agit du Rapport 319 intitulĂ© « Characteristics of equipment and principles governing channels between 25 MHz and 1000 MHz for land mobile service ». Le paragraphe 1.10.3 traite des interfĂ©rences dans le canal (« co-channel interference ») et on y trouve une valeur signal voulu / signal d’interfĂ©rence (« wanted to unwanted »)  de 6,8 dB (pour 12,5 kHz) ou de 4,4 dB (pour 25 kHz). Ces valeurs nous semblent faibles et les informations nous semblent peu dĂ©veloppĂ©es.
Une information pertinente se trouve dans le rapport du NTIAS, plus précisément dans le NTIA REPORT 84-156 dont le titre est Assessment of narrowband modulation technologies for government land mobile operations. Les anglo-saxons appellent ce rapport le rapport Signal-to-Interference ou S/I.
Ainsi pour des canaux espacés de 12,5 kHz, nous avons :

QRL-ham-repeater-figure3-14

 

Si les canaux sont espacés de 25 khz :

QRL-ham-repeater-figure3-15

Un Ă©cart de 0 kHz correspond Ă  une interfĂ©rence sur le mĂȘme canal (« cochannel), un Ă©cart Ă©gal au pas correspond Ă  une interfĂ©rence du canal adjacent (« adjacent channel »). L’Ă©cart d’un demi canal peut ĂȘtre intĂ©ressant pour l’Ă©tude de l’influence d’un nouveau relais Ă  12,5 kHz insĂ©rĂ© dans un plan dĂ©jĂ  existant et basĂ© sur un Ă©cart de 25 kHz.

Notons que dans le cas d’une interfĂ©rence le rapport de protection est une valeur positive : le champ perturbateur doit ĂȘtre infĂ©rieur au champ voulu, alors que dans le cas d’un perturbateur sur un canal adjacent le rapport de protection est une valeur nĂ©gative, c’est-Ă -sire perturbateur peut ĂȘtre supĂ©rieur au champ voulu,

2.5. Prévision statistique du champ électrique

(Désolé, mais ce paragraphe sera relativement long 
 )
QRL-ham-repeater-figure3-4

 

DĂ©s le dĂ©but de la radiodiffusion en FM ou en TV, l’ UIT s’est dotĂ©e d’un outil de prĂ©vision de propagation du champ Ă©lectrique pour un Ă©metteur typique de 1 kW de puissance apparente rayonnĂ©e. Ceci a Ă©tĂ© traduit en recommandation portant la rĂ©fĂ©rence CCIR-370. La premiĂšre version datait de 1951, il y a plusieurs versions, avec des amĂ©liorations et des corrections. Les valeurs de champ donnĂ©es dans la recommandation ont Ă©tĂ© donnĂ©es, uniquement, sous forme de graphiques. Certains utilisateurs, pour leurs propres besoins,  ont fini par transformer les graphiques en tables numĂ©riques.
Cinquante ans aprĂšs, soit en 2001, l’UIT a Ă©tudiĂ© une nouvelle norme pour remplacer la CCIR-370. Cette rĂ©vision en profondeur a donnĂ© lieu Ă  une nouvelle Recommandation portant la rĂ©fĂ©rence ITU-R P.1546. On y retrouve les mĂȘmes principes de bases, mais surtout des formules d’interpolation. La Rec. ITU-R P.1546 est donnĂ©e avec des graphiques (cf la figure 4), mais aussi avec des tables de valeurs numĂ©riques, ce qui facilite la rĂ©alisation d’un programme de calcul.
Notez aussi que le bureau spĂ©cialisĂ© qu’Ă©tait le ComitĂ© Consultatif International de Radiodiffusion (CCIR) a Ă©tĂ© intĂ©grĂ© dans la structure mĂȘme de l’ Union Internationale des TĂ©lĂ©communications (UIT ou ITU) d’oĂč le changement dans la structure de rĂ©fĂ©rence de la norme.

Les Rec. CCIR-370 et ITU-R P.1546 sont fort semblables et dans la majorité des cas il y a tout au plus 2 à 3 dB de différences.
Les Recommandations  CCIR-370 ou ITU-R P.1546  sont basĂ©es sur des mĂ©thodes statistiques. On sait en effet que les ondes se propagent entre deux points de la terre d’une maniĂšre telle que son intensitĂ© au point de rĂ©ception varie de façon alĂ©atoire dans le temps. Ces fluctuations sont causĂ©es par la variation de la rĂ©fraction, de la rĂ©flexion, de la diffraction, de l’absorption, de la polarisation et des phĂ©nomĂšnes de diffusion dans la troposphĂšre et dans l’ionosphĂšre. Des expĂ©riences ont permis de dĂ©montrer que les variations dans le temps et en fonction des emplacements peut ĂȘtre reprĂ©sentĂ©e, de façon satisfaisante par une fonction gaussienne. L’Ă©cart type est d’environ 8,3 dB.

Nous pouvons Ă©tablir le tableau de comparaisons suivantes :

QRL-ham-repeater-figure3-16

Les Recommandations  CCIR-370 ou ITU-R P.1546 donnent des valeurs de champs, ces valeurs sont des  valeurs  statistiques, ce qui signifie que statistiquement la valeur donnĂ©e du champ est valable pour 50 % des emplacements et pour 50 % du temps. Que se passe-t-il pendant les 50 autres % des emplacements ou les 50 autres % du temps ? Tout simplement le champ est plus Ă©levĂ© ou plus faible d’une valeur que l’on appelle Ă©cart type.
Le champ  pour 50 % des emplacements et pour 50 % du temps est aussi  appelĂ© champ constant (« steady »), et le champ pour 1% du temps est aussi appelĂ© champ tropo qui correspond Ă  la situation que les radioamateurs connaissent lorsqu’il y a des conditions de propagation troposphĂ©rique. GĂ©nĂ©ralement on utilise le champ constant pour estimer la zone de couverture ou la zone de service, tandis que le champ tropo est utilisĂ© pour Ă©valuer les risques d’interfĂ©rences.
Pour des distances inférieures à 10 à 15 km la différence entre champ tropo et champ constant est pratiquement insignifiante.
Les Recommandations  CCIR-370 ou ITU-R P.1546 tiennent aussi comptent de diffĂ©rent types de terrain, on considĂšre la propagation au dessus de la terre (pour une rĂ©gion gĂ©ographique typique de l’Europe centrale), au dessus des mers froide (par exemple la Mer du Nord) ou au dessus de mers chaudes (par exemple la Mer MĂ©diterranĂ©enne). On a aussi Ă©tablis des courbes pour les rĂ©gions dĂ©sertiques ou pour les rĂ©gions tropicales. Ici dans ce programme nous n’utiliserons que le modĂšle de propagation au dessus de la terre et pour la rĂ©gion d’Europe centrale.
Les Recommandations CCIR-370 et  ITU-R-1546 s’appliquent Ă  des terrains moyennement vallonnĂ©s, ce qui veut dire un terrain oĂč il n’y a pas de vĂ©ritables « bosses », ni de vĂ©ritables « creux ». Imaginer le paysage entre Bruxelles et Waremme par exemple 
  Evidemment si on est Ă  la Baraque Michel , Ă  la Croix Scaille ou dans le creux de La Roche ou de Poulseur , 
 le terrain ne sera plus un terrain moyennement vallonnĂ©, et champ sera diffĂ©rent. Des facteurs de corrections peuvent ĂȘtre calculĂ©s en fonction de l’angle de dĂ©gagement. Nous n’avons pas tenu compte de ces situations et nous avons considĂ©rĂ© le terrain plat ondulant moyen et monotone.
Les courbes des Recommandations CCIR-370 et ITU-R-1546 ont Ă©tĂ© faites pour la radiodiffusion en considĂ©rant une antenne de rĂ©ception Ă  10 m du sol, typiquement une antenne TV ou FM accrochĂ©e sur un petit mĂąt Ă  la cheminĂ©e. Il existe une formule de correction valable pour des hauteurs d’antennes de rĂ©ception de 1,5 Ă  40 m :
gain dĂ» Ă  la hauteur = (c/6) * 20 log (h/10)

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Calculons la différence entre le champ à 10 m et le champ à 1,5 m du sol

QRL-ham-repeater-figure3-18

Les courbes des Recommandations CCIR-370 et ITU-R-1546 ont été établies pour des émetteurs de 1 kW de puissance apparente rayonnée. Si, par exemple, on utilise un émetteur de 50 W de puissance apparente rayonnée, il y a un facteur 20 soit 13 dB à retrancher du champ électrique.
Les Recommandations CCIR-370 et ITU-R-1546 ne s’appliquent pas exclusivement Ă  la radiodiffusion FM ou TV, mais aussi Ă  n’importe quel autre service. Ainsi un Ă©metteur FM de 1 kW, sur une frĂ©quence « x » avec une hauteur d’antenne « h » et Ă  une distance « d » fournira exactement le mĂȘme champ Ă©lectrique qu’un Ă©metteur TV ou qu’un Ă©metteur NBFM avec les mĂȘmes paramĂštres.

2.6.  Correction pour la pĂ©nĂ©tration dans les bĂątiments

Selon RRC06 Chapitre 3 de l’Annexe 2 : Base techniques § 3.3.2.2, les corrections Ă  apporter pour l’attĂ©nuation provoquĂ©e par la pĂ©nĂ©tration des bĂątiments, sont

QRL-ham-repeater-figure3-19

Mais cette attĂ©nuation n’est valable que si on se trouve prĂšs d’une fenĂȘtre et dans 50 % des emplacements. Cette attĂ©nuation va ĂȘtre beaucoup plus importante si on est dans la cave ou si on est dans un endroit entourĂ© de bĂ©ton (un garage en sous sol par exemple).  Dans le mĂȘme document au § 3.4.5.2 on donne des facteurs de corrections pour augmenter le pourcentage des emplacements

QRL-ham-repeater-figure3-20

Exemple : en VHF et pour garantir 95% des emplacements il faut ajouter 9 dB + 10 dB = 19 dB !
Mais nous allons nous limiter à 50 % des emplacements, c-à-d sans correction supplémentaire.

2.7. Affaiblissement dĂ» Ă  la hauteur de l’antenne de rĂ©ception

Selon RRC06 Chapitre 3 de l’Annexe 2 : Base techniques §  3.2.2.1, les corrections Ă  apporter pour le passage d’une antenne pour la rĂ©ception en fixe avec une hauteur de 10 m Ă  une hauteur pour la rĂ©ception en mobile ou en portable avec une hauteur de 1,5 m,  sont 

QRL-ham-repeater-figure3-21

On peut considérer deux cas :

  • un radioamateur avec une installation fixe, pour laquelle on va considĂ©rer que la hauteur de l’antenne de rĂ©ception est de 10 m au dessus du sol, et nous allons utiliser les valeurs telle quelles, sans correction (= rĂ©fĂ©rence),
  • et un radioamateur en mobile ou en portable avec une antenne Ă  1,5 m du sol, pour laquelle nous allons donc considĂ©rer une attĂ©nuation supplĂ©mentaire de 11 dB pour 145 MHz et 16 dB pour 435 MHz.

2.8. Correction pour les talkie-walkies

Selon une Ă©tude faites pour les GSM ( vbn.aau.dk/files/.pdf ) le fait que le rĂ©cepteur (ou l’Ă©metteur-rĂ©cepteur) est portĂ© contre le corps, dont les tissus sont constituĂ©s de 70 % d’eau, introduit une attĂ©nuation supplĂ©mentaire connue sous le nom de « body-loss ». D’aprĂšs l’Ă©tude faite pour les GSM, on pourrait estimer que cette attĂ©nuation pourrait ĂȘtre de 10 dB.
Le fait de dĂ©tacher l’Ă©metteur rĂ©cepteur du corps et de le porter Ă  quelques dizaines de cm du corps diminue fortement cette attĂ©nuation.
Nous utiliserons ici les courbes de la Recommandation ITU-R P.1546 avec les facteurs de corrections les plus appropriés possibles.

3. Zone de couverture

Nous allons maintenant faire appel Ă  notre petit programme Interferences_FM.exe
3.1. Dans un premier exemple, nous allons considĂ©rer une frĂ©quence de 145 MHz, un Ă©metteur de 15W PAR (exactement comme le recommandait l’IARU R1 depuis les annĂ©es 1972 
), une antenne d’Ă©mission Ă  40 m du sol. Nous allons considĂ©rer un rĂ©cepteur fixe avec une antenne Ă  10 m du sol, un rĂ©cepteur mobile, et un rĂ©cepteur portable.

QRL-ham-repeater-figure3-5
Figure 5.

Notez

  • les deux axe verticaux reprĂ©sentant le champ,
  • l’axe horizontal reprĂ©sente la distance,
  • l’Ă©metteur « wanted » (« voulu ») est Ă  gauche,
  • la ligne verte (ou les lignes vertes) reprĂ©sentent le champ constant, pour les 3 cas considĂ©rĂ©s, c’est-Ă -dire avec una antenne Ă  10 m du sol (en fixe) , en mobile, et en portable.
  • la ligne fuchsia Ă  24 dB”V/m qui reprĂ©sente une rĂ©ception S9 et l’autre ligne fuchsia Ă  – 6 dB”V/m qui reprĂ©sente le seuil de sensibilitĂ© du rĂ©cepteur Ă  12 dB SINAD.

Nous pourrions dresser le tableau suivant :

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3.2. On peut aussi comparer la réception normale en champ constant et la réception en cas de propagation troposphérique. Toujours avec un émetteur de 15 W à 40 m du sol, et en réception mobile, cela donne 


QRL-ham-repeater-figure3-6
Figure 6.

QRL-ham-repeater-figure3-23
On constate

  • une trĂšs faible diffĂ©rence champ constant / champ tropo pour des distances infĂ©rieures Ă  10 km,
  • une diffĂ©rence de l’ordre de 6 dB pour des distances de 30 km
  • mais c’est Ă  grande distance que la diffĂ©rence est beaucoup plus grande

3.3. Un exercice intĂ©ressant est de considĂ©rer la zone de couverture d’un Ă©metteur de 15 W et de voir quelle est la puissance qu’il faudrait pour doubler cette couverture. Le rĂ©sultat est assez remarquable, et il faut environ 200 x plus de puissance (soit 13 dB de plus) pour doubler la couverture. Ce qui rend Ă©videment ridicules ceux qui pensent qu’en doublant la puissance on double la portĂ©e !
3.4. Un autre exercice est de considĂ©rer la zone de couverture d’un Ă©metteur de 15 W et dont l’antenne serait Ă  12 m du sol (un mat TV de 2 x 6 m dans le jardin 
) et de considĂ©rer quelle est l’augmentation de couverture si on porte l’antenne Ă  45 m (un bĂątiment de 9 Ă©tages + un petit mĂąt de 5-6 m). Le rĂ©sultat est remarquable et au lieu d’augmenter la puissance de 200 x (voir exemple prĂ©cĂ©dent) on a intĂ©rĂȘt Ă  trouver un emplacement plus adĂ©quat avec une hauteur d’antenne plus importante. Ce qui devrait aussi conduire au refus des dossiers introduits pour des relais dont l’antenne est Ă  la taille d’un nain de jardin.

4. Brouillage entre relais

Imaginons le relais ON0BT sur la fréquence 145.075 MHz (R3) avec 15 Watts PAR, et une antenne à 88 m du sol. On peut établir une liste avec tous les relais sur cette fréquence et calculer la distance par rapport à ON0BT :

QRL-ham-repeater-figure3-24

Nous allons nous intĂ©resser plus spĂ©cialement au cas du relais de St Gobain, F5ZFS, parce que des radioamateurs « en marge » de la zone de service se sont dĂ©jĂ  plaints, alors autant prendre un cas que nous pourrions qualifiĂ© de critique. Le site http://cnrb.ref-union.org/listings/relais_144 nous apprend qu’il s’agit d’un relais Ă  vocation de couverture dĂ©partementale (le 02, l’Aisne avec Laon, Soissons et son vase et son Roi Clovis Ier 
), mais sans autre prĂ©cision on pourrait imaginer que ce relais utilise aussi 15 Watts PAR et soit situĂ© Ă  45 m du sol.
Remarques :

  1. Pour faire des calculs prĂ©cis, il faut des donnĂ©es prĂ©cises. Or, Ă  l’exception d’un indicatif, d’une frĂ©quence, et d’un WW locator les informations qui sont rendues publiques, ne permettent pas rĂ©ellement de calculer les couvertures et les interfĂ©rences sur les relais. Ces donnĂ©es sont absolument incomplĂštes, bien souvent il faut faire des hypothĂšses. Il faudrait la puissance PAR exacte , la hauteur d’antenne exacte , les coordonnĂ©es exactes (degrĂ© minutes secondes),  etc 
 Ces donnĂ©es devraient ĂȘtre centralisĂ©es pour tous les pays europĂ©ens, la base de donnĂ©es devrait ĂȘtre simple, rĂ©guliĂšrement mise Ă  jour et accessible Ă  tous.
  2. Loin de nous l’idĂ©e de faire un procĂšs d’intention, mais simplement le fait que nous sommes ici en prĂ©sence d’un cas limite que nous connaissons. Le relais ON0BT existe depuis fort longtemps (1975 ?) et le relais F5ZFS a Ă©tĂ© coordonnĂ©, nous ne reviendrons pas lĂ -dessus 


Revenons Ă  nos courbes 
 Si nous prenons le cas du champ constant, s’il n’y avait pas de brouilleur on pourrait entendre le relais avec un SINAD de 12 dB Ă  84 km, avec le brouilleur la courbe noire (champ utile + rapport de protection) coupe la courbe verte Ă  72 km. La portĂ©e du relais ON0BT est donc rĂ©duite Ă  72 km.

QRL-ham-repeater-figure3-7
Figure 7.

Si nous prenons le cas du champ tropo, s’il n’y avait pas de brouilleur on pourrait entendre le relais avec un SINAD de 12 dB Ă  84 km, avec le brouilleur cela tombe Ă  48 km.

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Figure 8.

Nous savons aussi que les conditions de champ tropo ne se produisent que 1% du temps soit 3,56 jours par an, soit 85,4 heures, mais on pourrait aussi arrondir Ă  4 jours par an pour faire simple. Mais cette durĂ©e peut ĂȘtre rĂ©partie en plusieurs crĂ©neaux de temps. Par exemple 4 heures par jour pendant 21 jours, soit 84 heures correspond aussi Ă  1 % du temps. Et en pratique on constate plutĂŽt des perturbations fractionnĂ©es de ce type qu’une perturbation longue et qui perdure.
Bien sĂ»r il y a l’argument du relais qui ne doit desservi qu’une certaine zone, et ON0BT est le relais du Brabant il ne devrait donc desservir que le Brabant, tout comme F5ZFS est le relais du dĂ©partement de l’Aisne, il ne devrait desservir que le dĂ©partement de l’Aisne. Cela constitue des Ă©lĂ©ments « politiques » dans le sens noble de la gestion. Mais ici nous ne considĂ©rons pas ces Ă©lĂ©ments « politiques », nous essayons de comprendre la propagation et le brouillage et plus spĂ©cialement dans un cas « limite » oĂč les installations peuvent continuer Ă  fonctionner, mais oĂč les signaux « se chatouillent » de temps Ă  autre.  
Et bien sĂ»r nous avons pris 15 Watts PAR pour les deux cas, mais rien ne garantis que ce soit la situation rĂ©elle  !
Et bien sĂ»r on pourrait inverser les calculs et voir l’influence de ON0BT sur la rĂ©ception du relais français F5ZFS. A puissance Ă©gale c’est toujours le relais le plus Ă©levĂ© (en altitude) qui perturbe le moins Ă©levĂ©.
Nous venons d’analyser le problĂšme de ON0BT et de F5ZFS, parce que certains radioamateurs ont constatĂ© des phĂ©nomĂšnes d’interfĂ©rence. La mĂ©thode de calcul montre que les problĂšmes pourraient bien exister.
Nous avons vu dans la liste que d’autres relais Ă©taient encore plus prĂȘt. On pourrait refaire des calculs pour ces relais.
Dans le dĂ©but de l’implĂ©mentation des relais en Europe (1970-1980), le DARC, association des radios amateurs allemands avait pour principe de considĂ©rer une distance minimale de 200 km entre relais qui travaillaient sur la mĂȘme frĂ©quence. C’Ă©tait un critĂšre de base pour la coordination des relais. On s’aperçoit que cette rĂšgle (empirique), et sans tenir compte des paramĂštres exacts (vraie puissance, vraie hauteur d’antenne, vraie distance, vrai profil,  â€Š) n’est pas insensĂ©e et qu’elle n’est pas exagĂ©rĂ©e.
On pourrait aussi en dĂ©duire que tout brouilleur au-delĂ  de 400 km peut simplement ĂȘtre ignorĂ©. Il reste cependant les exceptions des relais exceptionnellement bien situĂ©s (par exemple le relais du Zugsptize en Allemagne) ou des relais Ă  trĂšs forte puissance.
En réalité la situation est beaucoup plus complexe car il y a plusieurs relais brouilleurs et les brouillages vont se cumuler. Il conviendrait de faire une liste de tous les relais sur le R3 et de calculer tous les brouillages ou du moins ceux des relais les plus proches.
Nous avons vu que dans le cas du canal adjacent le rapport de protection pouvait ĂȘtre nĂ©gatif et fort important. Toutefois il faut noter que l’introduction des canaux Ă  12,5 kHz ne  s’est pas faite avec beaucoup de rigueur. Les Ă©metteurs des radioamateurs n’ont pas Ă©tĂ© mis en « narrow », les constructeurs n’ont pas forcĂ©ment mis les bons filtres FI dans les rĂ©cepteurs et quelques appareils sont toujours aux anciennes normes. Il n’est alors pas possible d’applique les rapports de protection aussi Ă©levĂ© et le risque de brouillage est pratiquement aussi grand que si on Ă©tait restĂ© sur le mĂȘme canal. Il reste alors aussi la possibilitĂ© de faire un dĂ©calage d’un demi-canal.
Toutes ces situations sont Ă©videment des situations hypothĂ©tiques. Nous n’avons pas tenu compte du relief. Nous n’avons pas tenu compte des bĂątiments ou autres obstacles naturels ou artificiels. On n’a pas pu Ă©tudier le cas de la station situĂ©e au 2eme sous sol du parking d’un grand magasin, ni celui du radioamateur sous un pont mĂ©tallique du chemin de fer, ni celui du radioamateur parquĂ© sur un point haut, ni celui du radioamateur avec un « QTH exceptionnel » et une antenne yagi avec un gain important (parfois 10 dB ou plus !).

Quoiqu’il en soit ceci est un outil qui devrait permettre de mieux comprendre la couverture d’un relais et les problĂšmes de brouillages.   

Le programme est là « pour vous amuser », pour simuler des cas pratiques avec des grands pylÎnes et avec des petits mùts, avec de fortes puissances ou des puissances plus raisonnables.

5. ParamĂštres

Le programme ne permet que le choix entre 2 frĂ©quences 145 MHz et 435 MHz. Il n’y a pas de diffĂ©rence significative entre le haut et le bas de la bande 70 cm.

QRL-ham-repeater-figure3-9
Le rapport de protection peut ĂȘtre choisi soit

  • pour le mĂȘme canal (10 dB)
  • pour le canal adjacent (-80 dB)
  • pour un dĂ©calage d’un demi canal (-30 dB)
  • ou le rapport de protection peut ĂȘtre imposĂ©.

Si on utilise le rapport de protection pour le canal adjacent ou pour le demi canal adjacent, il faut toutefois s’assurer que le filtre FI dans le rĂ©cepteur correspond au plan de frĂ©quence voulu (12,5 ou 25 kHz) et le cas Ă©chĂ©ant que l’Ă©metteur est bien rĂ©glĂ© en « narrow » (Df = 2,5 kHz).   
Ce rapport de protection peut ĂȘtre appliquĂ© au champ constant ou au champ tropo.

QRL-ham-repeater-figure3-10
On peut choisir entre 4 types de réception

  • la rĂ©ception sur antenne extĂ©rieure typiquement Ă  10 m du sol (c’est la situation de rĂ©fĂ©rence des normes CCIR-370 et ITU-R P.1546),
  • la rĂ©ception mobile oĂč le fait de ramener l’antenne de 10 m Ă  1,5 m du sol introduit une attĂ©nuation de 11 dB en VHF et 16 dB en UHF,
  • la rĂ©ception portable avec le transceiver attachĂ© Ă  la ceinture oĂč le body loss introduit encore une attĂ©nuation supplĂ©mentaire
  • la rĂ©ception en portable Ă  l’intĂ©rieur des bĂątiments oĂč on tient compte de l’attĂ©nuation de pĂ©nĂ©tration des ondes dans le bĂątiments, mais sans toutefois considĂ©rer des cas extrĂȘmes. Le portable doit ĂȘtre pratiquement prĂšs d’une fenĂȘtre.

Une case à cocher « keep old graphics » permet de superposer plusieurs courbes à fin de comparaison.
Un bouton permet d’inverser (« swap ») l’Ă©metteur voulu et l’Ă©metteur brouilleur.
Le diagramme peut ĂȘtre sauvĂ© sous forme de fichier jpg dans un rĂ©pertoire appelĂ© « results » par dĂ©faut.
A la fermeture du programme, les paramÚtres sont sauvés dans un fichier *ini.
Il existe aussi un calculateur de distance basĂ© sur le WW locator, c’est une sorte d’utilitaire disponible pour les besoins des calculs et ne nĂ©cessitant pas l’emploi d’un autre logiciel.

ON7PC par Pierre Cornelis | ON7PC

Auteur / autrice

  • A travaillĂ© au sein du dĂ©partement des transmissions Ă  la RTBF et a Ă©galement occupĂ© un poste au ministĂšre. Toujours animĂ© par sa passion pour la radio amateur, il a Ă©galement assumĂ© des responsabilitĂ©s administratives Ă  l'UBA et dispense des cours Ă  la section de LiĂšge.